Effectivement, il s'agit d'un mouvement réactionnaire, mais des réacs, le pays n'en manque pas, à commencer par le sinistre de l'Intérieur Bruno Retailleau. Lorsqu'il y a eu la fronde des réacs contre le mariage pour tous en 2012-2013, et Retailleau en était, ce fut un beau panel d'activistes religieux montés au créneau, chrétiens, musulmans, juifs, bouddhistes (sans que cette mobilisation entraîne l'ensemble des croyants à l'une ou l'autre religion). Par la suite, c'est contre les ABCD de l'égalité (plan d'action pour l'égalité des filles et garçons à l'école vers 2013-2014) que l'on retrouve les mêmes réacs se liguer.
Franchement, il y a bien d'autres sujets pour se faire peur que cette histoire « d'entrisme islamiste ». En tout cas, ce n'est pas en pondant une nouvelle loi et de nouveaux interdits que ça va changer quelque chose. Les réactionnaires existent, semblent même progresser, en nombre, qui veulent disqualifier l'héritage des années 68. Mieux vaut les combattre politiquement.
L'entrisme n'est pas histoire nouvelle : c'est une manière d'agir masqué dans des associations, syndicats, partis politiques pour exercer une influence. Ça n'est pas une spécificité d'islamistes. On en a parlé notamment pour les trotskistes. L'extrême-droite n'est pas en reste, avec l'entrisme de militants d'Occident dans les années 1970 (groupe facho où on trouvait notamment Longuet et Madelin) dans les partis de droite « traditionnelle ». De même, des gens d'extrême-droite ont tenté de noyauter (autre forme d'entrisme) le mouvement des Gilets Jaunes.
Evidemment, mieux vaut savoir « qui est qui » et surtout « qui défend quoi » quand on milite dans une association ou un parti politique. En principe, les statuts permettent de limiter la portée de l'entrisme, mais pas toujours. On constate souvent une étonnante vague d'adhésions à des moments où le pouvoir est en jeu (cf l'élection récente du président du parti LR avec des amis de Retailleau ou de Wauquiez). C'était pas de l'entrisme ça ?
Mais je reviens sur l'entrisme des Frères musulmans dans des associations, voire dans le monde politique et les municipalités. Si ça peut exister, il ne faudrait quand même pas généraliser, surtout en cette période de montée des racismes et des défiances, notamment contre les personnes supposées être musulmanes, supposées rien que par leurs noms et prénoms à consonnance arabe ou africaine (comme si tous les Bernard et les Marie étaient chrétiens).
Les préjugés ne valent rien. Les exploiter est une faute.
Ces discours sur « l'entrisme islamiste » sont à mon avis un avatar de la montée en puissance de l'idéologie raciste du « grand remplacement », une traduction du soupçon envers les personnes supposées être étrangères, fussent-elles françaises depuis des générations.
Les idées réactionnaires, d'où qu'elles viennent, sont à combattre.