sokolo (avatar)

sokolo

Abonné·e de Mediapart

71 Billets

0 Édition

Billet de blog 21 octobre 2015

sokolo (avatar)

sokolo

Abonné·e de Mediapart

Après le voyage retour en TGV, l'aller...

Après avoir décrit un retour en TGV la semaine dernière dans mon blog je me suis demandé si, par honnêteté envers lectrices et lecteurs, il n’était pas nécessaire d’évoquer l’aller... Car à qui confier ce que ne furent pas vraiment des vacances.

sokolo (avatar)

sokolo

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Après avoir décrit un retour en TGV la semaine dernière dans mon blog je me suis demandé si, par honnêteté envers lectrices et lecteurs, il n’était pas nécessaire d’évoquer l’aller... Car à qui confier ce que ne furent pas vraiment des vacances.

Je vis à présent seul, ne cause d’un jour à l’autre qu’à Pépito, mon chat, et même si ce dernier fait tout son possible pour me comprendre il me reste après chaque laïus un manque de réelle compréhension. Pépito me suit avec attention mais ne répond jamais.

L’aller en TGV consistait à me rendre à Auray, ville de 13000 habitants entre Lorient et Vannes et dans laquelle je ne m’étais jamais arrêté. Seulement, J-P avait insisté. Te casse pas la tête, je viens d’acquérir une nouvelle voiture, ce sera l’occasion de l’essayer. Sacré J-P, il n’a pas changé, depuis le temps. Contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, J-P ne correspond ni à Jean-Pierre ou Jean-Paul, mais à Jean-Philippe. Un prénom qu’avec les copains nous trouvions un peu bourge pour des révoltés vaguement babas, mais c’est si vieux cet épisode de notre histoire, ça n’a guère de sens de l’évoquer. Ceux qui restent de cette époque sont envahis de cellules en dégénérescence, se demandent si le processus qui les terrassera au coin de la rue, dans leur lit ou pire dans un hosto est en marche. On en parlait jadis, sirotant un whisky, et se claquant les cuisses.

Toujours est-il que nous n’utilisons pas Jean-Philippe mais J-P, au point qu’il m’a été difficile de retrouver son véritable prénom. Pour tout avouer puisqu’on en est aux confidences, je me suis éloigné de la bande, peu à peu suite à la mort de ma femme, de mon isolement à la campagne, aussi les coups de fil, insistants au début, se raréfièrent pour disparaître tout à fait. Parfois, je reçois une carte postale du bout de monde, et s’il m’arrive de m’absenter, de courts séjours par respect pour Pépito qui déteste la solitude, je griffonne à mon tour quelques lignes destinées aux copains dans lesquelles je m’efforce de plaisanter, d’évoquer la belle vie au soleil et les doigts de pieds en éventail, avec des raisons d’espérer des jours encore meilleurs, à foison, suffit de regarder dans le bon sens. Une fois mes missives postées, je me fais une réflexion, espèce de salaud qui raconte des balivernes et s’arrange pour passer pour ce qu’il n’est pas. Pas difficile, nous ne nous voyons plus depuis des lustres. Dans la foulée, je glisse une carte postale adressée à Pépito et que la voisine lui lira.  

Dans le groupe, tous avaient leur place, mais J-P était l’élément moteur, plus, charismatique, et Vivi, Viviane sa femme, jouait le rôle de stabilisateur. En sa présence, jamais une engueulade, non par crainte, mais personne n’aurait aimé la chagriner. Elle vit encore et justement elle n’avait pas voulu essayer la nouvelle berline de J-P pour me chercher à la gare, cette fascination pour les bagnoles lui déclenche des soupirs et des claquements de langue qui disent combien ce côté beauf l’agace. Inutile de parler des autres, j’ai suivi leurs cercueils au fil du temps, et visité maints départements.

Nous ne sommes plus que quatre sur terre, avec Ramon. Ce dernier a eu une enfance rock’n’roll et je n’entrerai pas dans les détails, c’est un type attachant avec un caractère en dents de scies. Avec lui, on ne sait jamais quand il va exploser tout en étant certain en fonction de nos propos, sur la politique notamment, que ses éclats de voix et ses reproches nous blesseront. C’est un pur, un gars qui ne varie pas dans ses convictions avec le temps, comme la plupart d’entre nous. Les relations en sont compliquées, tant nous l’aimons. Je pense qu’il est indispensable pour rehausser notre parcours et lui accrocher des ornementations, des guirlandes. Je me dis, son amitié prouve que nous ne sommes pas tout à fait des canailles, que notre carrière professionnelle ne nous a pas complètement pourris. Sinon, il nous aurait ignorés depuis que nous avons empruntés des chemins ombragés mais rémunérateurs. Passons...

