De nombreuses nouvelles conceptualisations politiques ont éclairé ces dernières années de perspectives nouvelles notre réalité. Elles émanent de mouvements contestataires et altermondialistes répondant dans le pragmatisme à des crises conjoncturelles du capitalisme ou encore d’oppressions anciennes qui n’avaient pas trouvé à s’exprimer dans le discours politique. On peut penser aux théories concernant le commun, aux mouvements municipalistes, à l’écologie ou à l’indigénisme politique latinoaméricain ; on peut penser au plus grand accès à la scène politique institutionnelle de la pensée féministe ou à l’expression explicite et autoconsciente de la pensée coloniale, qui commence aussi à informer parfois les initiatives politiques des pays émergeants.
Les perspectives ici développées prétendent enrichir cette diversité, car elles pensent et analysent le social depuis la perspective de l’objet de violence structurelle normalisée, afin de produire une nouvelle grille d’analyse du cheminement humain, puis un projet politique entier et une chronologie permettant de penser les évolutions historiques de ces violences.
Outre une introduction inédite, le volume recueille deux essais et un article. Le symbolique est politique. Quel projet politique pour contrer les politiques interrelationnelles structurelles ? (2017) est structuré en deux parties, dont la première analyse les mouvements et les dynamiques de violences structurelles que l’on retrouve dans nos sociétés et la deuxième confronte les conclusions ainsi obtenues aux possibilités de remédiation qu’offrent les notions du care ; du commun ; du commun tel qu’issu de l’action de la « multitude » pensée par Toni Negri ; de la vulnérabilité capacitante de Judith Butler. Il apparaît clairement que les conceptions émanant de la pensée féministe et du genre possèdent une plus grande performance pour ce propos.
Les savoirs de la violence structurelle relationnelle : pour une non-violence politique (2019) constitue un projet politique complet destiné à désactiver les violences sociales de nature structurelle. Il tient compte des conclusions extraites dans l’essai précédent et commence par proposer une grille d’analyse des sociétés en synchronie. Elle comprend trois grands principes régisseurs des violences structurelles : la subordination, la normalisation, l’appartenance. Puis, l’essai aborde ce projet complet, qui pose d’abord une politique de l’être, envisagée sur le plan ontologique, sur le plan relationnel et sur celui du vécu sexuel. Il propose par la suite des organisations alternatives pour l’économie, les cadres de vie, la géopolitique. Le projet politique ainsi formulé s’attache à mettre l’humain au centre de l’organisation du social, à proposer une définition élargie de la notion d’humain et à construire les identités sociales non pas les unes par rapport aux autres, mais en les faisant reposer sur le cheminement vital de chaque individu.
Pour une ébauche de périodisation des violences structurelles (2021) se propose d’amorcer une périodisation des violences qui au long de l’histoire ont structuré les différentes sociétés. Dans ce but, le texte amorce l’étude des infléchissements qu’ont subis les principes structurants auxquels sont adossées les violences systémiques. Il constate ainsi la systématisation par les monothéismes des binarismes comme principes d’organisation du social, puis l’immédiat nuancement de ces principes dans les sociétés classiques et celles du Moyen Age. L’émergence du capitalisme renforce dans la pratique le binarisme, car ce système ne peut fonctionner sans le travail gratuit et invisible des femmes et du sujet colonial : rendre cela possible suppose d’approfondir le système de domination de sexe et mettre en place le système de domination coloniale. La production des Lumières, ou plutôt ce que l’histoire en a majoritairement voulu retenir, vient justifier en synchronie et à postériori sur le plan ontologique ce renforcement déjà opéré dans la pratique. Finalement, les mouvements sociaux qui se produisent au XXème siècle, mais en germe dès le début du capitalisme, opèrent une disgrégation encore à parfaire de ce binarisme.
Les conceptions recueillies dans ce volume sont susceptibles d’endiguer de nombreux maux qui aujourd’hui déchirent la société. Rappelons en effet que les violences sur les femmes, les actes racistes ou les actes homophobes sont des violences structurelles et qu’ils ont encore un grand impact dans le social. En France, 198 personnes sont décédées en 2019 en raison de la violence dans le couple, dont 146 femmes, 27 hommes et 25 enfants. Entre 2011 et 2018, 135.000 femmes et 41.000 hommes en moyenne tous les ans ont subi des violences sexuelles hors ménage et 34.000 femmes ont été victimes de viol, ainsi que 14.000 hommes, entre autres violences sexistes.
