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Billet de blog 20 mai 2013

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Constitution, "races" humaines et souvenir du colonialisme (I)

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Notre article sur le blog La Science au XXI siècle « Constitution et "races" humaines (III) » souligne qu'à l'occasion de la suppression du mot « race » de nos textes législatifs des textes, il serait logique de rappeler l'histoire du colonialisme et, tout particulièrement, de la « grande expansion coloniale » de la fin du XIX siècle. Or les politiques se montrent plutôt discrets à ce sujet. On ne peut que regretter cette attitude, car précisément le racisme prétendument scientifique fut très largement utilisé pour justifier l'expansion coloniale lancée par Léon Gambetta et Jules Ferry dans les années 1880. A cette époque, d'ailleurs, l'expansion coloniale était vue comme une préparation de la « revanche » et la perspective d'une nouvelle guerre était déjà évoquée. L'Europe en paya lourdement la facture trois décennies plus tard, avec une guerre qui fut directement provoquée par les rivalités coloniales. Non seulement soldats et populations subirent un massacre sans précédent (jusqu'à l'émploi d'armes chimiques), mais la guerre de 1914-18 déclencha une importante émigration de capitaux vers les Etats-Unis et mit fin à l'hégémonie européenne à l'échelle planétaire. La révolution soviétique fut une réaction logique contre les souffrances endurées par les populations de l'Empire du Tsar pendant la guerre. La facture du racisme colonial a donc été d'une grande sévérité pour les puissances de l'Europe occidentale de l'époque. Pourquoi ne pas rappeler clairement aux citoyens ces réalités historiques ?  Et à quand l'éffacement du mot « race » de la Constitution, comme promis par François Hollande pendant sa campagne électorale ?  

Notre article du 19 mai « Constitution et "races" humaines (III) » ( http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2013/05/19/constitution-et-races-humaines-iii.html ) commence par ce résumé :

Le 19 mai 2013, Atlantico publie un point de vue dans la rubrique Pensée unique, avec le titre « Suppression du mot race de la législation française : abolissons donc tous les mots qui pourraient laisser supposer que des différences existent ». On tombe assis devant une telle argumentation. Pourquoi la légistation française devrait-elle entériner un concept inutile sur le plan citoyen, qui ne repose sur aucune preuve scientifique et dont le caractère infondé est de plus en plus largement reconnu ? De son côté, Le Monde publie dans sa rubrique Idées un article intitulé « Sexes et races, deux réalités ». Quel rapport entre les deux concepts ? Pourtant, cette fois-ci les auteurs vont même jusqu'à évoquer l'affaire Lyssenko. Pourquoi la suppression du mot « race » des textes de loi dérange-t-elle à ce point, alors qu'aucune preuve de l'existence de « races humaines » n'existe ? La proposition de loi sur la « suppression du mot "race" de notre législation » a été adoptée cette semaine en première lecture par l'Assemblée Nationale avec un large consensus sur le fond. Mais qu’en est-il de la suppression du mot « race » de la Constitution, comme promis il y a plus d’un an par François Hollande et évoqué dans nos articles « Constitution et "races" humaines » (I) et (II) ? Le 19 mai également, L'Echo Républicain souligne à son tour « Resistance: hommage d'Ayrault et Daniel Cordier à l'héritage social du CNR ». Une excellente évocation historique. Mais dans la même logique, pourquoi ne pas évoquer aussi l'histoire du colonialisme en rapport avec le racisme ? La disparition du mot « race » de nos textes législatifs devrait en fournir une excellente occasion. Pourtant, on n'entend guère le monde politique rappeler la « grande expansion coloniale » et ses conséquences historiques désastreuses. Pourquoi un tel silence ?

(fin du résumé)

L'article analyse ensuite le matériel parlementaire récent et relève la timidité avec laquelle la période de la « grande expansion coloniale » et ses conséquences sont évoquées.

