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Billet de blog 9 octobre 2016

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Le genre, un outil d’analyse ouvrant sur tant de théories…

Les dernières déclarations du Pape François contre un enseignement qui pourrait intégrer des contenus et des perspectives de genre montrent au minimum une réduction dramatique de la question qui vaut bien qu’on s’arrête sur le sujet.

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Il a fallu à nouveau entendre récemment des revendications contre la mal nommée « théorie du genre », cette fois-ci dans la bouche du Pape François, qui s’inquiétait qu’elle puisse être enseignée dans les écoles. Pour étayer son propos, il faisait d’ailleurs état des catastrophes multiples que cela pourrait entrainer, avec la propagation potentielle de l’homosexualité ou de la transexualité… J’imagine qu’il s’agissait d’un raccourci mal digéré des théories développées à la suite de Butler, mais le propos est tellement enfantin, empreint d’une terreur dont on pourrait se demander si elle ne relève pas d’un manque d’assurance, qu’il porterait à sourire s’il n’était pas si lourd de conséquences pour tant de personnes.

Car c’est très exactement le contraire qui se passe : les codes normatifs binaires du masculin et du féminin que les cultures patriarcales imposent à une nature et à des psychismes profondément divers engendrent de fait de profondes souffrances. Souffrance chez des hommes qui ne sont pas infaillibles, qui peuvent mal gérer la pression dérivée de l’injonction sociale qui leur est faite de l’être et dont le taux de suicide à échelle mondiale double presque celui des femmes (1). Souffrance chez les femmes qui meurent assassinées, à raison de plus de mille en une décennie en France, par des compagnons malades d’un besoin de puissance. Souffrance encore chez certains homosexuels qui, dans les régions les plus tolérantes du globe, sortent à peine, au regard de l’histoire, du stigmate et même des sévices physiques qu’on a pu leur imposer à ce motif. Souffrance des transexuels qui, même dans les régions les plus tolérantes du globe, en sont encore parfois à lutter contre le sentiment d’être en décalage avec leur corps ou contre de véritables sentiments coupables d’être « mal faits ». Souffrance des personnes intersexuées, qui ne peuvent mettre des mots sur leur réalité que depuis relativement peu de temps(2). Puis, souffrance encore, des femmes qui à diplômes et travail égaux sont moins payées que leurs homologues masculins, qui souffrent plus du chômage, qui ont encore à se battre pour avoir les mêmes opportunités professionnelles, qui dans certaines régions de la planète voient leurs corps mutilés, qui dans d’autres se battent toujours pour un rapport plus harmonieux à leur corps etc.

N’en déplaise au Pape François, et malgré les théories queer, vraiment très peu de gens ont capacité a choisir une orientation sexuelle comme par « effet de mode », il est donc tout à fait invraisemblable que le genre agisse comme une sorte de spot publicitaire diabolique et nuise à son sacro-saint mariage qui, il faut bien le rappeler, n’a été en réalité qu’une transaction commerciale entre familles, dans laquelle l’amour n’avait strictement rien à voir, jusqu’à pratiquement le XX siècle, pour les régions les plus tolérantes de la planète. En revanche, les études de genre ont bien la capacité, à terme, de délivrer toute la diversité de la nature qui échappe au schéma binaire de la profonde souffrance qui est parfois encore la sienne, réglant au passage de véritables fléaux, tels que les féminicides ou les suicides liés à une question de genre, et participant à la mise en place de sociétés moins violentes.

Il faut le préciser, compte tenu du degré de répétition de cette expression, le genre n’est pas une théorie, mais un outil d’analyse. C’est à dire qu’il met en place une série de concepts qui permettent d’étudier, analyser et penser le réel pour élaborer non pas une, mais de nombreuses théories, qui parfois s’opposent entre elles, qui se vérifient ou non, que l’on développe ou pas. N’en déplaise à l’Eglise, qui redoute tant la diversité, on aurait donc beaucoup à gagner à divulguer davantage les approches de genre –et certains d’entre nous, nous efforçons de le faire- car elles sont nécessaires pour mettre en place des sociétés plus équilibrées, dont les individus seraient plus en harmonie avec eux-mêmes, dans lesquelles les rapports de pouvoir seraient moins susceptibles de dériver en arbitrariété ou abus de pouvoir, qui généreraient probablement moins de perversions et empreintes d’une plus grande égalité réelle de droits entre les individus.

(1) Selon une étude de 2012 de l’OMS, le taux de suicides masculin doublerait presque le taux de suicides féminins. Dans ses travaux, la psychiatre Anne Maria Möller-Leinkühler attribue en partie la responsabilité de cet état des choses aux normes traditionnelles de la masculinité, avec l’injonction qui est faite aux hommes de toujours se montrer fort, compétitif, dans le vrai et de contrôler des émotions telles que la tristesse ou l’angoisse.

(2) L’espérance de vie des personnes transexuelles serait limitée à 35 ans dans une zone d’étude de pays occidentaux. Outre le taux élevé de suicides -41% aurait fait une tentative- le taux d’homicides est également très élevé. Par ailleurs, le taux de suicides élevé de la communauté transgenre pourrait dériver selon des études récentes de la stigmatisation sociale. Suivant une étude publié dans The Lancest Psychiatry cet été, élaborée sur un corpus de 250 personnes au Mexique et qui doit être suivie d’études similaires pour le Brésil, la France, l’Inde, le Liban et l’Afrique du Sud, 76% des personnes ayant participé auraient subi l’exclusion et le rejet social, y compris de la part de leur famille, camarades de classe et amis.