Pour ce qui est des actes racistes, en 2019 5.730 cas de crimes et délits à caractère raciste ont été comptabilisés. 1590 victimes de crimes et de délits anti LGBT+ ont été comptabilisés en 2020. 55% des personnes lgbt+ ont déjà été confrontées une fois au cours de leur vie à une agression, plus d’une personne sur 5 à de la violence physique due à son orientation sexuelle.
Le harcèlement est en passe de devenir un problème de santé publique. Plus de 5% des élèves en ont ainsi été victimes. Les nouvelles technologies offrent par ailleurs de nouvelles possibilités aux dynamiques de harcèlement, les filles en particulier étant parfois victimes de la diffusion de vidéos, photos et rumeurs humiliantes sur Internet. Pour ce qui est du monde du travail, 30% des salariés disent avoir subi un harcèlement qui peut prendre des formes diverses.
Les nombreuses violences structurelles qui sous-tendent notre monde sont nombreuses. Elles permettent aux différents systèmes de domination qui en sont responsables de perdurer. Lorsqu’elles excèdent la dose normalisée aux fins de la subordination, elles sont responsables de beaucoup de morts et constituent un problème de santé publique. Des phénomènes comme le harcèlement, qui n’intègrent pas à proprement parler un système de domination, mais suivent souvent les clivages installés par eux, se verraient également enrayés par une théorie politique formulée depuis l’angle d’application précis des violences systémiques. Une étude sociale et une théorie politique formulées depuis cet angle visent ainsi à éliminer ces violences et la subordination qu’elles alimentent, entre autres par l’infléchissement des significations sociales qui ont permis de les poser.
Sara Calderon, Pour une non-violence politique. Réflexions autour des violences structurelles relationnelle, Editions Verone, https://www.librairiecharlemagne.com/livre/20477349-pour-une-non-violence-politique-sara-calderon-verone-editions

Gustav Moreau, Le Victorieux Sphinx (détail), 1886.
Para una no-violencia política. Reflexiones en torno a la violencia estructural relacional
Un bello proyecto que deseo compartir llega a buen puerto en estos días: se publica en formato papel y en un solo volumen la versión actualizada de todos mis escritos a propósito de las violencias sociales estructurales de los sistemas de dominación, las violencias subordinantes. Los acompaña una introducción inédita.
Numerosas nuevas conceptualizaciones políticas han arrojado en estos últimos años nuevos enfoques sobre nuestra realidad. Emanan de los movimientos contestatarios y altermundialistas que responden en el pragmatismo a crisis coyunturales del capitalismo o también a opresiones antiguas que no habían logrado expresarse en el discurso político. Puede un@ pensar en las teorías a propósito de lo común, en los movimientos municipalistas, en la ecología o en el indigenismo político latinoamericano ; puede un@ pensar en el mayor acceso a la escena política institucional del pensamiento feminista o en la expresión explícita y autoconsciente del pensamiento colonial, que también empieza a informar iniciativas políticas de países emergentes.
Las perspectivas aquí desarrolladas pretenden enriquecer esta diversidad, pues piensan y analizan lo social desde la perspectiva del objeto de violencia estructural normalizada, con el fin de producir un nuevo cuadro de análisis del transitar humano, un proyecto político entero y una cronología que permita pensar las evoluciones históricas de esas violencias.
Además de una introducción inédita, el volumen comprende dos ensayos y un artículo. Lo simbólico es político. ¿Qué proyecto político para terminar con las violencias interrelacionales estructurales? (2017) está estructurado en dos partes, de las cuales la primera analiza los movimientos y las dinámicas de las violencias estructurales que se pueden encontrar en nuestras sociedad y la segunda confronta las conclusiones así obtenidas con las posibilidades de remediación que ofrecen las nociones de care ; del común ; del común tal como emerge de la acción de la “multitud” pensada por Toni Negri ; de la vulnerabilidad capacitante de Judith Butler. Aparece claramente que las concepciones que emanan del pensamiento feminista y del género poseen mayor alcance de remediación.
