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Billet de blog 26 novembre 2015

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Lettre à un ami tunisien

Je t’avais fait part, à ce moment-là, de mon appréhension de voir le terrorisme islamiste déborder sur la Tunisie, sur le Maroc et sur la Libye. Tu m’avais alors répondu, dans un grand éclat de rire : « Mais nous les Tunisiens, nous sommes des gens pacifiques et civilisés… ! »

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  jeudi 26 novembre 2015 | Par Rachid Boudjedra | 

Pendant la décennie rouge/noire (1990/2000) que nous avons connue en Algérie, tu m’avais souvent invité à l’université où tu enseignes toujours. Par respect pour mon travail d’écrivain et par une sorte de solidarité avec le citoyen algérien que j’étais et qui se battait avec sa plume, uniquement avec sa plume ! Contre l’obscurantisme qui avait envahi le pays  pour des raisons à la fois objectives (cela a commencé après la révolte d’octobre 1988 qui a eu lieu pour protester contre la mauvaise gouvernance du pouvoir en place, la corruption généralisée et le mépris affiché par les gouvernants vis-à-vis des Algériens) et subjectives (l’Algérie était depuis longtemps dans le collimateur des Américains à cause du pétrole ; des Français à cause de la défaite  militaire et politique subie en 1962 ; et des Saoudiens qui avaient pris le pays comme cobaye pour y installer leur idéologie, le wahhabisme, déjà en vogue en Afghanistan et aussi pour faire pays à l’Algérie son passé « socialiste » pendant la période boumédieniste).

Un jour, en mai 1996, alors que j’étais à Tunis pour donner des conférences à l’université, nous avions évoqué la terrible situation que vivait mon pays, l’islamisme, le terrorisme etc.

Je t’avais fait part, à ce moment-là, de mon appréhension de voir le terrorisme islamiste déborder sur la Tunisie, sur le Maroc et sur la Libye. Tu m’avais alors répondu, dans un grand éclat de rire : « Mais nous les Tunisiens, nous sommes des gens pacifiques et civilisés… ! »

J’en fus outré et révolté par de tels propos qui laissaient entendre que les Algériens étaient des gens violents et non civilisés. Je t’avais répondu que le Maghreb était un et que notre Histoire commune était là pour prouver que nous avions tous eu le même itinéraire historique depuis la période numide et bien avant. J’avais dit : « N’oublie pas, nous avons le couscous qui nous lie à tout jamais et on reparlera du terrorisme tunisien, dans quelques années ! »

Aujourd’hui que ce pays que les Algériens aiment beaucoup est tombé dans la tourmente du terrorisme islamique, je voudrais te dire que j’en suis meurtri et que j’aurais tellement voulu me tromper en te disant que vous n’y échapperiez pas car c’est la loi intraitable et terrible de l’histoire et de la géographie. Rachid Boudjedra

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