Rappelons pourtant quelques extraits du discours de Jules Ferry du 28 juillet 1885 devant la Chambre des Députés sur l'expansion coloniale française de cette période dont il avait été à l'origine avec Léon Gambetta ( http://scientia.blog.lemonde.fr/2009/12/12/le-discours-de-jules-ferry-du-28-juillet-1885-i/ ) :

(...)

M. Jules Ferry - Voilà le programme de notre politique coloniale, et, ainsi conçue, c'est, en effet, une vue de politique systématique et qui, comme le disait l'honorable M. Pelletan dans son discours de samedi dernier, repose tout à la fois sur des principes économiques et sur dés intérêts, sur des conceptions humanitaires de l'ordre le plus élevé, et sur des considérations politiques...

(...)

M. Jules Ferry - Assurément! Je réponds à mes deux collègues qui siègent de ce côté, je ne crois pas m'être écarté et je n'ai pas l'intention de m'écarter un seul instant de la question. Je dis, avec l'honorable M. Camille Pelletan, que cette politique coloniale est un système ainsi conçu, défini et limité ; qu'il repose sur une triple base économique, humanitaire et politique.

Au point de vue économique, pourquoi des colonies? Pour les nations qui ont superflu de population... (Interruptions à droite. )

Au centre et à gauche - Parlez ! parlez !

M. Jules Ferry - Pour les nations qui ont un superflu de population, soit parce que cette population est pauvre, soit parce qu'elle se développe d'une façon exubérante ; la forme première de la colonisation...

(...)

M. Jules Ferry - Je disais, messieurs, que la forme première de la colonisation, c'est celle qui offre un asile et du travail au surcroît de population des pays pauvres ou de ceux qui renferment une population exubérante.

Mais il y a une autre forme de colonisation : c'est celle qui s'adapte aux peuples qui ont, ou bien un superflu de capitaux ou bien un excédent de produits. (Approbation sur divers bancs.)

Et c'est là la forme moderne, actuelle, la plus répandue et la plus féconde, car les économistes se sont toujours demandé, avec raison, s'il y avait profit à l'émigration des individus.

Et j'ai lu dans des livres savants des calculs qui chiffrent la perte pour chaque colon qui s'en va et quitte la mère-patrie. Il y a donc une contestation possible sur ce point. Il est évident, en effet, qu'un pays qui laisse échapper un large flot d'émigration n'est pas un pays heureux, un pays riche, et ce n'est pas un reproche à faire à la France, ni un outrage à lui adresser que de remarquer qu'elle est de tous les pays de l'Europe celui qui a le moins d'émigrants. (Très bien! Très bien! au centre et à gauche.)

Mais il n'y a pas que cet intérêt dans la colonisation. Les colonies sont, pour les pays riches, un placement de capitaux des plus avantageux. L'illustre Stuart-Mill a consacré un chapitre de son ouvrage à faire cette démonstration, et il le résume ainsi : « Pour les pays vieux et riches, la colonisation est une des meilleures affaires auxquelles ils puissent se livrer. »

M. Brialou - Pour les capitalistes !

M. Jules Ferry - Eh oui! pour les capitalistes. Est-ce qu'il vous est indifférent, monsieur Brialou, que la somme des capitaux s'accroisse dans ce pays par des placements intelligents? Est-ce que ce n'est pas l'intérêt du travail que le capital soit abondant dans ce pays? (Interruptions.) Vous savez bien que la France, qui regorge de capitaux... (Non! non! à droite! - Oui! oui! au centre et à gauche), oui, qui a toujours regorgé de capitaux depuis quarante ans. (Nouvelles interruptions à droite...)

(...)