El género, una herramienta de análisis que permite idear tantas teorías… (carta abierta al Papa Francisco)

Las últimas declaraciones del Papa Francisco en contra de una enseñanza que integre contenidos y perspectivas de género muestran cuanto menos una simplificación dramática de la cuestión que bien merece que se precisen algunas cosas.

De nuevo hemos tenido que escuchar recientemente reivindicaciones contra la mal llamada “teoría de género”, esta vez en boca del Papa Francisco, que se preocupaba de que pudiese enseñarse en los colegios. El Pontífice esbozaba de hecho para ilustrar su afirmación la suma de catástrofes múltiples que algo así podría acarrear, con la potencial propagación de la homosexualidad o de la transexualidad… Imagino que se trataba de un inconsiderado “resumen” de las teorías que se han desarrollado en la línea de Butler, pero la idea es tan infantil, rezumando como lo hace un terror que hasta parece desvelar inseguridades, que podría hacer sonreír si no tuviera consecuencias tan graves para tanta gente.

Pues es justo lo contrario lo que sucede : los códigos normativos binarios de lo masculino y de lo femenino que las culturas patriarcales imponen a una naturaleza y a psiquismos de gran diversidad generan en realidad sufrimientos profundos. Sufrimiento de hombres que no son infalibles, a los que en determinadas coyunturas les puede costar sobrellevar la presión derivada del mandato social que reciben de serlo y cuya tasa de suicidio a escala mundial casi duplica la de las mujeres(1). Sufrimiento de mujeres que mueren asesinadas cada año, a razón de más de mil en una década en Francia, por compañeros enfermos de la necesidad de sentirse poderosos. Sufrimiento también de personas homosexuales que, en las zonas más tolerantes del planeta, salen a penas, si consideramos la historia, del estigma y hasta de los padecimientos físicos que se les han  podido imponer por ese motivo. Sufrimiento de transexuales que, incluso en las zonas más tolerantes del planeta, aún se encuentran a veces luchando contra la sensación de estar en desfase con su cuerpo o contra verdaderos sentimientos de culpa de estar “mal hechos”. Sufrimiento de intersexuales que sólo pueden nombrar su realidad desde hace relativamente poco(2). Y, sufrimiento otra vez, de mujeres que a diplomas y trabajos iguales reciben salarios menores que los de sus homólogos masculinos, que sufren más paro, que todavía están luchando para tener las mismas oportunidades profesionales que los hombres, que en algunas zonas del planeta sufren aún mutilaciones corporales, que en otras siguen luchando para tener una relación más harmoniosa con su cuerpo etc.

Por más que le disguste al Papa Francisco, y a pesar de las teorías queer, puesto que la gente con capacidad de escoger una sexualidad por “efecto de moda” es realmente poca, es del todo inverosímil que el conocimiento del género actúe como una suerte de diabólico spot publicitario y perjudique a su santo matrimonio que, todo hay que decirlo, no ha sido en realidad hasta el siglo XX -en las zonas más tolerantes del planeta- más que una transacción comercial entre familias, casi del todo desvinculada del amor y hasta del aprecio. Por el contrario, los estudios de género tienen el potencial de liberar, en última instancia, a toda la diversidad de la naturaleza que queda fuera del esquema binario del profundo sufrimiento que es aún a veces el suyo, proponiendo de paso soluciones a auténticas lacras, como los feminicidios o los suicidios vinculados a un motivo de género, y sentando bases para sociedades menos violentas.

Quizá sea bueno precisar, habida cuenta de la frecuencia de repetición de la expresión, que el género no es una teoría sino un instrumento de análisis. Es decir que elabora una serie de conceptos que permiten estudiar, analizar y pensar lo real para idear no ya una sino muchas teorías, que a veces se enfrentan entre ellas, que se verifican o no, que se desarrollan o no. Por más que le disguste a la Iglesia, que tanto le teme a la diversidad, es mucho lo que hay que ganar con divulgar los enfoques de género –y algunos de nosotros nos esforzamos por hacerlo- pues son necesarios para que nazcan sociedades más equilibradas, cuyos individuos estén más en harmonía consigo mismos, en las que las relaciones de poder tengan menos posibilidades de dar lugar a arbitrariedades o abusos de poder, que probablemente generen menos perversiones y en las cuales habría una mayor igualdad real de derechos entre individuos.

(1) Según un estudio realizado en 2012 por la OMS, la tasa de suicidios masculinos prácticamente duplicaba la de suicidios femeninos. La psiquiatra Anne Maria Möller-Leinkühler atribuía en parte la responsabilidad de esta situación a las normas tradicionales de la masculinidad.

(2) La esperanza de vida de las personas transexuales estaría limitada a 35 años según un estudio realizado sólo en países occidentales. Además de la elevada tasa de suicidios –un 41% habría hecho una tentativa- la tasa de homicidios es también elevada. La elevada tasa de suicidios que se da por otra parte en la comunidad transgénero podría derivar según estudios recientes del estigma social. Según un estudio publicado en The Lancest Psychiatry este verano, elaborado sobre un corpus de 250 personas en México y que será seguido de estudios similares en Brasil, Francia, India, Libano y Africa del Sur, el 76% de las personas que participaron del estudio sufrieron exclusión y rechazo social, incluso por parte de su familia, compañeros de clase y amigos.

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