Sara Calderon (avatar)

Sara Calderon

Enseignante-chercheuse

Abonné·e de Mediapart

171 Billets

0 Édition

Billet de blog 1 juillet 2023

Sara Calderon (avatar)

Sara Calderon

Enseignante-chercheuse

Abonné·e de Mediapart

Terrorisme et désobéissance civile : les dissolutions de groupes progressistes

La récente dissolution des Soulèvements de la terre, et la façon dont elle a eu lieu, ont fait réfléchir à la chancelante santé démocratique du gouvernement Macron.

Sara Calderon (avatar)

Sara Calderon

Enseignante-chercheuse

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Le 21 juin a été voté en conseil de ministres le décret de dissolution des Soulèvements de la terre. La procédure avait été engagée par Gérald Darmanin quelques jours après les événements de Saint-Soline. Dans son argumentaire, le ministre de l’Intérieur présentait le collectif comme étant à l’origine de la révolte sociale en faveur de l’écologie, alors même qu’il en est plutôt le symptôme. Rappelons qu’il fédère une centaine d’associations et de collectifs, ainsi que des personnes indépendantes. Les mots « violence » et « sabotage » reviennent plus d’une dizaine de fois dans sa lettre-argumentaire. Puis, Darmanin déclare que « aucune cause ne justifie qu’on blesse des policiers et des gendarmes ». Or, la répression engagée à Saint-Soline avait été particulièrement critiquée, les forces de l’ordre s’étant servi d’armes semi-létales, ce qui avait entraîné de nombreux blessés et plusieurs morts. La Ligue des droits de l’Homme et Amnesty International s’étaient prononcées contre elle, et l’ONU avait rappelé à l’ordre la France, s’inquiétant de l’état du « droit de réunion » dans le pays.

Les faits, graves, s’insèrent dans une fuite en avant répressive du gouvernement, et dans une opération de communication digne des régimes dictatoriaux. Une dérive autoritaire a rendu possibles un espionnage abusif, des arrestations arbitraires et des conditions de détention disproportionnées, qui encourent dans l’illégalité. La surveillance dont ont fait objet les militants écologistes est allée jusqu’à disposer des traceurs GPS sur leurs voitures et des caméras devant leurs domiciles et lieux de réunion. Parfois elle était le fait d’une « cellule Demeter », force interservices pilotée par la gendarmerie, devant protéger « le milieu agricole » des « actions à caractère idéologique ». Son activité a été gelée à la suite de plusieurs plaintes. Parfois, c’est un service de renseignement qui les surveillait. Cela doit être autorisée par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) et par Elisabeth Borne. La surveillance au titre de la « prévention des violences collectives » a ainsi donné lieu à un bras de fer entre Borne et Darmanin, mais le nombre de personnes surveillées pour ce motif est passé de 2100 en 2018 à presque 3500 aujourd’hui malgré les refus réitérés de celle-ci.

Le combat écologiste a engendré plusieurs vagues d’arrestations. L’action de décembre 2022 contre la cimenterie de La Malle, exploitée par le groupe Lafarge-Hocim, en avait produit une, même si aucun militant n’avait été pris en flagrant délit. Au moins une quinzaine de personnes ont été interpellées en mai 2023, perquisitionnées et placées en garde à vue. Des machines, des dispositifs électriques, des engins et des matériaux de chantier avaient été endommagés au cours de cette action. Une enquête a été ouverte pour « association de malfaiteurs » et « dégradation en bande organisée », l’action s’ajoutant à la liste de griefs reprochés aux SLT. Le ministère reprochait au collectif d’avoir « développé une doctrine qui vise à légitimer les opérations de sabotage auxquelles il provoque ». Les actions de Lafarge et de Saint-Soline ont ainsi conduit à la mise en garde-à-vue de plus de 22 personnes, interrogées par la police anti-terroriste. La détention de chacune d’entre elles avait été excessive dans le meilleur des cas, relevé de la mise en scène dans le pire. Leur porte avait été défoncée, les suspects menottés, parfois plaqués au sol ou mis en joue. La garde-à-vue s’était prolongée jusqu’à quatre jours. Les conditions de détention, « inadmissibles » selon certains députés, ont empêché plusieurs d’entre eux d’avoir accès aux médicaments du traitement qu’ils suivaient, même s’ils disposaient de leurs ordonnances. Les avocats des détenus ont qualifié le recours à la police anti-terroriste de « confusion de genres ». La dissolution des SLT questionne aussi à ce niveau : les militants gardés à vue n’ont pas pu préparer leur défense ; la dissolution entraînant l’interdiction des réunions ou actions collectives, les autres ont été empêchés de coopérer pour leurs défenses.

