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Billet de blog 19 septembre 2024

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Série d'accidents du travail en région des Pays-de-la-Loire

En une quinzaine de jours, une série d'accidents du travail dans la région des Pays-de-la-Loire. La lecture de la presse quotidienne régionale (PQR) est instructive, même si on ne partage pas forcément ses lignes éditoriales.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Pour ma part, je lis Ouest-France (O-F), qui est assez complet (par rapport à d'autres journaux), entre infos internationales, nationales, régionales et locales. Et depuis début septembre, j'y trouve des informations sur des accidents du travail dans la région. En nombre inhabituel.

O-F dimanche 1er septembre : Beaupréau (Maine-et-Loire).
« Un accident est survenu lors de l’installation d’une tyrolienne de La Petite Angevine, une importante foire commerciale et agricole à Beaupréau-en-Mauges (Maine-et-Loire). 
Une jeune employée a été grièvement blessée, son pronostic vital est engagé ».

O-F mardi 10 septembre : Chateaubriand (Maine-et-Loire).
« Accident du travail : il perd la vie à 40 ans après la chute d’un fût de bière
L’employé âgé de 40 ans d’un fournisseur de boissons a perdu la vie, lundi 9 septembre 2024 à Châteaubriant, après la chute d’un fût de boisson stocké en hauteur. Une enquête de gendarmerie est ouverte. L'inspection du travail s'est immédiatement rendu sur place ».

O-F samedi 14 septembre : Avrillé (Maine-et-Loire).
« Il était environ 21 h, jeudi, quand un travailleur de Nickel-Chrome, à Avrillé, près d'Angers (Maine-et-Loire), s'est fait écraser par une presse : il n'a pas survécu à ses blessures. Selon le procureur de la République, il aurait été pris mécaniquement dans la machine Une enquête a été ouverte, confiée à l'inspection du travail et à la police ».

O-F lundi 16 septembre : Montmirail (Sarthe).
« Ce lundi 16 septembre 2024, un salarié d’une entreprise d’élagage et d’abattage d’arbres en Sarthe a trouvé la mort, à Montmirail, à l’est du département.
Ce salarié est décédé alors qu’il intervenait chez un client. Un arbre lui est tombé dessus. Il a succombé à ses blessures. Une enquête est ouverte afin de déterminer les circonstances exactes du drame. Selon nos informations, ce n’est pas la victime qui était en train de tronçonner l’arbre. Il faisait partie d’une équipe de professionnels.
La victime est un homme âgé d’une petite quarantaine d’années ».

O-F mercredi 18 septembre : Saumur (Maine-et-Loire)
« Lundi 16 septembre, le responsable adjoint des quais de réception de l’hypermarché Leclerc de Saumur a eu le bras coincé dans une broyeuse. Selon les premiers éléments,l'homme âgé de 60 ans aurait voulu remédier à un souci technique sur la machine lorsque son bras est resté coincé dans la broyeuse alors que celle-ci fonctionnait toujours ».

L'analyse de la CARSAT des Pays-de-la-Loire (chiffres 2022 parus en juin 2024) :

Ce sont des entrefilets dans le journal. Des faits sans analyse. Au moins, ces faits sont relatés.
En terme d'analyse, Ouest-France relaie néanmoins un document de la CARSAT des Pays-de-la-Loire, sur les statistiques d'accidentologie de 2022.

Ouest-France, 18/06/2024 : « Dans les Pays de la Loire, une baisse des accidents du travail pas très claire ».
Dans les Pays de la Loire, en 2022, les données de l’Assurance maladie font apparaître une baisse de 16 % du nombre d’accidents du travail. Une évolution suspecte.
Les conditions de travail des salariés se sont-elles fortement améliorées dans les Pays de la Loire ? Pas certain. En publiant les statistiques 2022, l’Assurance maladie préconise d’emblée la plus grande vigilance pour interpréter les chiffres. Lesquels indiquent « une baisse de la sinistralité, en rupture avec les années précédentes ». Pour la Région, ces données font apparaître, par rapport à l’année 2021, une baisse de 16 % des accidents du travail et un recul de 15 % des maladies professionnelles. Alors que, dans le même temps, le nombre de salariés a augmenté de 1,8 %, souligne la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail, la Carsat .
" Ces données apparaissent en divergence avec les historiques des séries statistiques antérieures. Il semble difficile de les expliquer par des évolutions favorables “naturelles” de la sinistralité."    Pour la Carsat, elles ne reflètent donc pas la réalité des risques auxquels sont exposés les salariés. La même tendance est observée au niveau national, alors même que les accidents mortels, eux, progressent.
La Caisse nationale de l’assurance maladie cherche d’ailleurs à comprendre cette chute et explore plusieurs pistes. En regardant le contexte professionnel : télétravail, ralentissement d’activité. Mais aussi en examinant de plus près « les outils de déclarations et les déclarations incomplètes ». Depuis l’été 2022, la procédure a en effet changé : elle comporte désormais non plus un, mais deux certificats à remplir obligatoirement et plusieurs cases à cocher.
Dans la revue Santé et travail, les syndicats ont récemment sonné l’alarme. Si cette baisse est liée à de mauvaises déclarations, cela pose un problème majeur pour des salariés qui ne seraient pas pris en charge au titre d’un accident, mais de la maladie (et donc moins bien indemnisés). Sans parler des politiques de prévention, qui pourraient être revues à la baisse ».

