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Billet de blog 21 février 2018

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Les nouveaux imaginaires du féminin

L’équipe de travail qui s’était réunie pour mettre en place le colloque « Nouveaux Imaginaires du Féminin » en septembre a eu l’occasion peu avant Noël d’en publier les actes, je reviens sur ce billet sur ce travail, que nous avons pu voir aboutir.

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Notre équipe a récemment eu l’occasion de publier les actes du colloque « Nouveaux Imaginaires du Féminin », fermant ainsi un cycle de presque deux ans de travail pour la plus grande satisfaction de toute l’équipe. De ce fait, j’ai eu envie d’y consacrer aujourd’hui ce billet.

Il s’agit en effet d’un colloque que nous célébrions avec un enthousiasme particulier de par les problématiques sociales qui le sous-tendent et l’importance qu’elles revêtent : les imaginaires sociaux ont une incidence sur de questions aussi décisives que la mise en place de violences ou les possibilités d’existence ou professionnelles que la société offre à chacun/e. Depuis différents horizons théoriques, la société peut se concevoir comme une construction de significations qui régulent notre rapport au monde, aux autres, ainsi que le lieu que nous occupons dans cette même société et le rôle qui nous incombe. Dans le cas des femmes, et dans des sociétés qui sont encore en évolution, au-delà des cadres législatifs, ces significations participent à définir leurs possibilités d’émancipation, ou de sujétion.

Comme il a été dit, l’un des aspects qui sous-tendent la problématique des imaginaires sociaux est celui des violences qui touchent spécifiquement les femmes : la façon dont on conçoit les femmes a un impact sur elles. C’est ce que reflète la Loi organique de mesures de protection intégrale contre les violences de genre édictée en Espagne en 2004, puisque son préambule précise : « Il s’agit d’une violence exercée à l’encontre des femmes du fait même d’être des femmes, parce qu’elles sont considérées par leurs agresseurs dépourvues des droits élémentaires que sont la liberté, le respect et la capacité de décision ». D’après l’analyse qui en est à l’origine, c’est la perception d’inégalité chez l’agresseur qui déclenche ces violences. Mais la sphère du couple ne constitue pas le seul espace où la représentation sociale des femmes joue un rôle dans la mise en place de violences : la dynamique est valable également pour les microviolences de la vie quotidienne, telles que les micromachismes ; pour les harcèlements et même pour les violences exercées dans le sein d’univers tels que l’univers prostitutionnel ou celui de l’industrie pornographique.

La question des représentations sociales concerne également les femmes elles-mêmes, déterminant les horizons de vie ou professionnels qu’elles s’autorisent à avoir. En ce sens, le nombre de publications porteuses de nouvelles perspectives sur le féminin, ainsi que les exemples d’expression individuelle, auxquelles internet et les réseaux sociaux ont permis de voir le jour au cours des dernières décennies, est révélateur. Le phénomène s’étend depuis les blogs personnels et/ou collectifs jusqu’aux publications de presse en ligne et participatives qui sont nées dans ce contexte.

Car en effet la représentation sociale n’est pas statique, bien qu’elle n’évolue pas non plus rapidement. Elle est protéiforme et elle évolue lentement mais constamment, sous l’influence tant des changements de la vie des individus entraînés par les évolutions technologiques ou politiques que par la prise de parole d’individus autonomes. Cornelius Castoriadis faisait ainsi allusion à l’aspect changeant et lentement évolutif des représentations sociales par la métaphore du magma, qui se transforme, progresse et recèle en son sein la possibilité de changement.

Les représentations sociales entretiennent un lien au pouvoir. En effet, les groupes de pouvoir des différentes sociétés jouent un rôle fondamental dans leur production, imprimant souvent leurs valeurs et leur vision du monde au reste de la société. De là que les changements qui se sont lentement produits en elles à propos du féminin aient été en grande partie déterminé par la lente progression qui depuis le XVIIIe siècle s’est effectué dans l’émancipation des femmes. En effet, les mouvements féministes émanant de la société civile y sont pour beaucoup, car ils ont interpellé le pouvoir de l’extérieur, induisant des évolutions dans les droits des femmes et participant dans le déplacement qui s’est opéré dans les significations sociales à leur propos. Si les mouvements organisés de femmes remontent à la révolution française, à échelle de l’humanité, l’évolution de leur statut implique tout de même un grand changement réalisé en un bref laps de temps.

De nos jours, les médias et les productions culturelles constituent l’un des principaux éléments permettant de fixer les représentations sociales. Le flux ininterrompu d’images que les annonces publicitaires, les fictions et même les journaux télévisés contribuent à créer revêt donc une importance fondamentale, de même que l’ensemble de représentations que, depuis les romans jusqu’aux jeux vidéo, la production culturelle contribue à asseoir.