Los saberes de la violencia estructural relacional: para una no-violencia política (2019) constituye un proyecto político completo destinado a desactivar las violencias sociales de naturaleza estructural. Parte de las conclusiones extraídas en el ensayo precedente y comienza por proponer un cuadro de análisis en sincronía de las sociedades que comprende tres grandes principios rectores de las violencias estructurales: la subordinación, la normalización, la pertenencia. El ensayo contiene después un proyecto completo que plantea en primer lugar una política del ser, contemplada en el plano ontológico, en el plano relacional y en el plano de la vivencia sexual. Propone a continuación organizaciones alternativas para la economía, los marcos de vida, la geopolítica. El proyecto político así formulado sitúa lo humano en el centro de la organización social, propone una definición ampliada de la noción de humano y construye las identidades sociales no unas con relación a otras, sino haciendo que descansen sobre el camino vital de cada individuo.
Para un esbozo de periodización de las violencias estructurales (2021) se propone iniciar una periodización de las violencias que a lo largo de la historia han estructurado las distintas sociedades. Con ese propósito, el texto inicia el estudio de las inflexiones que han sufrido los principios estructurantes a los que se adhieren las violencias sistémicas. Constata así la sistematización por los monoteísmos de los binarismos como principios organizadores de lo social, y el inmediato matiz de estos principios en las sociedades clásicas y de la Edad Media. La emergencia del capitalismo refuerza en la práctica el binarismo, pues este sistema no puede funcionar sin el trabajo gratuito e invisible de las mujeres y del sujeto colonial: volver eso posible supone profundizar el sistema de dominación de sexo y poner en marcha el sistema de dominación colonial. La producción de la Ilustración, o más bien lo que la historia ha querido retener de ella, viene a justificar en sincronía y a posteriori en el plano ontológico el refuerzo ya efectuado en la práctica de los binarismos. Finalmente, los movimientos sociales que se producen en el siglo XX, pero que se encuentran en germen desde el inicio del capitalismo, operan una disgregación que todavía por perfeccionar de ese binarismo.
Las concepciones recogidas en este volumen son susceptibles de terminar con numerosos males que hoy desgarran la sociedad. Recordemos en efecto que las violencias sobre las mujeres, los actos racistas o los actos homófobos son violencias estructurales y que todavía tienen gran impacto en lo social. En Francia, 198 personas murieron en 2019 a causa de violencias en el seno de la pareja, de las cuales 146 mujeres, 27 hombres y 25 niños. Entre 2011 y 2018, 135.000 mujeres y 41.000 hombres de media cada año sufren violencias sexuales fuera del hogar y 34.000 mujeres han sido víctimas de violación, así como 14.000 hombres, entre otras violencias sexistas.
En lo que respecta a los actos racistas, en 2019 se contabilizaron 5.730 casos de crímenes y delitos de carácter racista. En 2020 también se contabilizaron 1590 víctimas de crímenes anti LGBT+. El 55% de las personas lgbt+ ya se han visto confrontadas una vez en su vida a una agresión, más de una persona de 5 a violencia física debida a su orientación sexual.
El acoso está por convertirse en un problema de salud pública. Más del 5% de los alumnos han sufrido uno. Las nuevas tecnologías ofrecen además nuevas posibilidades a las dinámicas de acoso, las chicas en particular son a veces víctimas de la difusión de videos, fotos y rumores humillantes por Internet. En el mundo laboral, el 30% de los asalariados dice haber sufrido un acoso que puede tomar distintas formas.
Las violencias estructurales que subyacen en nuestro mundo son numerosas. Permite que perduren los diferentes sistemas de dominación responsables de ellas. Cuando exceden la dosis normalizada con fines de subordinación, engendran muchas muertes y constituyen un problema de salud pública. Fenómenos como el acoso, que no integran realmente un sistema de dominación, pero que siguen las particiones instaladas por ellos, también se verían disminuidos por una teoría política formulada desde el ángulo de aplicación preciso de las violencias sistémicas. Un estudio social y una teoría política formulados desde este ángulo tratan por tanto de eliminar las violencias y la subordinación que alimentan, entre otras cosas con la inflexión de los significados sociales que han permitido instalarlas.
Sara Calderon, Pour une non-violence politique. Réflexions autour des violences structurelles relationnelle, Editions Verone, https://www.librairiecharlemagne.com/livre/20477349-pour-une-non-violence-politique-sara-calderon-verone-editions