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Billet de blog 21 juin 2023

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Ce que les faits divers enseignent sur la société

Serait-ce juste une question de chance ? être là où il ne fallait pas être (subir un accident de la route ou tomber sur un sale type ou encore un fou furieux), être victime directe ou collatérale d'un règlement de comptes ou encore de liens « interpersonnels » qui tournent au vinaigre. « Fatalidas ! » comme dirait Chéribibi.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les rubriques de faits divers sont tristes et attristantes. Isolées les unes des autres, elles soulèvent certes l'émotion, mais aussi un sentiment d'impuissance.

Reliées entre elles, elles peuvent faire dire n'importe quoi à n'importe qui. Macron, ce n'importe qui parmi d'autres, l'a illustré dernièrement en agrégeant quelques faits divers (la mort d’une infirmière attaquée au couteau par un patient au CHU de Reims, la mort de trois policiers tués par un chauffard bourré et l'incendie de la maison du maire de Saint-Brévin) pour conclure doctement qu'elles étaient le signe d'un « processus de décivilisation », rien que ça. Il devrait nettoyer devant sa porte !

Quant à l'extrême-droite et la droite extrême, tout fait divers mettant en cause une personne « pas de chez nous » est abondamment commenté, monté en épingle, pour toujours aboutir à demander un durcissement des lois, code pénal ou lois sur l'immigration, comme on a pu le constater encore du côté d'Annecy, avec cet agresseur au couteau d'origine syrienne. Des vautours !

Par comparaison, d'autres « faits divers » semblent sortir du champ politique.

Quand une femme meurt des coups de son compagnon ou ex-compagnon, c'est triste, on s'en indigne, mais qu'y pouvons-nous, vu qu'il s'agirait de questions « interpersonnelles » ?

Quand un forcené tire au fusil sur ses voisins, c'est triste et édifiant. Mais qu'y pouvons-nous ?

Quand un « zonard » vous braque pour vous subtiliser votre carte bleue ou votre smartphone, on est toujours dans le registre du fait divers. C'est bien triste pour la victime.

Quand un fou du volant, peut-être sous l'emprise de substances légales ou illégales, fauche quelqu'un d'autre, c'est pas de chance.

Quand quelqu'un se suicide, c'est triste, mais qu'y pouvions-nous ?

Quand une personne sans domicile fixe meurt de froid ou de chaud, c'est triste, mais qu'y pouvions nous ?

Quand un usager mécontent menace les personnels de l'hôpital, du bureau de poste ou de l'agence Pôle Emploi, c'est consternant, mais qu'y pouvons-nous ?

Quand un ou une salariée est victime d'un accident de travail, mortel ou handicapant, ça paraît dans les faits divers. C'est triste.
Quand un ou une patiente est victime de maladie nosocomiale (je me souviens des transfusions sanguines dans les années 1980 non traitées contre le HIV), c'est triste et c'est pas de chance.

Et pourtant, la politique n'est jamais lointaine.

Au vu de cette liste à la Prévert de faits divers, on peut quand même envisager que beaucoup d'entre eux pourraient, devraient être évités.

Les questions dites « interpersonnelles » conduisant à des drames comme les féminicides nécessitent prévention et surtout éducation. Un vaste programme, mais il faut s'en emparer.
Les questions de criminalité exigent autre chose que des réponses a posteriori. Il y a certes des gens sans scrupules. Mais les questions de la santé mentale, de la pauvreté, de la prévention auprès des jeunes, de la conscience collective, de la solidarité face aux situations de précarité sont primordiales.

Et que dire de la dégradation des services publics qui fait que des usagers sont maltraités, mais aussi des personnels qui les accueillent !

Les suicides, parlons-en, on ne saura jamais tous les éviter, mais quand même, on sait que beaucoup sont liés à l'activité professionnelle, chez des paysans noyés sous les dettes, chez des salariés victimes d'un management pervers, chez des fonctionnaires ou des personnels hospitaliers, chez des personnes frappées par la grande pauvreté. Il y a quelque chose à faire.

Les SDF qui meurent à la rue, bon sang ! Ça n'est pas acceptable. C'est un sujet politique.

Les accidents mortels ou pas du travail, sont en augmentation depuis plusieurs années, les maladies professionnelles sont largement sous-estimées : ne sont-ils pas liés à la pression sur les salariés, leur manque de formation (ces sont souvent des intérimaires qui en sont victimes), à la pression financière des donneurs d'ordre sur les entreprises sous-traitantes ? Là aussi, la baisse des effectifs de l'inspection du travail, la fréquence des visites médicales du travail passées d'un an à cinq ans par le biais des « lois travail » pèsent lourd.

 Dans la meilleure des sociétés, on n'évitera pas toujours les mauvaises rencontres. Nous n'avons pas toutes et tous les mêmes chances dans la vie : il y a une part de contingence.

Mais quand même, les faits divers ne sont pas, et de loin, toujours le fruit du pur hasard : ils sont le fruit d'une culture (par exemple le machisme), d'une éducation (à la compétition), d'une indifférence aussi souvent, et surtout d'une société basée sur des rapports de domination, contre lesquels il faut se défendre et apprendre à se défendre collectivement et solidairement.

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