La dissolution des SLT s’insère dans une campagne de communication qui conduit à s’interroger sur l’état de notre démocratie. Elle manipule l’opinion sans complexes, pour conduire à ce qu’elle accepte l’imposition par le gouvernement de choix sociétaux voulus par le grand capital, au détriment d’enjeux humains et environnementaux. Macron a toujours exercé le pouvoir dans une veine autoritaire, qui est allée en se durcissant. Depuis la répression exercée contre le mouvement des gilets jaunes, jusqu’à l’utilisation onze fois par Elisabeth Borne de l’article 49.3 de la Constitution, en passant par les mises en scène auxquelles il recourt pour faire diversion d’un problème ou diffuser son idéologie libérale, entre autres. En cas de contestation, son discours tend à délégitimer le mouvement d’opposition, pour le placer lui en seul défenseur de la démocratie. Puis, il clive la population française, entre le « bon peuple », qui est soumis et ne manifeste pas, et la foule, qui lui tient tête par folie ou ignorance. La communication que Darmanin effectue dans sa fonction de ministre de l’Intérieur renforce l’aspect autoritaire de celle de Macron. Bien qu’ayant conduit à des affrontements avec la police et à des dégradations matérielles, l’activisme des SLT est très éloigné des pratiques activistes des années 1970 ou 1980, qui pouvaient causer des blessés et des morts. Pourtant, le gouvernement n’a eu de cesse de leur reprocher une supposée violence. Dès octobre 2022, Darmanin fustigeait l’« écoterrorisme », sans doute, on le sait maintenant, pour justifier le recours aux moyens antiterroristes contre les militants. La diffusion, dans les réseaux sociaux du collectif, de vidéos d’instructions pour démonter une mégabassine, ou de la liste des principaux acteurs économiques qui en bénéficiaient, était supposée étayer ces dires. Puis, Darmanin s’est appuyé sur les affrontements de Saint-Soline pour déclarer que « aucune cause ne justifie qu’on blesse des policiers et des gendarmes ». Or, les rares violences condamnables qu’on peut reprocher aux militants sont le fait de personnes isolées, et non celui d’une organisation centralisée, puisque les SLVT n’en possède pas. Plus grave, alors que Darmanin s’applique à mettre sur pied d’égalité le terrorisme et l’activisme pacifique des militants écologistes, l’un des acteurs dont il est question, le groupe Lafarge, a été réellement condamné pour « financement d’activité terroriste » et « complicité de crimes contre l’humanité » à la suite de son financement de groupes terroristes pour maintenir son activité en Syrie. La preuve, s’il en fallait, que le gouvernement ne se soucie pas tant de terrorisme que d’imposer la politique favorable aux intérêts du capital qui peut satisfaire ses amis. A un moment où elle est plus rejetée que jamais par une population qui refuse la destruction et l’injustice propres au capitalisme, cela ne peut se faire sans dérive autoritaire.

Car la bataille livrée autour des enjeux environnementaux est aussi politique et culturelle. Elle oppose deux modèles en agriculture : celui de l’agro-industrie, qui valorise l’extractivisme agricole, et celui d’une agriculture paysanne, qui préserve les communs et la symbiose avec la nature. Le premier sert les intérêts du capitalisme et s’insère dans un système qui le dépasse (usage de pesticides et engrais chimiques ; rôle dans l’élevage intensif…) ; le deuxième préserve le rendement des sols et les niveaux d’eau, fournit une alimentation sans dangers, mais sans alimenter la machine économique. Le débat sur la « violence », le « terrorisme » et le « sabotage » fait partie de cette bataille.

