Je n’avais pas l’intention de m’exprimer à propos de la Catalogne, mais je me dis finalement que c’est peut-être la seule chose à faire lorsqu’on est spectateur/spectatrice de cette moderne tragédie grecque, pour évacuer les sentiments d’impuissance et d’absurdité qui touchent encore beaucoup d’Espagnols.
La tension est montée entre Barcelone et Madrid tout au long de la dernière décennie jusqu’à atteindre les extrêmes de rupture démocratique qu’on a pu constater ces derniers temps, avec des épisodes si hautement symboliques, compte tenu du contexte que fournit l’histoire de l’Espagne, que celui d’intervenir dans le fonctionnement administratif de l’autonomie en réquisitionnant le corps entier des forces policières autonomiques, les Mossos d’esquadra, pour les mettre sous le commandement des forces nationales ou celui de l’arrestation et mise en interrogatoire d’élus de la communauté autonome et d’élus municipaux instigateurs du referendum. Les témoins de ce drame ne savent pas toujours à quel moment a été franchi le « point de non retour », et n’ont pas envie non plus de se plonger dans un énième décompte de griefs, car il y en a sans doute eu dans les deux camps, comme cela est le cas dans tout conflit. Nous regrettons cependant au moins deux choses, qui constituent l’évidente toile de fond de cette déchirure qui aurait bien pu ne pas être et que nous observons aujourd’hui évoluer avec douleur.
La première est la question de la mémoire historique, qui n’a jamais été résolue. En effet, comme dans beaucoup d’autres endroits, la transition politique espagnole s’est faite après la dictature à partir de 1975, sans qu’il soit demandé aux dirigeants de fournir des responsabilités politiques, malgré le fait que la répression, exercée à l’encontre des dissidents, ait sévit jusqu’aux derniers jours de ce régime. Si déjà quelques années avant on destinait des fonds à cet usage, c’est en 2007, sous le gouvernement de José Luis Rodríguez Zapatero, qu’est engagée une tentative plus affirmée de rétablir une situation nationale plus apaisée, avec l’approbation d’une Loi de Mémoire Historique destinée à la reconnaissance officielle d’une répression qui a existé. Cependant, l’arrivée du Parti Populaire au gouvernement provoque la diminution de l’attribution de fonds, qui en 2013 disparaissent complètement, alors que dans le même temps, on ignore impunément les occurrences et les permanences de symboles et nomenclatures franquistes. Cette situation est d’autant plus douloureuse pour les Espagnols qui souhaitent une reconnaissance officielle de cette histoire, pour en finir avec l’injure historique qu’elle constitue que, dans le même temps, il a été en revanche possible de destiner des fonds à la restauration du Valle de los Caídos, le lieu où se trouve la tombe et la dépouille du général Francisco Franco. La question du devenir de ce symbole du franquisme, dans la construction duquel de nombreux prisonniers politiques, soumis aux travaux forcés, ont même trouvé la mort, n’est toujours pas résolue pour qu’on puisse au minimum le dépouiller de sa charge symbolique. En parallèle, le manque de fonds pour localiser et exhumer des fosses communes e identifier les corps qui s’y trouvent a atteint de tels extrêmes que les associations et personnes qui se consacrent à cette tâche ont dû solliciter des fonds privés, ce qui donne parfois lieu à des situations qui peuvent même être perçues comme humiliantes. Ainsi, des syndicats étrangers, comme le syndicat norvégien Elogit, se trouvent aujourd’hui à financer la restitution des corps et de la mémoire d’individus qui, outre leur condition d’êtres humains, sont aussi des citoyens espagnols.
La question de la mémoire sous-tend tellement le conflit catalan que des épisodes qui en témoignent sans équivoque se produisent encore dans ce sillage. Ainsi, le 24 septembre des élus favorables à ce que le referendum du 1 octobre ait lieu, partisans parfois de solutions intermédiaires comme peut l’être le passage à une administration fédérale, se sont retrouvés encerclés par une foule de plus de 500 manifestants néofranquistes dans le bâtiment où ils se trouvaient réunis à Saragosse pour un acte de soutien à une solution démocratique et politique du conflit. L’absence de disponibilité chez les forces de police, dont d’importants effectifs avaient apparemment été déplacés vers la Catalogne, a fait que la situation se prolonge durant cinq heures. Il va de soi que les termes employés par ces secteurs, tant au cours de cet épisode que dans les occurrences où ils se sont exprimés dans les médias, est en lien direct avec la rhétorique employée par le franquisme, avec l’allusion réitérée à l’unité de l’Espagne. Comme si l’unité ne pouvait pas être plurielle, comme si certains des pays de la planète dont l’identité nationale est le plus affirmée, tels que les Etats-Unis ou l’Allemagne, n’étaient pas pluriels. Le substrat du vocabulaire employé est évident.