Les activités comme la prostitution, dont la connexion avec l’industrie pornographique n’est plus à expliciter, participent également à dresser une représentation des femmes en objet, jouant de ce fait un rôle dans les violences comme dans les exclusions qui subsistent. Cette représentation sous-tend certaines des grandes questions de nos jours, tels que la prostitution ou la GPA. La prostitution constitue aujourd’hui en effet le troisième commerce le plus lucratif de la planète, après la vente d’armes et de drogues. Elle est également le destin qui échoit à 80% des victimes de traite dans le globe. Elle incite, comme il a été dit, à se représenter les femmes en objet d’appropriation et se situe au centre d’un univers spécialement violent pour ces dernières. Bien que la prostitution ait existé dans toutes les sociétés, les évolutions du néolibéralisme au cours des dernières décennies dessinent un clivage centre-périphérie valable aussi pour l’industrie du sexe, les femmes venant de pays en voies de développement ou se trouvant en situation de migration à la suite de guerres constituant la cible privilégiée de ces violences. Dans la mesure où la GPA implique comme la prostitution une marchandisation du corps, il est fort possible qu’elle poserait sous peu des problématiques du même ordre si le cadre légal venait à permettre à cette pratique de s’étendre dans les pays occidentaux.

Ces problématiques et bien d’autres président à l’avènement de prises de parole renouvelées dans lesquelles les femmes redéfinissent leur corps en dehors des diktats des canons de beauté, leur espace ainsi que leurs projets de vie, dans une gamme de nuances qui va de la dénonciation au ludique.

Répondant à nos attentes, le volume recueille une importante gamme de travaux qui permettent d’examiner dans une perspective interdisciplinaire un éventail de représentations qui concerne le domaine législatif, avec la comparaison de différents cadres législatifs européens pour ce qui est la violence de genre, l’examen des productions culturelles et des pratiques artistiques, ainsi que l’étude de la réception que la société a pu donner à certaines d’entre elles.

Son objectif est d’autant plus atteint qu’à la richesse scientifique est venue s’ajouter durant ces jours l’enthousiasme des participants, une atmosphère très vitale ainsi que l’inestimable apport de représentants de la société civile. Nous espérons que ces actes puissent maintenant servir au progrès des questions sociales qu’ils abordent.

Calderon, S. ; Marti, M. ; Salanouve, F. (coords) « Nouveaux Imaginaires du Féminin », dans « Nouveaux Imaginaires », 21 et 22 septembre 2017, université de Nice http://epi-revel.unice.fr/index.php/numero/NOUVEAUX_IMAGINAIRES

Calderon, S.  « Quels enjeux pour les Nouveaux Imaginaires du Féminin ? » paru dans « Nouveaux Imaginaires », « Nouveaux Imaginaires du Féminin », mis en ligne : 21 Septembre 2017, URL : 'http://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01665777/'

Los nuevos imaginarios de lo femenino

El equipo de trabajo que se había reunido para organizar el coloquio “Nuevos Imaginarios de lo Femenino” en septiembre ha tenido la ocasión poco antes de Navidad de publicar sus actas, considero brevemente en este artículo ese trabajo que hicimos.

Hemos tenido la ocasión de publicar recientemente las actas del coloquio “Nuevos Imaginarios de lo Femenino”, cerrando así un ciclo de casi dos años de trabajo para gran satisfacción de todo el equipo. En ese sentido, me apetece hoy dedicarle a ese tema el artículo del blog.

Se trata en efecto de un coloquio que teníamos especial entusiasmo en celebrar por lo crucial de las problemáticas sociales que en él subyacen y todo lo que en nosotros remueven : los imaginarios sociales inciden en asuntos tan decisivos como la puesta en marcha de violencias o la amplitud de las posibilidades de existencia o profesionales que se brinda a cada un@. Desde diferentes horizontes teóricos, la sociedad puede concebirse como constructo de significaciones que regulan nuestra relación al mundo, a los demás, así como el lugar que ocupamos y el papel que desempeñamos en la sociedad. En el caso de las mujeres, y en sociedades que aún están en evolución, más allá de los marcos legales, estas significaciones influyen en sus posibilidades de emancipación o, también, de sujeción.

Como ya se dijo, uno de los aspectos que subyacen en la problemática de los imaginarios sociales es el de la violencia que sufren específicamente las mujeres : la manera en que se las concibe tiene un impacto sobre ellas. Esto queda ya reflejado en la “Ley orgánica de medidas de protección integral contra la violencia de género” promulgada en España en 2004 que precisa en su preámbulo : “Se trata de una violencia que se dirige sobre las mujeres por el hecho mismo de serlo, por ser consideradas, por sus agresores, carentes de los derechos mínimos de libertad, respeto y capacidad de decisión ». Según el análisis sobre el que reposa, la propia percepción de la desigualdad por el agresor es el principal elemento que desencadena estas violencias. Pero el ámbito de la pareja no es el único en el cual la representación social de la mujer incide en que se pongan en marcha violencias : la dinámica es válida para microviolencias de la vida cotidiana, como los micromachismos ; para los acosos e incluso para las violencias ejercidas en el marco de universos como el universo prostitucional y el de la industria pornográfica.