M. Jules Ferry - Messieurs, il y a un second point, un second ordre d'idées que je dois également aborder, le plus rapidement possible, croyez-le bien : c'est le côté humanitaire et civilisateur de la question. Sur ce point, l'honorable M. Camille Pelletan raille beaucoup, avec l'esprit et la finesse qui lui sont propres ; il raille, il condamne, et il dit : « Qu'est-ce que c'est que cette civilisation qu'on impose à coups de canon? Qu'est-ce. sinon une autre forme de la barbarie? Est-ce que ces populations de race inférieure n'ont pas autant de droits que vous? Est-ce qu'elles ne sont pas maîtresses chez elles? est-ce qu'elles vous appellent? Vous allez chez elles contre leur gré, vous les violentez, mais vous ne les civilisez pas. »

Voilà, messieurs, la thèse ; je n'hésite pas à dire que ce n'est pas de la politique, cela, ni de l'histoire : c'est de la métaphysique politique... (Ah! ah! à l'extrême gauche.)

Voix à gauche - Parfaitement !

(...)

M. Jules Ferry - (...)

Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai! il faut dire ouvertement qu'en effet, les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures... (Rumeurs sur plusieurs bancs à l'extrême-gauche .)

M. Jules Maigne - Oh! vous osez dire cela dans le pays où ont été proclamés les droits de l'homme !

M. de Guilloutet - C'est la justification de l'esclavage et de la traite des nègres !

M. Jules Ferry - Si l'honorable M. Maigne a raison, si la déclaration des droits de l'homme a été écrite pour les noirs de l'Afrique équatoriale, alors de quel droit allez-vous leur imposer les échanges, les trafics? Ils ne vous appellent pas... (Interruptions à l'extrême gauche et à droite - Très bien! très bien! sur divers bancs à gauche.)

M. Raoul Duval - Nous ne voulons pas les leur imposer ! C'est vous qui les leur imposez !

M. Jules Maigne - Proposer et imposer sont choses fort différentes !

M. Georges Perin -Vous ne pouvez pas cependant faire des échanges forcés !

M. Jules Ferry - Je répète qu'il y a pour les races supérieures un droit parce qu'il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures... (Marques d'approbation sur les mêmes bancs à gauche - Nouvelles interruptions à l'extrême gauche et à droite.)

M. Joseph Fabre - C'est excessif ! vous aboutissez ainsi à l'abdication des principes de 1789 et de 1848... (Bruit) à la consécration de la loi de grâce remplaçant la loi de justice.

M. Vehnhes - Alors les missionnaires ont aussi leur droit ! ne leur reprochez donc pas d'en user ! (Bruit.)

M. le président - N'interrompez pas, monsieur Vernhes !

M. Jules Ferry - Je dis que les races supérieures...

M. Vernhes - Protégez les missionnaires alors ! (Très bien ! à droite.)

Voix à gauche - N'interrompez donc pas !

M. Jules Ferry - Je dis que les races supérieures ont des devoirs...

(...)

M. Jules Ferry - Messieurs, si nous ne devons plus être qu'une puissance continentale, restreignons notre puissance maritime ; couvrons nos côtes et nos ports de torpilleurs ; mais licencions nos escadres, car nous n'aurons plus que faire de nos croiseurs et de nos cuirassés. (Rumeurs et interruptions à l'extrême-gauche.)

Mais, si personne n'ouvre cet avis, si personne n'accepte cette conséquence logique des prémisses posées (Nouvelles rumeurs à l'extrême-gauche et à droite), alors cessez de calomnier la politique coloniale et d'en médire, car c'est aussi pour notre marine que les colonies sont faites. (Exclamations et interruptions à l'extrême-gauche et à droite.)

(...)

M. Jules Ferry - Regardez la carte du monde, et dites-moi si ces étapes de l'Indo-Chine, de Madagascar, de la Tunisie ne sont pas des étapes nécessaires pour la sécurité de notre navigation. (Nouvelles marques d'assentiment à gauche et au centre.)

