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Billet de blog 4 juillet 2024

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Pique et pique et colégram

En passant dans un bois elle rencontra compère le Loup, qui eut bien envie de la manger ; mais il n’osa, à cause de quelques Bûcherons qui étaient dans la Forêt. Il lui demanda où elle allait ; la pauvre enfant, qui ne savait pas qu’il est dangereux de s’arrêter à écouter un Loup, lui dit : je vais voir ma Mère-grand, et lui porter une galette, avec un petit pot de beurre, que ma Mère lui envoie.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Si la plus impressionnante participation au vote pour une élection législative, depuis lurette, a fait croire un moment entre midi et 20 heures, le dimanche 30 juin 2024, aux naïfs, qu’un sursaut démocratique répondrait heureusement, en écho à la catastrophe annoncée, la cartographie des résultats montre que le nombre aura profité à la seule extrême qui vaille.

Dès le lendemain du vote, les journaux produisaient des cartes, marron pour le Monde, d’autres couleurs pour Libé et la PQR. Ces cartes sont l’image même de la contribution exorbitante de la presse au succès de Bardella. En effet, sur une carte ordinaire, qui ne cherche pas à montrer une évidence trompeuse, même si elles sont les plus grosses, les plus longues et les plus rapides des voies de communication, on ne figure pas seulement les autoroutes. Les nationales et les départementales existent, comme réseau alternatif, complexe et dense.

Ainsi, sous couvert de pluralité de l’information, les journalistes de radio comme ceux de la plupart des mass media, continuent, malgré la proximité du ravin, de prôner le pas en avant fatal. Ce matin, puis toute la journée, que ce soit à la télé, dans les journaux et sur les radios, on pouvait entendre, et lire, quand Jordan Bardella sera premier ministre ....

Oui, la presse française est l’ennemi de la démocratie, parce que depuis plusieurs années, les journalistes qui en fournissent les contenus, courent après les likes, au lieu d’informer. Ils ont perdu la boussole qui indique le Nord de leur profession, et, de ce fait, tournent en rond dans la bassine de l’événementiel comme le font les fournisseurs de contenu des réseaux sociaux.

On ne peut toutefois s’en remettre à l’opprobre, à la vindicte et à la dénonciation des faiblesses, des pratiques honteuses et des défauts de tous ceux à qui, par aveuglement et déni, nous attribuons la vaporisation de nos fantasmes de paix, de tranquillité, de solidarité, et celle de nos valeurs affichées, de liberté, égalité, fraternité.

Nous sommes, tous et chacun, en responsabilité, les véritables pourvoyeurs des pratiques qui fâchent. Le peuple de gauche, a cru que le PS était encore un parti de gauche, quand Rocard invoquait en 1993, le marché, et, pour ne pas sombrer dans l’océan des turpitudes et des trahisons de ce parti, quand Jospin, lauréat du prix des sociaux-traîtres, a engagé des privatisations à tout va, et inversé l’ordre des élections présidentielles et législatives, lesquelles ne sont plus qu’une convocation à entériner le vote présidentiel. Les déviances du PS sont innombrables, la moindre étant d’avoir élaboré un discours vicieux, pour convaincre qu’il était toujours un parti de gauche, au fil de sa descente vers le vide.

A la lecture de la déclaration de principe de la SFIO en 1905, date de sa création, on perçoit qu’un glissement majeur s’est opéré ; le Parti socialiste est un parti de classe qui a pour but de socialiser les moyens de production et d'échange, c'est-à-dire de transformer la société capitaliste en une société collectiviste ou communiste, et pour moyen l'organisation économique et politique du prolétariat. Par son but, par son idéal, par les moyens qu'il emploie, le parti socialiste, tout en poursuivant la réalisation des réformes immédiates revendiquées par la classe ouvrière, n'est pas un parti de réforme, mais un parti de lutte des classes et de révolution. 