Nous nous sommes rencontrés cet été avec J-P et Vivi à son propos. C’est lui qui l’a demandé aussi ai-je accouru. Impossible d’être sourd quand Ramon réclame un service. Sur le quai, j’ai eu des difficultés à identifier J-P. Et c’est un vieux barbu au visage érodé par les embruns qui s’est extirpé d’une colo de gamins vociférant et dans laquelle il s’était emberlificoté, m’a salué de gestes de sa main tendue vers le ciel. Putain qu’il a changé ! On aurait dit un SDF alors qu’il est blindé comme la Banque Centrale Européenne, forcément avec son métier d’avocat et celui de Vivi... Elle a été la première d’entre nous à bosser pour de bon, je veux dire pour amasser de l’oseille en tant qu’experte comptable, en exceptant Ramon bien entendu qui a fait l’instituteur très tôt en banlieue parisienne, mais n’a amassé que les savons des parents d’élèves. Non pas qu’il ne suivait pas en classe, mais par choix, pour fournir aux gosses, ses gosses comme il disait avec fierté alors que sa femme est stérile, de quoi se dépatouiller dans cette société de requins, expression dont il se servait encore, j’en étais certain même après l’avoir perdu de vue.

J-P avait été un grand avocat dont la presse locale publiait parfois la photo, mais pas avec la gueule que je lui voyais sur le quai de la gare d’Auray ! Quand on bourlingue sur un bateau à voile sitôt que l’occasion se présente depuis l’adolescence, embarquant des clients à l’occasion, on le paye avec une peau de lézard. S’il avait fréquenté avec fougue les prétoires, ce n’avait pas été pour défendre la veuve et l’orphelin, et les accusations de Ramon d’avoir trahi tout ce qui avait de la valeur ne manquaient pas, lui aussi ayant un sens de la répartie qui clouait le bec du grand avocat. Alors, J-P s’éclipsait en recherche d’un fond de whisky et la fermait le reste de la soirée. Ça plombait l’ambiance et sans Vivi nous nous serions tous fâchés, ne nous serions plus vus. Mais le temps nous a séparés et non Ramon et sa volonté de modifier le monde.

Le premier à disparaître du groupe a été moi, je ne me suis pas remis de la mort de ma femme même si je clame le contraire. On a sa fierté. Pépito est là qui me comprend, tandis que les autres finissaient pas m’ennuyer, à remuer leurs souvenirs d’anciens rebelles, pas bien reluisants d’après moi, avant d’évoquer les placements du fric dont ils ne savaient que faire.

Dis donc, qu’il me sort J-P en m’embrassant, t’es frais comme un gardon... Il est comme ça, flatteur, à m’écraser contre sa poitrine et me soufflant son haleine de cachalot. Il expire des décennies de cigarettes à tomber raide. Ses yeux sont cernés de rouge, il affiche la mine du type qui finira au bout d’une ficelle, celle de la bombonne d’oxygène dans un hosto. C’est son choix, mais non de dieu ce qu’il chlingue !

Il s’empare de mon sac et, main sur mon épaule, me conduit jusqu’à son nouvel achat dont il décrit les multiples qualités. J’en ai rien à cirer, je pense à Ramon dont il ne dit mot. Il n’a donné aucun détail le concernant, seulement que l’instituteur en retraite avait besoin d’un coup de main, une affaire urgente autant qu’importante. Du moins c’est le contenu de son mail. Sa caisse était confortable et silencieuse mais les négociations avec le concessionnaire, le rabais obtenu, je n’y coupais pas, et inutile de l’interrompre, il aurait remis le couvert jusqu’à avoir jubilé au final sur la bonne affaire. Quand on aime le fric à ce point, aucun vaccin n’agit, mieux vaut la boucler et contempler le paysage.

Dis, tu m’écoutes ?... Bien entendu, l’auditoire joue son rôle, sinon autant parler de ces sujets à Vivi qui m’a confié un jour penser à autre chose le temps qu’il en finisse. Alors j’ai tenté de me fier à l’expérience de sa femme. Non, mais là, il me gonflait. Non, j’en ai rien à branler de ta bagnole. Dis-moi plutôt, la dernière fois qu’on s’est vus, c’était pour un enterrement, mais de qui ? Tu te souviens ? Durant un kilomètre, il a été silencieux, vexé sans doute, mais en recherche dans sa mémoire qui, telle la mienne je n’en doutais pas, avait du tiraillement. Raymond, a-t-il lâché brutalement, pas un mot de plus. Comment ça Raymond, il est mort ? Il a quitté la route des yeux un instant. Tu te fous de moi ou tu perds la boule... Ce fut mon tour de méditer. Oui, je perds la boule et la mémoire, mais pas question de lui avouer le diagnostic du toubib. Oui, je plaisante, je recherchais l’année...

