Comment une salade Batavia payée 32 centimes à un producteur par son grossiste qui la revend 50 centimes à la grande distribution, est au final proposée autour de 1 € aux clients ? C’était le thème d’Envoyé Spécial (la suite) diffusé ce samedi 29 mars "La guerre des prix, 6 ans après". Tordons le cou à l’argument des distributeurs qui mettent en avant les prix bas pour les consommateurs, alors que le prix de la salade a augmenté de 15% ainsi que celui de nombreux autres produits. Cette recherche de prix bas est un argument fallacieux à l’heure où le prix de l’immobilier, ceux de l’énergie ont explosé et que les taxes diverses et prélèvement divers ne cessent de monter. Le résultat de ce bras de fer déséquilibré et violent, entre des producteurs qui font des marges infimes et une grande distribution qui use de toutes les techniques pour mater leurs fournisseurs, est une perte importante sèche de revenus pour les producteurs.
Les méthodes des Leclerc, Auchan, Aldi et consorts sont une bonne illustration de l’humiliation du fort par le faible. Entre les grandes enseignes et leurs fournisseurs, il ne s’agit pas de négociations mais du plein usage inique et sans scrupules d’un rapport de force profondément biaisé. Quand le législateur tente de placer des lignes rouges pour interdire, entre autres, les marges arrières, la grande distribution n’a de cesse de les contourner. Les marges arrières, en principe interdites, ne sont rien d’autres des rétrocommisions payées par les producteurs à la grande distribution en échange d’une présence dans les magasins.
Des sanctions inopérantes
Il faut croire que les sanctions prévues par la loi n’impressionnent pas les distributeurs. Dernière affaire en date, Leclecc vient d’être condamné à payer 500.000€, une goutte d’eau de ses bénéfices pour avoir voulu contraindre ses fournisseurs à ne pas se retourner contre lui, au motif de "clauses déséquilibrées" insérées dans des contrats avec des fournisseurs selon la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF). En 2012, Carrefour a été condamné à verser 2 millions d’euros au titre de sanctions pour avoir appliqué des marges arrières à ses fournisseurs et à leur restituer 17 millions d’euros. Au terme d’une procédure lancée en 2009. neuf enseignes de la grande distribution ont été poursuivies, comme de vulgaires malfaiteurs, en octobre 200, afin de faire "sanctionner plusieurs clauses du contrat type et des conditions générales d’achat", rappelle un communiqué de la DGCCRF.
En octobre 2009, Leclerc avait lui été condamné par la cour d’appel de Versailles à rétrocéder à 28 fournisseurs 23,3 millions d’euros, perçus sans contrepartie commerciale durant les années 1999-2001.
En novembre 2011, le Tribunal de commerce de Paris a condamné une nouvelle fois Leclerc, cette fois à une amende d’un million d’euros, pour avoir demandé à ces fournisseurs de lui restituer à leur tour ces 23,3 millions d’euros.
Au nom de l’augmentation du pouvoir d’achat, force est de constater les méthodes illégales ds distributeurs, rappelant un système mafieux bien éloigné de l’image propre et lisse délivrée par la communication des grandes enseignes.
Leclerc n’est pas la seule enseigne a abuser de sa position mais elle a fait l’objet de multiples condamnations (abus de marges arrières, pressions sur les fournisseurs)