La loi qualifie de « sabotage » les dégradations de nature à « porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ». Les SLT assument les dégradations provoquées sur les engins et les mégabassines, mais les qualifient de « désarmement », pour le rôle qu’ils ont dans l’appauvrissement et la stérilisation des sols, dans le réchauffement climatique et parce qu’ils s’opposent à leur modèle agricole alternatif. Si ces dégradations portent atteinte au modèle économique -pour revendiquer le modèle qu’il étouffe-, il est pour le moins excessif d’estimer qu’elles nuisent aux « intérêts de la nation ». La communication gouvernementale a aussi réussi à donner un sens à la notion de « terrorisme » qu’il est urgent de remettre en question dans les médias.

Il n’est pas facile de s’opposer à un pouvoir beaucoup plus fort, et il l’est encore moins de le faire sans effusion de sang. C’est pourtant l’objectif de la désobéissance civile, une forme de protestation non-violente qui refuse de se soumettre à un pouvoir jugé injuste, et à des dispositions jugées illégitimes, et transforme ce refus en arme de combat pacifique. Parce qu’elle est mise en place par des « citoyens », elle est dite « civile ». Elle ne rompt pas la citoyenneté, mais la sert : elle correspond à une volonté d’œuvrer à l’intérêt général, au prix de risques personnels. La désobéissance civile a été l’arme des opprimés en des contexte historiques de domination extrême, comme le refus de l’esclavage, la revendication du suffrage féminin ou les luttes décoloniales. Les activistes du dérèglement climatique l’utilisent aujourd’hui. Elle a été théorisée par Henry David Thoreau ou Ralph Waldo Emerson, pour qui le seul guide du citoyen doit être sa conscience :  en servant aveuglément un Etat injuste, il devient un « automate » et son obéissance un acte de trahison à l’éthique et à l’humanisme. A l’opposé, le terrorisme implique l’emploi de la terreur à des fins idéologiques, politiques ou religieuses. Par la peur générée chez la population et les pressions qui en découlent pour l’institution, il attire l’attention sur un point de vue. Tous les champs idéologiques ont eu recours au terrorisme, qui utilise la violence contre les civils de façon indiscriminée, ses adeptes considérant que leur cause possède un intérêt supérieur à la violence commise. Né durant la Révolution française, le mot terrorisme prend son sens actuel au XIXème siècle.

La différence majeure entre terrorisme et désobéissance civile se trouve dans l’usage de la violence. Tandis que le premier estime le recours à la violence possible et légitime, le deuxième le considère inconcevable et illégitime. Tandis que les actions terroristes se soldent avec de graves dommages humains, celles de désobéissance civile s’opposent à l’Etat, et enfreignent des lois, pour remettre en cause leur légitimité. En focalisant sa communication sur les dégradations et sur les policiers blessés, l’Etat s’applique à occulter la proposition par les écologistes d’un véritable modèle alternatif, agricole et social. Car, ces actions relèvent de la désobéissance civile, endommageant des ustensiles et refusant de cautionner des décisions de l’Etat, mais sans jamais provoquer des mouvements de terreur dans la population. En encourageant la « confusion des genres » le gouvernement occulte surtout que le modèle proposé par les SLT préserve la productivité de la terre, la biodiversité, la qualité nutritionnelle des aliments, la qualité de l’air, la plus grande stabilité du climat et l’égal accès à l’eau, diminuant en outre les risques de pénurie. Le principal grief du gouvernement contre les SLT est le préjudice que leur modèle agricole entraîne pour le modèle agricole capitaliste. D’ailleurs, après que la FNSEA, principal syndicat agricole capitaliste, ait revendiqué la dissolution des SLT, elle s’attaque à la Confédération Paysanne, syndicat agricole écologiste et de gauche. En parallèle se déroule l’opération de censure d’un gouvernement à la fois servile -des grands groupes financiers- et autoritaire, sans vision de futur ni capacité d’intégration, obstiné à éliminer ce qui lui fait obstacle. Il a lancé le 10 mai une commission d’enquête parlementaire sur les « groupuscules auteurs de violences à l’occasion des manifestations » qui s’intéresse à « la structuration, le financement, les moyens et les modalités d’action de ces groupes ». Au-delà du fait que seules des organisations de gauche ont été convoquées -Attac, Extinction Rébellion, Dernière Rénovation-, toutes pacifiques, une telle étude semble disproportionnée, relevant encore de la lutte antiterroriste.