La deuxième chose que certains spectateurs regrettent, tandis qu’ils consultent la presse chaque matin, la gorge serrée, en se demandant ce qui viendra « ensuite », est l’usage politique qui a été donné à la communauté catalane depuis la fameuse Loi d’Autonomie de 2006. En effet, en 2006, le gouvernement catalan présente une Loi d’Autonomie qui, si elle renouvelle de beaucoup la précédente, n’est pas fondamentalement éloignée, selon les spécialistes du droit, de celle de l’Andalousie, par exemple, et présente la particularité d’affirmer le concept de « nation catalane ». Dans la mesure où, que cela plaise ou non, le mot nation possède également une acception culturelle et la Constitution espagnole désigne d’ailleurs la réalité politique espagnole en employant le terme « nationalités », ce qui a suivi semble clairement excessif. La plainte pour inconstitutionnalité présentée par le PP contre cette loi a débouché sur la sentence bien connue du Tribunal Constitutionnel en 2010, qui confirme l’inconstitutionnalité de plusieurs articles, et sur l’évolution dans les faits de la région catalane depuis avec une Loi qu’elle n’a pas validée. L’allusion à la Catalogne en lieu et place de l’ennemi a été par ailleurs récurrente dans les discours politiques depuis 2006, revenant à chaque campagne électorale chez les orateurs du Partido Popular de Mariano Rajoy. Dans le cadre de la montée de ton de cette confrontation, on n’a pas hésité non plus à avoir recours à un symbolisme grossier, comme le refus de participer à une discussion sur la possibilité d’obtenir un système fiscal proche de celui des Basques, ou bien la mise sous tutelle des forces de police de la communauté autonome. Nul besoin de lire Freud pour constater l’évidente charge symbolique phallique dont sont investis dans notre monde les finances et les forces de l’ordre, surtout quand on les refuse aux uns et on les concède aux autres. L’attitude révèle donc la volonté évidente d’humiliation publique avec laquelle l’actuel gouvernement a géré et gère la question catalane.
Sans se plonger dans un décompte des griefs, car, comme il a été dit, chacun peut en constater dans les deux camps, les témoins de ce qui peut être perçu à ce stade comme une moderne tragédie grecque peuvent regretter qu’en plein XXI siècle il ne soit pas possible de freiner le conflit par un autre biais que le recours à la force. Ils regrettent également que les blessures déjà anciennes ne reçoivent pas enfin le soin cicatrisant nécessaire et semblent au contraire être destinées à structurer la vie politique du pays, en se rouvrant à chaque crise. Ils se disent, angoissés, que la spirale de la vengeance ne se brise jamais à moins que les deux camps ne le souhaitent, car on ne peut pas demander en toute décence morale à un camp de supporter les exaction de l’autre jusqu’à ce que sa furie se calme. Perplexes, ils se disent aussi, à propos de nationalismes, que si une organisation comme le capitalisme peut être transnationale, peut-être que d’autres valeurs plus évidemment universelles devraient l’être également.
El conflicto en torno al referendum catalán, de antiguas heridas que se abren
Aquí dejo lo que a mí me han inspirado la reciente actualidad catalana y española….
No tenía intención de escribir sobre Cataluña, pero finalmente me digo que quizá sea la única cosa que se pueda hacer en tanto que espectador/a de esta moderna tragedia griega para evacuar ese sentimiento de impotencia y absurdo que aqueja todavía a más de un español.
La tensión ha ido subiendo entre Barcelona y Madrid a lo largo de la última década, hasta alcanzar los extremos de ruptura democrática que le hemos conocido en los últimos días, con un gesto tan altamente simbólico en el contexto que es el de la historia española como es el de intervenir la autonomía poniendo el cuerpo entero de las fuerzas policiales autonómicas, los Mossos d’escuadra, a la orden de las fuerzas nacionales o con el interrogatorio y detención de cargos públicos autonómicos y municipales promotores del referéndum. Los que asistimos atónitos al drama no sabemos siempre en qué momento se cruzó el “punto de no retorno”, y tampoco tenemos ganas de sumirnos en un enésimo recuento de agravios, que quizá haya habido en ambos campos, como suele suceder en caso conflicto. Lamentamos no obstante al menos dos cosas, evidente telón de fondo de este desgarro que quizá bien habría podido no ser y que hoy presenciamos con una punzada de dolor.