La conversation s’est poursuivie ainsi jusqu’à se garer sur le quai de la Trinité Sur Mer. Il a sorti son portable. On est à La Trinité, on se dirige vers le bateau, tu nous rejoins ? Non je ne lui ai rien dit. Ça urge pas. Clic. On y va ? Tu te souviens comment ca marche, un voilier ? Et là il me file un coup de coude, l’œil espiègle. Sa manière de m’annoncer qu’il me passera la barre, comme dans le temps, j’adorais ça. Quand on arrive devant son 12 mètres, il fait une pause, fixe ses godasses. Il y aura Ramon, tu te souviens de lui ? Il me prend pour un con, Ramon est inscrit dans mon cerveau, aussi présent que ma date de naissance, un type formidable, un roc avec des idées, qui ne cède pas devant les tentations.

Souvent, l’instit chantonnait, pas par méchanceté mais en fonction de notre présence qui lui évoquait Jacques Brel, sa chanson Les Bourgeois. Tous savaient ce qu’il avait en tête, mais sitôt qu’on étaient réunis on se moquait de sa naïveté, le monde était ainsi fait, il était illusoire d’aligner des velléités de le modeler à sa guise. C’était lui qui marchait à côté, en équilibre sur un fil ne conduisant nulle part. N’empêche, Ramon était le seul à conserver en vieillissant un visage lisse, un corps svelte et souple comme un jonc, comme sa mère. Les facteurs génétiques, se justifiait-il en contemplant nos dos voutés et tous les signes de la vieillerie venus trop tôt. Je le devinais, il évitait de nous attrister et, en silence, je cogitais, sur le rôle de ses convictions dans l’affaire. C’est idiot, j’en conviens, mais les pensées ne cadrent pas forcément avec la logique. J’étais persuadé que ce type nous enterrerait tous.

Je me tournais en direction du quai. Tu cherches qui, Vivi, elle arrive dans un quart d’heure. Allez, passe devant, t’as encore le pied marin ? Le pont bougea à peine et je me réjouissais de cette journée de cabotage, certain qu’ils avaient prévu de quoi manger, du poisson, un coup de blanc en trinquant à notre jeunesse. Il est bath, ce rafiot, pas vrai ? Tu sais combien j’ai raqué pour ça ? Je ne l’écoutais plus, épluchais les badauds sur l’embarcadère mais personne ne présentait cette silhouette reconnaissable même après tant d’années, celle de Ramon, et je craignais de verser une larme en l’enlaçant, c’était un chic type, un exemple.

Je te laisse visiter la cabine de ton yacht, parce que c’est toi le pilote ! Une fois descendu, j’inspectais le lieu qui sentait le neuf, avec des boiseries, des coussins moelleux, ouvrais les portes donnant sur les couchettes. Dis-donc, dis-je en sortant la tête à l’extérieur, une porte est cadenassée ! En appui sur l’épaule de son mari Vivi mettait le pied sur le pont, et sitôt qu’elle m’aperçut s’exclama T’es venu, quel plaisir de te voir !!! Elle rayonnait, comme chaque fois qu’elle tombait dans les bras de l’un de nous. J-P bougonna en réponse à ma question. Dans cette couchette sont entassées des provisions depuis hier soir. Ne jamais tenter le diable. On l’ouvrira, plus tard...

Ensuite, il mit le moteur en route, me fit signe de m’asseoir, détacha le bout relié au ponton et se tint dressé à mes côtés à m’indiquer le passage jusqu’au large. J’étais ravi, plongé dans mon adolescence quand nous partions avec un pétard au bec, inconscients, fous, riant de tout, de la vie, de la mort. À mesure que l’on s’éloignait de La Trinité une brise caressait mon crâne dégarni, le soleil commençait à taper et je me demandais pourquoi nous avions mis tant de temps à nous revoir. Mais pourquoi, bordel de merde ! C’était si bon de se retrouver.

Adossée à la cabine, Vivi se tenait face à nous, me contemplait comme à l’époque, ses longs cheveux blancs au vent qu’elle dégageait d’un raidissement du cou, un peu maternelle, encore séductrice, même burinée comme son mari. Un beau couple. J’étais forcément ému, avec un regret. Il manquait quelqu’un à ces retrouvailles... Ma femme. J-P m’avait assuré qu’on verrait Ramon après le déjeuner, une question d’organisation. Sa mine mystérieuse et grave commençait à m’agacer sitôt qu’il prononçait le nom de notre vieux copain. Qu’attend-t-il de nous, c’est quoi ce service à lui rendre, il a braqué une banque ?... 