La France joue beaucoup dans la bataille culturelle qui oppose un gouvernement asservi et les groupes progressistes se réclamant de la « défense du vivant ». Elle joue son futur -la santé et la qualité de vie de ses enfants- et celui de la planète, puisqu’il sera sans doute plus facile aux pays du Nord global d’imposer aux institutions capitalistes de ne plus se tenir à une logique purement financière.

Cet article a pu être produit grâce aux informations recueillies, entre autres, sur Mediapart et sur Contre attaque.

Illustration 1

Gustav Moreau, Le Victorieux Sphinx (détail), 1886.

Terrorismo y desobediencia civil: la disolución de grupos políticos progresistas

La reciente disolución de Soulèvements de la terre (SLT, Revueltas de la tierra), y la manera en que se ha desarrollado, cuestiona la precaria salud democrática del gobierno de Macron.

El 21 de junio el consejo de ministros ha votado el decreto de disolución de SLT. Gerald Darmanin había iniciado el proceso tras los acontecimientos de Saint-Soline. En su argumentario, el ministro del Interior presentaba el colectivo como causante de la revuelta social en favor de la ecología, cuando en realidad es el síntoma. Recordemos que federa un centenar de asociaciones y de colectivos, así como individuos independientes. Las palabras “violencia” y “sabotaje” se repiten más de una decena de veces en su escrito. Además, Darmanin declara que “ninguna causa justifica que se hiera a policías y a gendarmes”. Sin embargo, la represión ejercida en Saint-Soline ha sido particularmente criticada, ya que las fuerzas del orden utilizaron armas semi-letales, lo que supuso muchos heridos y varios muertos. La Liga de derechos humanos y Amnistía internacional pronunciaron contra ella, mientras que la ONU llamó a Francia al orden, preocupada por el ”derecho de reunión” en el país.

Los hechos, graves, se insertan en la huida hacia delante represiva del gobierno, y en una operación de comunicación digna de regímenes dictatoriales. Una deriva autoritaria ha vuelto posibles un espionaje abusivo, arrestos arbitrarios y condiciones de detención desproporcionadas, que hasta incurren en la ilegalidad. La vigilancia de la que han sido objeto los militantes ecologistas hasta ha llevado a disponer rastreadores GPS en sus coches y cámaras delante de sus domicilios y lugares de reunión. A veces, una “célula Deméter”, fuerza interservicios dirigida por la gendarmería que debía proteger “el medio agrícola” de los “actos de carácter ideológico” la llevaba a cabo. Tras varias denuncias, fue desactivada por la justicia. A veces, los activistas eran vigilados por servicios de inteligencia. Eso debe autorizarlo la Comisión nacional de control de las técnicas de inteligencia (CNCTR) y Elisabeth Borne. La vigilancia a título de “prevención de las violencias colectivas” ha generado un pulso entre Borne y Darmanin, pero las personas vigiladas por ese motivo han pasado de 2100 en 2018 a casi 3500 hoy a pesar de las negativas reiteradas de la primera ministra.

El combate ecologista ha engendrado varias oleadas de arrestos. La acción de diciembre de 2022 contra la cementera de La Malle, perteneciente al grupo Lafarge-Hocim, había provocado una de ellas, aún cuando ningún militante había sido sorprendido in fraganti. Al menos unas quince personas fueron detenidas en mayo de 2023, su domicilio registrado y en prisión preventiva. La acción había deteriorado máquinas, dispositivos eléctricos, vehículos y material de construcción. Se abrió una investigación por “asociación de delincuentes” y “degradación en banda organizada” y la acción se añadió a la lista de agravios reprochados a SLT. El ministro alegaba que el colectivo había “desarrollado una doctrina que legitima las operaciones de sabotaje que provoca”. Las acciones de Lafarge y de Saint-Soline han llevado a la detención preventiva de más de 22 personas, que fueron interrogadas por la policía antiterrorista. La detención de cada una de ellas ha sido excesiva, en el mejor de los casos, una puesta en escena, en el peor. Sus puertas fueron forzadas, los sospechos@s esposad@s, a veces inmovilizad@s o apuntad@s con una pistola. La detención preventiva ha llegado a prolongarse 4 días. Las condiciones de detención, “inadmisibles” según varios diputados, han impedido a varios de ell@s acceder a las medicinas de los tratamientos que seguían, aun cuando tenían encima la receta médica. Los abogados de los detenidos han calificado el recurso a la policía antiterrorista de “mezcla de registros”. La disolución de SLT también interroga a ese nivel: los activistas en detención preventiva no han podido preparar su defensa; como la disolución implica la prohibición de reunirse o de asistir a acciones colectivas, los demás no han podido cooperar para la defensa.

