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Billet de blog 26 juillet 2010

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Alain Finkielkraut: Un bandeau sur des yeux ouverts

Alain Finkielkraut : un bandeau sur des yeux ouverts L'injonction d'A. Finkielkraut est piquante venant de quelqu'un qui avoue ne pas bien connaître les dossiers. Au lieu d'examiner les faits, il prend une pose de défenseur de la bienséance politique, laquelle consisterait à ne pas accabler les malandrins pris la main dans le sac. Nous ne sommes à ses yeux qu'une plèbe haineuse, une meute « hurlant avec les loups » s'adonnant à la « chasse à l'homme ».J'aurais envie de lui conseiller de retirer le bandeau qu'il a devant ses yeux avant de les ouvrir et de s'informer des sujets dont il entend débattre.

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Alain Finkielkraut : un bandeau sur des yeux ouverts

L'injonction d'A. Finkielkraut est piquante venant de quelqu'un qui avoue ne pas bien connaître les dossiers. Au lieu d'examiner les faits, il prend une pose de défenseur de la bienséance politique, laquelle consisterait à ne pas accabler les malandrins pris la main dans le sac. Nous ne sommes à ses yeux qu'une plèbe haineuse, une meute « hurlant avec les loups » s'adonnant à la « chasse à l'homme ».

J'aurais envie de lui conseiller de retirer le bandeau qu'il a devant ses yeux avant de les ouvrir et de s'informer des sujets dont il entend débattre.

A propos des « méthodes fascistes de Médiapart » (X.Bertrand) il tente un repli stratégique : « Je trouve les propos de X.B. totalement déplacés », (déplacés ! la condamnation est bien indulgente), pour ensuite les comparer à « la violence rhétorique de Médiapart ». Il édulcore d'un côté, il accuse le trait de l'autre, et il prétend ainsi faire balance égale.

A propos des affidés du Fouquet's et de ses sorties sur le yacht de Bolloré A. Finkielkraut. s'écrie immédiatement : « Mais il y a prescription ! » Non, car il y a récidive. Pour ce que Sarkozy pensait pouvoir afficher au lendemain de son élection, ses communicants lui ont conseillé plus de discrétion. Le financement par L.Bettencourt de l'UMP, vraisemblablement en partie illégal, était plus discret et moins défendable. Le Président apparaît comme le serviteur dévoué et rétribué des grandes fortunes. Les enveloppes à l'UMP ne sont que les commissions du bouclier fiscal.

A. Finkelkraut reprend à son compte la légende du bouclier fiscal selon la propagande officielle de l'UMP : « 50% de ses revenus, c'est beaucoup d'argent ». Le Canard Enchainé et Laurent Mauduit dans Médiapart ont calculé que L.Bettencourt a payé sur ses 270 millions de revenus déclarés entre 9% (le Canard) et 20% (Médiapart) d'impôts. Soit, dans le premier cas, ce que paye un couple aux revenus modestes, ou dans le second, un cadre moyen. Je ne vous calcule pas ce qui reste à chacun pour vivre. Pourtant dire que: « Les riches sont favorisés au détriment des pauvres » est pour A. Finkielkraut une « analyse démagogique »

Autre argument d'une pauvreté exemplaire : « Si vous voulez dénoncer les rapports de ce gouvernement avec les milieux d'affaires, élargissez la focale » aux agissements de Chirac et de Ségolène Royal. Comme A. Finkielkraut ne nous dit pas en quoi leurs pratiques sont comparables, il nous reste deux conclusions possibles : le « Tous pourris » du Front national ou, deuxième possibilité, les malversations des uns excusent celles des autres. Il fut un temps ou les horreurs du stalinisme se voyaient renvoyées à celles des Etats-Unis au Chili ou au Nicaragua, et l'inverse, comme si on ne pouvait pas sortir de ce manichéisme en s'opposant aux unes et aux autres.

