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Notre collectif a dès son origine adopté une charte éthique très stricte : nous défendons des valeurs universelles de tolérance, de respect mutuel, de droits humains et de non discrimination, et sommes attachés aux principes fondamentaux qui forment la base de l'État de droit.
Si nous nous sommes souvent retrouvés opposés à l'extrême-droite, nos actions ne sont pas menées contre telle ou telle organisation politique mais contre l'expression du racisme, de l'intolérance religieuse ou sociétale, et contre la remise en cause des fondements de notre démocratie et des contre-pouvoirs qui empêchent les dérives autoritaires
Au sein même de notre collectif, diverses sensibilités s'expriment et nous les respectons. Nos valeurs nous rassemblent au-delà de nos différences et de nos opinions parfois opposées.
Les récentes déclarations de membres du gouvernement nous ont tous profondément heurtés, et nous ne pouvons rester muets face à ces atteintes gravissimes aux principes fondamentaux qui nous unissent.
Le ministre de l'Intérieur lui-même a remis en question le principe de l'État de droit, qui nous assure d'un traitement équitable de tous les citoyens et nous protège des abus de pouvoir :
« L'État de droit, ça n'est pas intangible ni sacré »
l'État de droit n'est pas un accord négociable. Il n'est en effet pas "sacré", car les églises sont séparées de l'État depuis 1905, mais il s'agit d'un principe fondamental.
Lire le billet de Nicolas Hervieu « Résistance au(x) droit(s) »
« J'ai simplement dit qu'il fallait déplacer le curseur dans l'État de droit, comme nous l'avons fait au moment du terrorisme et du Covid. »
Citer les régimes d'exception comme justification d'une altération permanente de ce principe est inquiétant, car cela valide toutes les potentielles dérives autoritaires.
À propos de l’Islam politique :
« C'est l'antisémitisme qui se découvre sous le masque de l'antisionisme, et c'est bien souvent l'instrumentalisation de l'islamophobie »
Hiérarchiser les haines, considérer que l’une est sous-estimée et l’autre exagérée, c’est un exercice auquel aucun responsable politique et a fortiori aucun membre du gouvernement ne devrait se livrer. C’est mettre en doute certaines victimes au profit d’autres, c’est sous-entendre qu’une intolérance sera considérée avec moins de bienveillance qu’une autre.
Nous vous renvoyons à notre précédent billet, le texte de Nicolas Hénin qui traite de ce sujet : Penser la lutte contre l'antisémitisme et l'islamophobie après le 7 Octobre
« Moi je pense qu'il faut qu'on passe de la lutte contre le séparatisme à la lutte contre l'Islam politique intrusif »
Cette déclaration, dans la bouche d’un ministre de l'Intérieur, est gravissime. Passer d’une lutte à l’autre, c’est abandonner la première au profit de la seconde. La lutte contre le séparatisme, c’est la lutte contre les discours et les actes menaçant la communauté nationale et les principes de notre démocratie et de notre république.
Un Islam politique qui défierait ces principes, comme tout précepte religieux ou idéologie politique qui ferait de même est alors combattu.
En déplaçant la lutte au seul Islam politique, ce n’est plus le discours lui-même qui est combattu, mais un mouvement en particulier. Et le séparatisme prôné par tous les autres (groupes fascistes, identitaires, religieux…) sort alors du cadre de la lutte.
Les principes sont là : si on accepte un parti politique Chrétien-Démocrate, il n’est pas éthiquement possible de refuser un parti politique issu d’une autre religion. Ce n’est que lorsque son discours contrevient aux valeurs qu’on défend qu’il est possible de le combattre.
Enfin, le secrétaire d'État chargé de la citoyenneté et de la lutte contre les discriminations, prenant l’exemple de la Grande-Bretagne qui a tenté de déporter vers le Rwanda les étrangers en situation irrégulière, affirme:
« Le ministre de l’Intérieur évoque toutes les pistes qu’il compte étudier, actionner, pour qu’on puisse améliorer notre capacité à reconduire dans leur pays d’origine ou dans des pays tiers des gens qui n’ont plus rien à faire sur le territoire national »
Cette mesure de déportation forcée du gouvernement conservateur anglais est dénoncée par toutes les associations et instances pour les droits humains et contrevient à l’ensemble des accords internationaux sur ce point. Elle a généré une énorme opposition en Grande-Bretagne et la justice britannique a réussi à empêcher l’application de ces mesures ignobles.
Et c’est cela que le gouvernement français affirme étudier en ce moment.
Ce type de discours dangereux, nous le combattons, quelle que soit la personne qui le prononce, quel que soit son parti politique, son origine ou sa religion.
Nous considérons que les principes que nous défendons sont universels et fondamentaux. Et nous continuerons à lutter contre tous ceux qui les attaquent, sans distinction.
Le collectif Sleeping Giants France