La disolución de SLT integra una campaña de comunicación que cuestiona el estado de nuestra democracia. Esta manipula la opinión pública sin complejos, para conducirla a aceptar que el gobierno imponga opciones sociales deseadas por el gran capital, en detrimento de las cuestiones humanitarias y medioambientales. Macron siempre ha ejercido el poder con cierto autoritarismo, que ha ido en aumento. Desde la represión ejercida hacia el movimiento de los chalecos amarillos, hasta el uso once veces por Elisabeth Borne del articulo 49.3 de la Constitución, pasando por las puestas en escena a las que recurre para hacer diversión de problemas o difundir su ideología liberal, entre otras cosas. En caso de ser cuestionado, su discurso tiende a deslegitimar al movimiento de oposición, para situarse como único defensor de la democracia. Divide a la población francesa entre el “buen pueblo”, que se somete y no manifiesta, y la multitud, que se opone a él por locura o por ignorancia. La comunicación que Darmanin efectúa en el marco de su función de ministro del Interior refuerza el aspecto autoritario de la de Macron. Aunque haya provocado enfrentamientos con la policía y degradaciones materiales, el activismo de SLT se encuentra muy alejado de las prácticas de los activistas de los años 1970 o 1980, que podían causar heridos y muertos. Sin embargo, el gobierno no ha cesado de reprocharles su supuesta violencia. Ya en octubre de 2022 Darmanin fustigaba el “ecoterrorismo”, sin duda, como sabemos ahora, para justificar el recurso a los medios antiterroristas contra los activistas. La difusión, en sus redes sociales, de videos de instrucciones para desmontar los megacontenedores, o de la lista de los principales actores económicos a quienes benefician, apoyaba, se supone, esas acusaciones. Es apoyándose en los enfrentamientos de Saint-Soline como Darmanin declara que “ninguna causa justifica que se hiera a policías y gendarmes”. Sin embargo, las pocas violencias condenables que se puede reprochar a los militantes han sido realizadas por personas aisladas, y nunca promovidas por una organización centralizada, puesto que SLVT no la posee. Aún más grave, Darmanin se aplica a equiparar el terrorismo con la actividad pacífica de los militantes ecologistas, cuando uno de los implicados, el grupo Lafarge, realmente ha sido condenado por “financiamiento de actividades terroristas” y “complicidad de crímenes contra la humanidad” por haber financiado grupos terroristas a fin de mantener su actividad en Siria. Prueba, si es que hacía falta, de que el gobierno no se preocupa tanto por el terrorismo como por imponer la política favorable a los intereses del capital que puede satisfacer a sus amigos. En un momento en que es más criticada que nunca por una población que rechaza la destrucción y la injusticia propias del capitalismo, ello no puede hacerse sin deriva autoritaria.

La batalla que se libra en torno a las cuestiones medioambientales es también política y cultural. Opone dos modelos de agricultura: el de la agricultura industrial, que valoriza el extractivismo agrícola, y el de una agricultura campesina, que preserva los comunes y la simbiosis con la naturaleza. El primero sirve los intereses del capital e integra un sistema (uso de pesticidas y abonos químicos; lugar en la ganadería intensiva…); el segundo preserva el rendimiento de los suelos y los niveles de agua, proporciona una alimentación sin peligros, pero no alimenta la economía. El debate sobre la “violencia”, el “terrorismo” y el sabotaje forma parte de esa batalla.

La ley califica de “sabotaje” las degradaciones que dañan “los intereses fundamentales de la nación”. SLT asume las degradaciones provocadas en las máquinas y en los megacontenedores, pero calificándolas de “desarme”, por el papel que éstos tienen en el empobrecimiento y la esterilización de los suelos, en el cambio climático y porque se oponen a su modelo agrícola alternativo. Si las degradaciones perjudican al modelo económico -para reivindicar el modelo que éste ahoga-, es cuanto menos excesivo estimar que perjudican a los “intereses de la nación”. La comunicación gubernamental también ha logrado darle un sentido a la noción de “terrorismo” que urge cuestionar en los medios.