La cuestión de las representaciones sociales concierne también a las propias mujeres, incidiendo en los horizontes de vida o profesionales que se autorizaran a tener. En este sentido, es revelador el número de publicaciones portadoras de nuevos enfoques, así como de ejemplos de expresión individual que, gracias a la oportunidad que ofrecen internet y las redes sociales, han surgido en las ultimas décadas. El fenómeno se extiende desde los blogs personales y/o colectivos hasta las publicaciones de prensa on line y participativas que han surgido en este marco.

Y es que en efecto, la representación social no es algo inmóvil, aunque tampoco algo rápidamente cambiante. Es algo proteiforme, que evoluciona lenta pero constantemente, bajo el influjo tanto de los cambios en la vida de los individuos que han podido conllevar las evoluciones tecnológicas o políticas como el de la propia toma de palabra y expresión de individuos autónomos. Cornelius Castoriadis aludía a este aspecto cambiante y lentamente evolutivo de las representaciones sociales con la metáfora del magma, que cambia, progresa, y contiene en su propio seno la posibilidad del cambio.

Las representaciones sociales tienen una estrecha vinculación con el poder. En efecto, son los grupos de poder de las distintas sociedades los que mayoritariamente generan a la larga las representaciones sociales que tienen curso en ellas, los que imprimen al resto de la sociedad sus valores y su visión del mundo. De ahí que el cambio que se ha producido en ellas a propósito de lo femenino haya venido en buena medida determinado por la lenta progresión que se efectúa desde el siglo XVIII en la emancipación de las mujeres. En efecto, son en gran parte los movimientos feministas emanados desde la sociedad civil los que han interpelado al poder del exterior, induciendo evoluciones en los derechos de las mujeres y participando en el desplazamiento operado en las significaciones sociales que respectan a las mujeres. Si bien los movimientos organizados de mujeres se remontan a la revolución francesa, a escala de la historia de la humanidad, esto no deja de ser un gran cambio en un breve lapso de tiempo.

En nuestros días, los medios de comunicación y las producciones culturales en general constituyen uno de los principales canales que participan en fijar las representaciones. Tiene por tanto gran importancia ese flujo ininterrumpido de imágenes que los anuncios publicitarios, las ficciones televisivas y hasta los informativos contribuyen a crear, así como el conjunto de representaciones que, desde las novelas hasta los videojuegos, fija la industria cultural.

Asimismo, actividades como la prostitución, cuya intima conexión con la industria pornográfica ya no está por demostrar, son vectores con una importancia de primer orden para fijar una representación de las mujeres en objeto que incide tanto en las violencias como en las exclusiones que aún subsisten. Dicha representación subyace a grandes cuestiones de sociedad de nuestros días, como son la prostitución o la gestación subrogada. La prostitución constituye en efecto hoy el tercer negocio más lucrativo del mundo, después de la venta de armas y de drogas, y es el destino del 80% de las victimas de trata de personas en el mundo. Alienta como se dijo a enfocar a las mujeres como objeto de apropiación y se sitúa en el centro de todo un universo especialmente violento para las mujeres. Si bien la prostitución ha existido en todas las sociedades, las evoluciones del neoliberalismo en las últimas décadas hacen que un corte centro-periferia se dibuje también en la industria del sexo, siendo las mujeres que residen en países en vías de desarrollo o viven una condición de migrantes de las guerras los blancos privilegiados de estas violencias. En la medida en que la gestación subrogada supone como la prostitución una mercantilización del cuerpo, es muy posible que plantee en un breve lapso de tiempo problemáticas similares, si el marco legal permitiera que esta práctica se generalizara en países occidentales.

Estas y otras problemáticas presiden al surgimiento de nuevas expresiones en las que las mujeres redefinen su cuerpo al margen de los criterios imperantes de belleza, su espacio y sus expectativas vitales en matices que van de lo denunciatorio a lo lúdico.

Cubriendo nuestras expectativas, el volumen recoge una amplia gama de trabajos que permiten examinar desde un enfoque interdisciplinar todo un abanico de representaciones : abarca desde el ámbito legislativo, con la comparación de varios marcos legales de países europeos en el ámbito de la violencia de género, hasta el examen de producciones culturales y prácticas artísticas, así como el estudio de la recepción social que se ha podido dar a algunas de ellas.

Su objetivo está tanto más logrado que al enriquecimiento científico, se añadió en esos días el entusiasmo de los participantes, un ambiente entrañable y el inestimable aporte de representantes de la sociedad civil. Esperamos que sus actas puedan ahora servir al progreso de estas cuestiones sociales.

Calderon, S. ; Marti, M. ; Salanouve, F. (coords) « Nouveaux Imaginaires du Féminin », dans « Nouveaux Imaginaires », 21 et 22 septembre 2017, université de Nice http://epi-revel.unice.fr/index.php/numero/NOUVEAUX_IMAGINAIRES

Sara Calderon, "¿Qué retos para los nuevos imaginarios de lo femenino?", paru dans "Nouveaux Imaginaires", Nouveaux Imaginaires du Féminin, mis en ligne : 21 Septembre 2017, URL : 'http://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01665778/'

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