La primera de ellas es la cuestión nunca solventada de la memoria histórica. En efecto, como en muchos otros sitios, la transición política española se hizo tras la dictadura a partir de 1975 sin que les fueran pedidas responsabilidades a los dirigentes, aún cuando la represión se ejerció sobre los disidentes hasta los últimos días de ese régimen. Si bien desde algunos años antes se destinaban fondos a ese efecto, es en 2007, bajo el gobierno de José Luis Rodríguez Zapatero, cuando se hace un intento más afirmado por restablecer una situación nacional más apaciguada con la aprobación de una Ley de Memoria Histórica destinada al reconocimiento oficial de la represión que existió. Sin embargo la llegada del Partido Popular al gobierno provoca que disminuya la atribución de fondos, desaparezca ésta prácticamente desde 2013 y se ignoren cómodamente las ocurrencias de pervivencia de simbología franquista. Esto es tanto más doloroso para la España que desea un reconocimiento oficial de esa historia y un desagravio por cuanto que sí se han podido destinar fondos a restaurar el Valle de los Caídos, lugar donde se encuentra la tumba del general Francisco Franco, y sigue sin solventarse la cuestión de qué hacer con ese símbolo, en cuyos trabajos de construcción murieron presos políticos, para como mínimo despojarlo de su carga simbólica. La falta de fondos para localizar fosas comunes, abrirlas e identificar los cuerpos ha llegado de hecho hasta tal punto, que las personas y asociaciones que prosiguen en este empeño han debido recurrir fundamentalmente a fondos privados, dándose incluso situaciones que pueden hasta percibirse como humillantes, con el hecho de que sindicatos extranjeros, como el sindicato noruego Elogit, financien la restitución de los cuerpos y la memoria de lo que de hecho son, además de seres humanos, ciudadanos españoles.
La cuestión de la memoria sigue subyaciendo tanto en el conflicto catalán que incluso hay episodios de la actualidad que lo dicen sin ambages. Así cuando el 24 de septiembre se reunieron en Zaragoza cargos públicos favorables a que tenga lugar el referendum del 1 de octubre, partidarios en algunos sectores de soluciones intermedias como puede ser el paso a una administración federal, el edificio en que en que celebraban el acto para expresarse en el sentido de una solución política y democrática se vio rodeado por una turba de 500 manifestantes neofranquistas. La aparente ausencia de disponibilidad policial, por el traslado de fuerzas a Cataluña, hizo que la situación se prolongara durante cinco horas. Huelga decir que la terminología adoptada por estos sectores, tanto en ese episodio como en las expresiones que han podido tener en los medios, reanuda directamente con la instaurada por el régimen de Franco, con la reiterada alusión a la unidad de España. Como si la unidad no pudiera ser plural, como si algunos de los países con identidad nacional más afirmada del planeta, como Estados Unidos o Alemania, no fueran plurales. El sustrato del vocabulario empleado es evidente.
La segunda cosa que lamentamos mientras consultamos cada mañana la prensa con un nudo en la garganta, preguntándonos qué será “lo siguiente”, es el uso político que se le ha dado a la comunidad catalana desde el famoso Estatuto de 2006. En efecto, en 2006 el gobierno catalán presenta un Estatuto de autonomía que, si bien renueva con mucho el anterior, no dista fundamentalmente según los legistas del de Andalucía, por ejemplo, y tiene la particularidad de afirmar el concepto de “nación catalana”. En la medida en que, guste o no, la palabra nación tiene también una acepción cultural y de hecho la Constitución española contiene el término “nacionalidades” para aludir a la realidad de España, parece claramente excesivo lo que siguió. El recurso de inconstitucionalidad que el PP presentó contra ese estatuto desembocó en la ya conocida sentencia de 2010 del Tribunal Constitucional, que confirma la inconstitucionalidad de varios artículos, y en la realidad de que, de hecho, la autonomía catalana evoluciona desde entonces con un Estatuto que no ha aprobado. La alusión a la región catalana como enemigo ha sido recurrente por lo demás en los discursos políticos desde 2006, volviendo en cada campaña electoral. La escalada del enfrentamiento no ha escatimado tampoco en simbolismos de trazo gordo, como lo son el que se haya negado siquiera la discusión a propósito de obtener un sistema de financiación próximo del que tienen los vascos, o la reciente confiscación del cuerpo entero de policía autonómica. No hace falta haber leído a Freud para admitir la evidente carga simbólica fálica que tienen en nuestro mundo las finanzas y las fuerzas del orden, sobre todo cuando sí se le conceden a los demás, y por tanto la evidente voluntad de humillación pública con la que el gobierno actual ha gestionado y gestiona la cuestión catalana.
Sin incurrir en un recuento de agravios, que como se dijo todos constatamos que ha habido en los dos campos, los observadores de lo que a estas alturas percibimos como moderna tragedia griega, lamentamos que en pleno siglo XXI no se pueda frenar de otra forma que por la fuerza bruta el conflicto. Lamentamos también que las heridas antiguas no reciban al fin el conveniente cuidado cicatrizante y parezcan estar abocadas a estructurar la vida política del país, abriéndose una y otra vez con cada crisis. Pensamos con angustia que la espiral de la venganza nunca se rompe salvo que ambos campos así lo decidan, porque no se le puede pedir en toda decencia moral a un campo que soporte las exacciones del otro hasta que se calme su furia. Nos decimos finalmente con perplejidad, a propósito de nacionalismos, que si cosas como el capitalismo son transnacionales, quizá otros valores más evidentemente universales también deberían serlo.