L’opposition crie au scandale et soutient que le président ivoirien ne peut légalement prétendre à un nouveau mandat, alors que ses partisans se réjouissent d’une décision qui devrait permettre de poursuivre le développement du pays, tout en pérennisant la paix et la sécurité retrouvée depuis qu’Alassane Ouattara est au pouvoir.
A l’analyse, une fois de plus les opposants au régime expriment des états d’âme là où l’on devrait plutôt évoquer la loi et s’en tenir à celle-ci, qu’elle nous plaise ou non. Juridiquement, pour que le président Ouattara ne soit pas éligible à la prochaine présidentielle, il eut fallu que les dispositions transitoires -inclues dans la constitution promulguée le 8 Novembre 2016- indiquent clairement que le président de la république en fonction au moment de l’adoption de cette constitution, est lui-même concerné par la limitation du nombre de mandat du président de la république à deux. Or il se trouve que ces dispositions transitoires, qui clarifient pourtant certains sujets, restent totalement muettes là-dessus. Dans le cadre d’une nouvelle constitution élaborée sous IBK, le Comité d’Experts Maliens, après avoir précisé la limitation à deux mandats, avait pris la précaution de spécifié que « nul ne peut servir plus de deux mandats » fin de citation. Ainsi libellée, cette disposition verrouillait toute possibilité pour le président en exercice d’exercer plus de deux mandats.
Rappelons à ce stade que ce qui s’est passé sur le plan législatif en 2016 en Côte d’Ivoire, n’est pas qu’un simple amendement constitutionnel où l’on modifie quelques dispositions de la loi fondamentale. Il s’est agi de transformation de fond : conditions d’éligibilité à la présidence de la république ; création d’un poste de vice-président de la république ; création d’un Senat ; réorganisation de la vacance en cas de disparition ou d’empêchement du président de la république ; etc. C’est donc bien une nouvelle constitution que la Côte d’Ivoire a adopté en 2016, passant d’ailleurs de la 2e à la 3e République.
La jurisprudence Wade au Sénégal en 2012 est là pour nous servir un peu de boussole. A la faveur d’un amendement constitutionnel, Abdoulaye Wade avait présenté sa candidature pour ce que nombre d’opposants et détracteurs considéraient comme un "3e mandat anticonstitutionnel". Mais malgré de gigantesques manifestations parfois émaillées de violences, le Conseil Constitutionnel avait finalement validé la candidature du président sortant, évoquant justement le silence des dispositions transitoires qui, déclaraient les hauts magistrats Sénégalais non sans une certaine ironie à l’endroit des opposants, a "omis de préciser expressément le fait que le président en exercice, est lui-aussi concerné par l’impossibilité pour tout président de la république, d’exercer plus de deux mandats" fin de citation.
Personnellement, je n’ai jamais milité pour un 3e mandat d’Alassane Ouattara. Mais il ne s’agit pas d’une question où l’on demande l’opinion des uns et des autres. Il s’agit de lire la loi et de s’en tenir à celle-ci, dans une démarche constitutionnaliste. Seules des dispositions transitoires auraient pu empêcher un autre mandat d’Alassane Ouattara ; elles ne l’ont pas fait.
Il n’appartient donc ni à Saïd, au Pr. Ouraga Obou, à Cissé Bacongo, mamadou koulibaly, henry konan bédié, gbagbo, Guillaume Soro ou à tout autre individu de refuser à Alassane Ouattara des droits à lui accordés par la constitution ivoirienne de Novembre 2016.
En conséquence, que cela nous plaise ou non, Alassane Ouattara est donc encore éligible pour deux mandats de cinq ans. C’est une question de droit constitutionnelle qui ne prête à aucune interprétation. Aux détracteurs du président ivoirien, je dirais simplement : Duralex sed lex (La loi est dure, mais c’est la loi) ! Tout le reste n'est que verbiage inutile et agitation stérile.
Ce qui est vrai, est vrai !
Saïd Penda/ Ancien de la BBC et de l’Union Européenne -Journaliste d’investigation et analyste politique.