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Billet de blog 18 septembre 2008

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Ces auteurs qui phagocytent le marché du livre

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Un coup d'oeil sur les meilleures ventes de livres -catégorie romans- cette semaine (et les précédentes) et toujours la même rengaine: les Musso, les Levy, Nothomb et consorts auxquels s'ajoute le chouchou de ces derniers mois, Larsson. Dans la catégorie "essais", les hommes politiques en mal de tribune ont trouvé leur créneau et tant pis pour les autres.

Oui, tant pis pour les petits. Pour les petites maisons d'édition qui rament pour imposer de petits auteurs presque anonymes, dont le talent est inversement proportionnel à la diffusion dont il font l'objet. La proposition est aussi valable pour les auteurs cités dans le premier paragraphe -vous suivez?- y compris pour le très surestimé Larsson (il est vrai que la médiocre traduction de sa trilogie n'arrange rien).

Etonnant à l'ère de la démocratisation de l'acte artistique (je lance mon groupe de musique sur Internet, je mets mes textes en ligne sur la Toile etc.) ? Non. Démocratisation rime ici avec banalisation. Banalisation de la démarche artistique réduite à peau de chagrin, lissage délétère des matières -tout se vaut, plus de recul critique- surfant sur des buzz médiatiques aussi gros qu'inutiles.

D'ailleurs les auteurs rares se cachent (pour mourir) -et je ne parle pas ici de Pynchon, formidable exception à la règle, Pynchon éternel mousse dont l'absence magnétise le monde éberlué qui crie une nouvelle fois au génie sans avoir même ouvert Contre-jour. Puisque les petits auteurs se cachent (malgré eux, contrairement à Thomas P.), il faut les chercher. Et ce n'est pas sur les étals uniformes des grandes surfaces du livre que nous les trouverons. Alors creusons camarades et sus aux écrits des cacographes qui inondent le marché.

Voici reproduits (en partie) ci-dessous les propos du directeur d'une petite maison d'édition expliquant à un auteur singulier, talentueux et méconnu, les raisons du manque de visibilité de son dernier ouvrage. (les noms de l'auteur et de la maison d'édition ne seront pas signalés, cet exemple se voulant emblématique de ce qui se passe actuellement dans le monde de la jungle éditoriale):

"La Sodis, une fois les livres enregistrés, MAIS ÇA PEUT PRENDRE UN MOIS !!!, distribue comme il faut et sert les commandes en 48 heures. Les délais d'enregistrement sont supportables par un grand éditeur mais effroyables pour un petit éditeur comme je le suis. (...) les annonces indues et inacceptables d'indisponibilité de certains titres, parfois du vôtre, que vous voyez apparaître sur les sites de vente par internet (Fnac.com, Amazon, etc.) sont sources de confusion, mais nous les devons à ce que ces sites doivent de l'argent à la Sodis (mon diffuseur me parle en ce moment de 1 million d'euros de dettes dûs par Fnac.com à la Sodis) : il arrive donc que la Sodis se fasse sourde à la demande, ce qui n'apparaît pas si on ne le sait pas (...) mon diffuseur, nouveau comme vous savez, parvient à ce jour et tant bien que mal à "couvrir" 120 librairies, et que c'est insuffisant, mais il semblerait que désormais pour le genre de "mes "livres, c'est déjà très bien !!! (...) es libraires recommandent très rarement une nouveauté une fois vendus l'exemplaire ou les deux exemplaires qu'ils ont commandés, et ceci parce que les librairies vont TRÈS MAL, jugulées qu'elles sont par les factures que leur valent le déluge des nouveautés "bas de gamme", c'est-à-dire l'essentiel de la production désormais : d'autant que l'édition ne pense plus qu'à faire de l'argent avec n'importe quoi et que les libraires étant sous contrat avec les grosses centrales de distribution sont contraints d'accepter, par les termes desdits contrats, le système de l'office, notamment pour le déluge de nouveautés "bas de gamme", office qui leur vaut des factures trop lourdes (...) tout ceci sans compter le je m'en foutisme généralisé pour les petits éditeurs et pour les livres jugés difficiles, dans une période "d'acculturation" pour parler comme beaucoup, mais que je dirais plutôt moi-même une période de "dévastation"."

Cherchez la perle rare. Elle ne se trouve pas devant vous.

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