« Hurler avec les loups », « Fuir la réalité dans la haine ». Est-ce hurler que de rendre publique des conversations relatant des agissements délictueux, de demander à une justice indépendante d'enquêter ? L'expression fait image. Une bande sauvage, la bave aux lèvres, hurlant à la mort. C'est l'image que tente d'imposer la communication élyséenne, « une chasse à l'homme », une meute lancée aux trousses d'Eric Woerth. On peut avoir du respect pour la personne de L.Bettencourt et d'E.Woerth et dénoncer les fraudes de l'une et s'interroger sur les possibilités de conflit d'intérêt de l'autre. C'est vouloir escamoter le débat que de parler de chasse à l'homme. C'est vouloir remplacer la raison par la passion. Pour A. Finkielkraut le peuple ne peut avoir que des comportements bestiaux, seule l'élite pense.

« Je choisirais le côté du manche »

Heureux de l'apprendre. La grande majorité de la population secouée par la crise serait du côté du manche, et Bettencourt, Maistre, Banier,Woerth, Sarkozy seraient du côté des victimes ? Devant un tel déni de la réalité, je reste stupéfait.

« On nous parle d'une mainmise de Nicolas Sarkozy sur les médias. Il a eu absolument tort...de nommer lui-même les présidents de l'audio visuel public ».

A qui appartiennent les journaux, les radios , les télévisions ? Tous ces propriétaires se sont retrouvés au Fouquet's pour fêter la victoire de leur poulain. Il faut lire le communiqué des journalistes du Figaro pour apprécier le poids de l'Elysée par l'intermédiaire d'Etienne

Mougeotte et de Dassault. Je suis consterné par l'absence de professionnalisme des journalistes vedettes de la T.V.

Alors que les propos de X.Bertrand sur les « méthodes fascistes » de Médiapart » ont été diffusés sur toutes les chaines, quels sont les médias qui ont donné le jugement de la cour d'appel disant que les informations de Médiapart révélant l'affaire Bettencourt relèvent de « la légitime information du public » ? Les faits sont là.

« Aucune preuve n'a été fournie d'une prise illégale d'intérêt »

Les preuves, ce n'est pas à la presse de les apporter. Son rôle est de révéler des faits permettant à chacun de s'interroger et, si nécessaire, à la justice d'enquêter et de juger.

« Philippe Courroye aura à cœur de mener l'enquête jusqu'au bout ». Vous manquez d'information. Ce procureur est mentionné dans les bandes comme celui qui communique à l'Elysée ses décisions un mois avant de rendre son jugement public.

Dans l'appel à une justice indépendante il est dit :

Les affaires Bettencourt qui dominent la vie politique française depuis plus de trois semaines donnent en spectacle une justice aux antipodes des principes directeurs du procès pénal et des exigences du droit européen récemment rappelées par la Cour européenne des droits de l'homme dans ses arrêts «Medvedyev».

Le procureur de la République de Nanterre comme le procureur général de Versailles, du fait de leur lien direct et statutaire avec le pouvoir exécutif, ne peuvent présenter aucune garantie d'impartialité.

Quant à la procédure d'enquête préliminaire privilégiée par le pouvoir dans ce dossier, elle est secrète et non contradictoire.

Il est urgent qu'une instruction soit ouverte et qu'elle soit confiée à un collège de juges indépendants respectant les règles du procès équitable, notamment la présomption d'innocence, le principe du contradictoire et les droits de la défense.

Le discrédit jeté sur notre justice ne doit plus durer.

Je pourrais continuer ce commentaire de texte tant les réponses d'A.Finkielkraut comportent d'inexactitudes et d'arguments faibles. Tous les lecteurs de Médiapart et bien d'autres, ayant suivi de près l'actualité, pourront rectifier d'eux-mêmes des erreurs factuelles. A.Finkielkraut reconnaît lui-même sa méconnaissance du dossier. Lui, le pourfendeur d'internet, aurait bien là l'occasion de l'utiliser. Et l'on voit à travers tous les commentaires comment sa pensée, perchée sur un piédestal, se croit au dessus de la pensée commune. Descendue, elle est mise à mal du fait de la faiblesse de son contenu.

L'introduction d'Antoine Perraud résume bien la position d'A.Finkielkraut :

« Qu'il entende une clameur populaire depuis sa tour d'ivoire, il en prendra derechef le contre-pied, tant l'horrifie la foule pavlovienne. Mais ce faisant, l'homme qui prétend penser à rebours des meutes, ne rejoint-il pas le sens commun qu'instillent Le Figaro et d'autres feuilles établies? »

Croyant s'opposer au réflexe pavlovien il en donne au contraire un parfait exemple.

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