Je me rappelle, messieurs, qu'à une des dernières séances qui ont précédé celle du 30 mars - c'était, je crois, le 28 mars - l'honorable amiral Peyron fut interpellé par l'un d'entre vous sur la situation de la marine. On lui demanda, avec de grandes exclamations : « Mais que deviendrait notre flotte s'il éclatait une grande guerre maritime? » L'amiral monta à la tribune et répondit : « S'il éclatait à cette heure, ce qu'à Dieu ne plaise, une grande guerre maritime, notre flotte serait précisément dans les parages où leur action aurait à s'exercer. »

Elle serait là dans l'océan Indien et dans les mers de Chine, - pour empêcher vos escadres d'être bloquées dans la Méditerranée.(Interruptions à droite.)

(...)

M. Jules Ferry - Je dis que la politique coloniale de la France, que la politique d'expansion coloniale, celle qui nous a fait aller, sous l'Empire, à Saigon, en Cochinchine, celle qui nous a conduits en Tunisie, celle qui nous a amenés à Madagascar - je dis que celle politique d'expansion coloniale s'est inspirée d'une vérité sur laquelle il faut pourtant appeler un instant votre attention : à savoir qu'une marine comme la nôtre ne peut pas se passer, sur la surface des mers, d'abris solides, de défenses, de centres de ravitaillement. (Très bien! très bien! et nombreux applaudissements à gauche et au centre.)

L'ignorez-vous, messieurs ? Regardez la carte du monde...

(...)

M. Jules Ferry - Que signifiait cette déclaration de l'amiral Peyron, que vous n'avez pas eu le temps de méditer, apparemment (Rumeurs à droite), puisqu'elle soulève chez vous des interruptions ? Elle signifie que, dans cette guerre maritime si invraisemblable, ce n'est pas dans la Méditerranée ni dans la Manche que se trancherait le jeu des batailles navales...

M. Paul de Cassagnac - C'est dans les Vosges ! (On rit.)

M. Jules Ferry - Ce n'est pas dans la Méditerranée, ce n'est pas dans la Manche que se livrerait la bataille décisive ; et Marseille et Toulon seraient non moins efficacement défendus dans l'océan Indien et dans les mers de Chine que dans la Méditerranée et dans la Manche. (Interruptions à l'extrême gauche et à droite.)

 (...)

M. Jules Ferry - Messieurs, il y a là des considérations qui méritent toute l'attention des patriotes. Les conditions de la guerre maritime sont profondément modifiées. (Très bien ! très bien !)

A l'heure qu'il est, vous savez qu'un navire de guerre ne peut pas porter, si parfaite que soit son organisation, plus de quatorze jours de charbon, et qu'un navire qui n'a plus de charbon est une épave, sur la surface des mers, abandonnée au premier occupant. D'où la nécessité d'avoir sur les mers des rades d'approvisionnement, des abris, des ports de défense et de ravitaillement. (Applaudissements au centre et à gauche - Interruptions diverses.) Et c'est pour cela qu'il nous fallait la Tunisie; c'est pour cela qu'il nous fallait Saigon et la Cochinchine ; c'est pour cela qu'il nous faut Madagascar, et que nous sommes à Diego-Suarès et à Vohémar, et que nous ne les quitterons jamais !... (Applaudissements sur un grand nombre de bancs.)

Messieurs, dans l'Europe telle qu'elle est faite, dans cette concurrence de tant de rivaux que nous voyons grandir autour de nous, les uns par les perfectionnements militaires ou maritimes, les autres par le développement prodigieux d'une population incessamment croissante ; dans une Europe, ou plutôt dans un univers ainsi fait, la politique de recueillement ou d'abstention, c'est tout simplement le grand chemin de la décadence !

Les nations, au temps où nous sommes, ne sont grandes que par l'activité qu'elles développent ; ce n'est pas « par le rayonnement pacifique des institutions »... (Interruptions à l'extrême-gauche et à droite) qu'elles sont grandes, à l'heure qu'il est.