En 2008, voilà ce qu’était devenu le contrat ; être socialiste, c'est ne pas se satisfaire du monde tel qu'il est, c'est vouloir changer la société. L'idée socialiste relève, à la fois, d'une révolte contre les injustices et du combat pour une vie meilleure. Le but de l'action socialiste est l'émancipation complète de la personne humaine. 

Que reste-t-il de la lutte contre le capitalisme, la lutte des classes et la révolution ?

Comment ne pas comprendre la détestation farouche d’une grande partie de la population, toutes classes confondues, sauf celle pour laquelle tout va bien, envers les politiciens et leurs renoncements, leurs faillites et leurs mensonges, face à la toute-puissance du capital et du libre-échange, des oligarques et leurs valets ?

La nouveauté, l’aberration nouvelle devrait-on dire, c’est le ralliement de juifs éminents au RN, la bise de Meyer Habib à Bardella, la déclaration de Klarsfeld, chasseur de nazis de son état, par laquelle il lave le RN de tout antisémitisme et les très nombreux autres signes d’allégeance de juifs à l’égard du RN et de ses représentants.

Bug mémoriel ? Non, la convergence est ailleurs, l’islamophobie, la référence permanente au 7 octobre, la vindicte féroce contre ceux, dont Mélenchon, qui osent suggérer que le Hamas pourrait être vu comme un mouvement de libération, une organisation de résistance, même si les moyens de cette organisation sont terroristes, sont les paradigmes de cette anomalie.

Dans l’esprit de beaucoup de juifs français, le pire n’est pas le vieil antisémitisme qui contestait la réalité de la Shoah, porté notamment par le FN puis le RN, mais celui de LFI parce que Mélenchon et ses soutiens, prennent en compte le malheur qui s’est abattu sur le le peuple palestinien depuis le 7 octobre au nom d’un droit de se défendre qui n’existe que dans la tête des fous qui gouvernent Israël, un pays occupant une terre prise par la force, un colonisateur qui organise la spoliation des habitants de Cisjordanie, avec l’aide de l’armée, sans scrupules et au prix de crimes contre l’humanité.

La résistance palestinienne, qu’elle soit conduite par un mouvement islamiste qu’il est permis de critiquer, d’abhorrer, n’est pas un mouvement dont les actions sont contraires au droit international.

Faut-il expliquer encore et encore, qu’Israël ne peut pas se considérer comme un Etat au-dessus des lois internationales que ses dirigeants s’appliquent à ignorer depuis sa création en 1948.

Dans l’esprit de certains juifs, la critique de l’Etat d’Israël, c’est à dire une forme, parmi bien d’autres, d’une expression considérée comme antisioniste, est réduite à un antisémitisme crapuleux.

Le 7 octobre est indépassable. Il y a là, une rupture majeure qu’il faut intégrer. Désormais de nombreux juifs sont réduits, par peur des positions propalestiniennes d’une partie non neutre de la population, à se jeter dans les bras du loup fasciste, celui du Petit Chaperon Rouge, de la fable de La Fontaine.

Entendu, ici et là que Bardella et Le Pen, tous neufs, tous propres, désormais piétinant le paillasson de Matignon, fustigeant depuis des semaines l’antisémitisme de Mélenchon auraient changé. Ils ne seraient plus les racistes et les antisémites qu’ils ont été. C’est fini. Désormais, ils peuvent dénoncer l’antisémitisme de LFI, ce qui aurait pour effet de les laver de tout soupçon d’antisémitisme, au point que Monsieur Klarsfeld, un juif, et pas des moindres, se serait rangé au côté de ceux, qui, naguère, affirmaient que les chambres à gaz n’étaient qu’un détail de l’histoire.

Plus récemment, le 1er juillet, sur radio Shalom, on apprenait, qu’une dizaine de présidents de communautés juives de Paris et sa région, ont demandé à être reçus par Marine le Pen.

Aura-t-on tout vu ?

En passant dans un bois elle rencontra compère le Loup, qui eut bien envie de la manger ; mais il n’osa, à cause de quelques Bûcherons qui étaient dans la Forêt.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.