Que comprendre ? la CARSAT n'est pas convaincue par les chiffres 2022 qui indiquent une baisse de l'accidentologie, probablement du fait d'une procédure de déclaration plus complexe.

Penchons-nous sur ces chiffres 2022 : https://www.carsat-pl.fr/files/live/sites/carsat-pl/files/pdf/entreprises/stats_atmp-2022.pdf

En 2022, selon ce document, dans la région des Pays-de-la-Loire, les accidents du travail (AT) :
«Nb d'AT avec une 1ère indemnisation : 36 932, soit 101 AT par jour,
Nb d'AT Mortels : 48, dont 5 suicides (56% de 48 AT mortels sont consécutifs à des malaises)
Nb de journées perdues : 2 498 728 soit 9900 Équivalents Temps Plein»

Et les maladies professionnelles (MP) :
« 4 243 maladies professionnelles avec une 1ère indemnisation soit 12 MP par jour
Nb de journées perdues : 1 526 254 journées perdues soit près de 6 032 Équivalents Temps Plein ».

Il faut noter aussi que les accidents de trajet pour se rendre à son travail sont considérés comme des accidents de travail.
En 2022, « Près de 4 700 accidents de trajet en première indemnisation ». « 25 accidents mortels de trajets ont été reconnus comme accidents du travail». « La voiture est à l'origine de près de 30 % des accidents de trajets, les motocycles et scooters à 10 %, les bicyclettes, patinettes (dont trottinettes) à 8 %. Ces derniers sont en forte augmentation (+25 % par rapport à 2020 et +13 % par rapport à 2019) ». 

Tout ceci est considérable et ces chiffres ne concernent que les personnels et entreprises du secteur privé, donc pas les fonctions publiques (de l'État, des collectivités territoriales et de la santé).
Les causes des accidents : elles sont multiples, parfois liées à des manipulations hasardeuses de salariés, mais aussi à des machines mal réglées, des formations à leur usage non dispensées (ce qui fait par exemple que des intérimaires sont plus souvent victimes que des titulaires), un rythme de travail qui affaiblit la vigilance des salariés ou leur cause un malaise mortel ou parfois des suicides reconnus par la CARSAT comme accidents du travail.
La responsabilité des patrons est donc souvent engagée.

La macronie y est aussi pour quelque chose:
En septembre 2024, il semble que le phénomène s'accentue. Il faut dire qu'outre la responsabilité des employeurs, les pouvoirs publics (l'État quoi !) ont une responsabilité particulière :
- avec les lois Travail qui ont remis en cause l'existence des CHSCT (Comité d'Hygiène, de Sécurité et Conditions de Travail), leur substituant les CSST (commissions santé, sécurite et conditions de travail) dont les prérogatives et la proximité avec les salariés sont bien réduites par rapport aux anciens CHSCT.
- Et puis il y a l'Inspection du Travail dont les effectifs sont en érosion constante (16% d'effectifs en moins entre 2016 et 2021, et ça continue vu que la priorité gouvernementale est de « réduire les dépenses de l'État »), pourtant un élément important pour la prévention des risques et la répression des employeurs qui ne respectent pas la loi.

Selon la CGT Travail Emploi et Formation Professionnelle, « On compte désormais en moyenne un poste d’inspecteur du travail pour 10 500 salariés. La France se situe ainsi en deçà du ratio de l’Organisation Internationale du Travail, pourtant déjà insuffisant, d’un agent pour 10 000 salarié.es dans les pays industrialisés ». 
 https://cgt-tefp.fr/linspection-du-travail-est-exsangue-le-front-populaire-doit-lui-redonner-des-couleurs/

Et la CGT TEFP de s'interroger dès le mois de mars 2024 sur la Ministre du Travail, Madame Vautrin :
« Y a-t-il une Ministre du Travail et de l’Emploi ?  
https://cgt-tefp.fr/y-a-t-il-une-ministre-du-travail-et-de-lemploi/
Depuis le 11 janvier et la nomination de Mme Vautrin au (super-) Ministère du travail, de la santé et des solidarités, les organisations syndicales côté travail et santé n’ont eu de cesse de l’interpeller. Pourtant nous n’avons eu aucun retour. Rien. Pas même un mot de présentation auprès des services lors de son arrivée. En fait, il est difficile de savoir s’il y a bien quelqu’une à la tête de notre ministère... ».

Nous sommes le 19 septembre 2024. Michel Barnier, Premier Ministre, tente de constituer son gouvernement.
Parmi les probables ministres, il y aurait Madame Vautrin, ministre sortante du Travail.
Quant à Barnier, visitant dernièrement un hôpital, il déclarait « qu'il faut mieux dépenser », vieille rengaine consistant à refuser de mettre plus d'argent dans la santé.
Il y a eu aussi ces discours alarmistes de l'Assurance Maladie (discours bien relayés sur les chaînes d'information continue) sur la progression des arrêts maladie, annonçant des mesures drastiques contre les bénéficiaires et aussi les médecins.
Mais autour du travail, aucune décision pour améliorer les conditions de vie et l'organisation du travail. L'épidémie d'accidents du travail risque hélas bien de se poursuivre.


Salarié.es de ce pays, ne vous laissez pas endormir ! 

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