M. Paul de Cassagnac - Nous nous en souviendrons : c'est l'apologie de la guerre.

M. de Baudry d'Asson -Très bien ! la République, c'est la guerre. Nous ferons imprimer votre discours à nos frais et nous le répandrons dans toutes les communes de nos circonscriptions électorales.

M. Jules Ferry - Rayonner sans agir, sans se mêler aux affaires du monde, en se tenant à l'écart de toutes les combinaisons européennes, en regardant comme un piège, comme une aventure toute expansion vers l'Afrique ou vers l'Orient, vivre de cette sorte, pour une grande nation, croyez-le bien, c'est abdiquer, et, dans un temps plus court que vous ne pouvez le croire, c'est descendre du premier rang au troisième et au quatrième. (Nouvelles interruptions sur les mêmes bancs - Très bien! très bien! au centre.)

Je ne puis pas, messieurs, et personne, j'imagine, ne peut envisager une pareille destinée pour notre pays.

Il faut que notre pays se mette en mesure de faire ce que font tous les autres, et, puisque la politique d'expansion coloniale est le mobile général qui emporte, à l'heure qu'il est, toutes les puissances européennes, il faut qu'il en prenne son parti; autrement il arrivera... oh! pas à nous qui ne verrons pas ces choses, mais à nos fils et à nos petits-fils, il arrivera ce qui est advenu à d'autres nations qui ont joué un très grand rôle il y a trois siècles, et qui se trouvent aujourd'hui, quelque puissantes, quelque grandes qu'elles aient été, descendues au troisième ou au quatrième rang. (Interruptions.)

Aujourd'hui, la question est très bien posée : le rejet des crédits qui vous sont soumis, c'est la politique d'abdication proclamée et décidée. (Non! non!)

Je sais très bien que vous ne la voterez pas celle politique ; je sais très bien aussi que la France vous applaudira de ne pas l'avoir votée : le corps électoral, devant lequel vous allez vous rendre, n'est pas plus que nous partisan de la politique de l'abdication ; allez bravement devant lui, dites-lui ce que vous avez fait, ne plaidez pas les circonstances atténuantes... (Exclamations à droite et à l'extrême gauche - Applaudissements à gauche et au centre.)... dites que vous avez voulu une France grande en toutes choses...

Un membre - Pas par la conquête.

M. Jules Ferry -... grande par les arts de la paix, par la politique coloniale, dites cela franchement au corps électoral, et il vous comprendra.

(...)

(fin de l'extrait du discours de Jules Ferry)

Nos articles de mars 2012 cités dans le résumé qui précède commencent à leur tour par les résumés suivants :

http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2012/03/11/constitution-et-races-humaines.html

Constitution et "races" humaines (I)

Le 11 mars 2012, Ouest-France écrit « François Hollande supprimerait le mot "race" de la Constitution », alors que le Parisien souligne « Hollande ne veut plus de "race" dans la Constitution ». Il s'agirait en effet, d'après le discours prononcé samedi à Paris par François Hollande, de « supprimer le mot race de notre Constitution ». Est visé l'article 1, d'après lequel la République « assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion ». A ce sujet, Le Nouvel Observateur reprend des déclarations du député et président de la Région Guadeloupe Victorin Lurel, se référant à une proposition de loi qu'il avait déposée le 15 novembre 2004. Le 11 mars également, Le Point emploie le titre « "Race" dans la Constitution - Juppé : "Faute d'agir, on change les mots !" ». Du tac au tac, Alain Juppé argumente : « On va supprimer une disposition qui est antiraciste ? » Mais cette réponse paraît peu pertinente, étant donné que déjà en juin 2000, sous le gouvernement français de « gauche plurielle » de Lionel Jospin, la Directive 2000/43/CE du Conseil de l'Union Européenne a proclamé dans ses considérants : « L'Union européenne rejette toutes théories tendant à déterminer l'existence de races humaines distinctes. L'emploi du mot "race" dans la présente directive n'implique nullement l'acceptation de telles théories ». Le mot « race » étant utilisé par la Directive en tant que référence à un prétexte ou mobile de discrimination, mais aucunement en tant que possible réalité anthropologique. Il aurait donc été logique de procèder à une actualisation de la Constitution française déjà à l'époque, ne serait-ce qu'en introduisant dans le préambule un considérant analogue à celui de la directive européenne. De même, on peut être surpris par l'absence de mention claire du racisme « officiel » de la période coloniale dans l'exposé des motifs de la proposition de loi déposée par Victorin Lurel en 2004.