No resulta fácil oponerse a un poder mucho más fuerte, y resulta aún menos fácil hacerlo sin efusión de sangre. Ese es sin embargo el propósito de la desobediencia civil, una forma de protesta no violenta que se niega a someterse a un poder que se estima injusto, y a leyes que se estiman ilegítimas. Transforma ese rechazo en arma de combate pacífico. Se la llama “civil” porque la utilizan “ciudadanos”. No rompe la ciudadanía, sino que la construye: corresponde a la voluntad de obrar en favor del interés general, aún corriendo riesgos personales. La desobediencia civil ha sido el arma de los oprimidos en contextos históricos de extrema dominación, como la oposición a la esclavitud, la reivindicación del sufragio femenino o las luchas decoloniales. Los activistas contra el cambio climático la utilizan hoy. Ha sido teorizada por Henry David Thoreau o Ralph Waldo Emerson, para quien el único guía del ciudadano debía ser su conciencia: sirviendo ciegamente a un Estado injusto, se vuelve un “autómata” y su obediencia una traición a la ética y al humanismo. En las antípodas, el terrorismo implica usar el terror con fines ideológicos, políticos o religiosos. Gracias al miedo provocado en la población y a las presiones sobre la institución que de ello derivan, atrae la atención sobre su punto de vista. Todos los campos ideológicos han recurrido al terrorismo, que usa la violencia contra los civiles de forma indiscriminada, ya que sus adeptos consideran que su causa posee un interés superior a la violencia cometida. Nacida durante la Revolución francesa, la palabra adquiere su significado actual en el siglo XIX.

La mayor diferencia entre terrorismo y desobediencia civil estriba en el uso de la violencia. Mientras que el primero estima que es posible y legítimo recurrir a ella, la segunda lo considera inconcebible e ilegítimo. Al focalizar la comunicación sobre las degradaciones y los policías heridos, el Estado oculta la propuesta por los ecologistas de un verdadero modelo alternativo, agrícola y social. Pues sus acciones son de desobediencia civil: estropean utensilios y rechazan apoyar ciertas decisiones del Estado, pero sin jamás provocar movimientos de pánico en la población. Al favorecer la “mezcla de registros” el gobierno oculta sobre todo que el modelo propuesto por SLT preserva la productividad de la tierra, la biodiversidad, la calidad nutricional de los alimentos, la calidad del aire, la mayor estabilidad climática y la igualdad de acceso al agua, a la vez que disminuye los riesgos de sequía. El principal reproche que el gobierno puede hacer a SLT es el perjuicio que su modelo agrícola supone para el modelo agrícola capitalista. Lo demuestra el que después de que la FNSEA, principal sindicato agrícola capitalista, haya reclamado la disolución de las SLT, reclame ahora la de la Confederación campesina, sindicato agrícola ecologista y de izquierda. De forma paralela se desarrolla la operación de censura de un gobierno a la vez servil -de los grandes grupos financieros- y autoritario, sin visión de futuro ni capacidad de integración, obstinado en eliminar lo que constituye un obstáculo para él. El 10 de mayo lanzó una comisión de investigación parlamentaria sobre los “grupúsculos autores de violencias durante las manifestaciones” que debía reunir información sobre “la estructuración, el financiamiento, los medios y las modalidades de acción de esos grupos”. Más allá de que sólo las organizaciones de izquierda han sido convocadas -Attac, Extinción Rebelión, Ultima renovación-, todas pacíficas, semejante estudio parece desproporcionado, de nuevo vinculado a la lucha antiterrorista.

Francia se juega mucho en la batalla cultural que opone un gobierno servil a los grupos progresistas que se reivindican “defensores de lo viviente”. Se juega su futuro -la salud y la calidad de vida de sus hijos- y el del planeta, puesto que sin duda será más fácil para los países del Norte global imponerles a las instituciones capitalistas el abandono de una lógica puramente financiera.

Este artículo ha sido escrito en parte gracias a las informaciones recogidas en Mediapart y en Contra ataque.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.