[la suite, sur le lien http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2012/03/11/constitution-et-races-humaines.html ]

http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2012/03/15/constitution-et-races-humaines-ii.html

Constitution et "races" humaines (II)

Le 15 mars 2012, Les Echos écrit « Hollande et l'allié encombrant », évoquant un possible « effet Bastille » de la part de Jean-Luc Mélenchon. La veille, Le Nouvel Observateur employait le titre « Jean-Luc Mélenchon : "I’m dangerous" ». Mélenchon clamerait « I’m dangerous, je vais vous faire les poches ». Mais que penser de ce type de mises en scène électorales ? La réalité est que la participation à un gouvernement de François Hollande fait déjà partie des perspectives du Front de Gauche, à en juger par les déclarations récentes (France 2, Les quatre vérités) du secrétaire national du Parti Communiste, Pierre Laurent. Et si Jean-Luc Mélenchon est vraiment à ce point « dangereux pour le système », pour quelle raison candidats concurents et médias s'abstiennent-ils d'évoquer ses déclarations à propos du NPA dont fait état Christophe Barbier dans son livre Maquillages ? Voir nos articles « Christophe Barbier, Jean-Luc Mélenchon et Maquillages » (I) et (II). Nicolas Sarkozy a eu moins de chance à propos de sa mise en cause récente de l'espace de Schengen (allocution de Villepinte). Mais quelles sont les véritables raisons de la colère du Wall Street Journal, qui fait partie du groupe News Corporation dont le fondateur et PDG n'est autre que le milliardaire Rupert Murdoch, proche à son tour du Premier ministre britannique David Cameron ? Même si Nicolas Sarkozy visait l'immigration, l'espace de Schengen est avant tout la plaque tournante du « marché européen de la main d'oeuvre », du dumping social et de la libre circulation des capitaux. Le 15 mars également, le débat sur la présence du mot « race » dans la Constitution française se poursuit. Un article de Contrepoints va jusqu'à parler de « grosses bêtises » à propos de la proposition de François Hollande de supprimer ce mot de l'article 1 de la Constitution. C'est ignorer que depuis douze ans l'Union Européenne a explicitement désavoué dans une directive la notion de « race » humaine, comme déjà souligné dans notre article « Constitution et "races" humaines (I) ». On ne peut pas suivre, non plus, l'argument de Nicolas Sarkozy « le mot race est dans le préambule de la Constitution de 1946, qui est un texte sacré ». Malgré l'importance des acquis de la Libération, les textes de 1946, qui ont tenté notamment d'instaurer une « Union française », ne sauraient être pris comme référence en ce qui concerne la question coloniale dont l'influence historique sur la notion de « race » humaine est évidente. Il nous semble qu'en réalité ni François Hollande ni Nicolas Sarkozy n'apportent une véritable solution à un problème bien réel et récurrent, qui de notre point de vue devrait être résolu dans la clarté par : i) le retrait du mot  « race » du texte la Constitution ; ii) le désaveu explicite de la notion de « race » humaine dans le préambule de la Constitution en vigueur. Mais quelle confiance peut-on faire au monde politique, au vu de la vidéo récemment diffusée par 24 heures Actu avec le titre « PS : Mélenchon avoue avoir magouillé avec Hollande » ?

(fin des résumés)

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