J-P consultait la boussole. Garde le cap, on dérive ! Non seulement il ne répondait pas mais sa femme détournait le front vers le soleil, paupières baissées, expirait longuement, comme pour ralentir ses pulsations cardiaques. Son cœur avait la breloque depuis toujours et ça n’avait pas dû s’arranger avec le temps. Ensuite, elle baissait la tête, me fixait longuement en silence. Midi approchait et J-P m’indiqua un autre cap qui nous conduisait vers une anse bien abritée. Quand on s’approchera, je larguerai les voiles et on béquillera pour grignoter, le temps que la marée remonte.

C’était merveilleux, moi qui ne voulais pas quitter Pépito, je me sentais ridicule. Le bateau en équilibre sur ses béquilles au-dessus d’un mélange de vase, de varech et de rochers était comme une cabane de gamins, nous avons beaucoup ri, trinqué à Ramon que l’on verrait sous peu. Il va bien ? demandais-je alors que ma vision faiblissait comme chaque fois que je buvais trop, l’âge bien entendu. C’est Vivi qui répondit alors que J-P sortait une clé de sa poche, déverrouillait la couchette aux provisions de laquelle il revint avec du Champagne. Je protestais en couvrant mon verre tandis que sa femme me glissait à l’oreille. Ramon a réalisé ce matin un souhait qui lui était cher. Grâce à sa femme et J-P. Elle avait les larmes aux yeux et elle me tendit une feuille manuscrite que je déchiffrais péniblement, suite à des frissons. Oui, je tremblais en plein soleil.  C’est con la vie, murmurais-je...

C’était une demande commune à notre vieux copain et son épouse adorée. La dernière à laquelle je me serais attendu en venant ici. La mer battait de nouveau la coque et c’est tous trois éméchés que nous avons repris moi le gouvernail, J-P le rôle de capitaine, Vivi installée en figure de proue à guetter les flots. Ça c’est passé quand ? J-P répondait à présent à toutes mes interrogations et à mesure mon corps se raidissait, ma révolte menaçait d’exploser, avec la volonté de rentrer à la Trinité Sur Mer, de m’installer dans le premier TGV direction Paris.

D’un coup, j’éclatais. Salaud, comment t’as pu faire ça, toi, un avocat ! Et la loi, tu t’assieds dessus à présent. Fumier !!! Je m’essuyais le nez de la paume tout en reniflant, furieux.Ce curieux capitaine restait stoïque, me laissait vider ma bile, compréhensif, compatissant même et ça m’exaspérait ! Vivi hurla de la proue, à bâbord toute, j’en aperçois ! Je m’exécutais et J-P repoussa la barre violement en sens inverse, au risque de me foutre à la baille. À gauche, pas à droite !!! Ensuite, il précisa d’une voix que je ne lui connaissais pas. La loi, comme tu dis, je l’emmerde. J’ai passé ma vie à défendre des crapules, et à présent j’obéis aux désirs d’un copain. Point barre. Ramon est venu ce matin tôt, avec sa femme. Ensuite elle est repartie, seule. Je balbutiai, tu ne vas pas me dire que... J-P haussa les épaules. Si... Ramon comptait sur toi, alors fais comme Vivi et moi, assume...

Il retourna en bas dans la couchette aux provisions dont la porte battait avec le roulis, en revint avec une énorme boite en plastic à congélation. Tiens ça, me dit-il. Elle était bougrement lourde et tandis qu’il affalait les voiles, je l’ouvris. Des morceaux de barbaque, plusieurs kilos. Je levais les yeux vers les vagues qui caressaient la coque maintenant que nous n’étions plus en mouvement et je les vis... Les ailerons. Des peaux bleues, des requins qu’on croise en Bretagne. J-P m’en avait signalés escortant le voilier alors qu’il péchait à la traîne quand nous étions jeunes. Vas-y, ordonna-t-il, balance la nourriture ! Vous n’allez pas me croire, je grelottais, claquais des dents tandis que les peaux bleues rappliquaient, pointaient leur museau, happaient la bidoche, disparaissaient d’un coup de queue, contournaient notre embarcation. À  présent, j’ai besoin de toi, me glissa J-P en me pressant l’épaule affectueusement. On va le chercher.

Le sac à voile pesait un âne mort et nous faisions des pauses afin de retrouver notre souffle, front contre front, les yeux humides. Comment t’as pu faire ça, insistais-je. Il me saisit par le col, hors de lui. La ferme, tu crois que c’est facile pour moi ? Il l’a demandé, on le fait et si tu recommences avec tes allusions à cette putain de loi, je te balance avec !!! J-P craquait et à mesure qu’il craquait je comprenais combien je le connaissais mal. Vivi nous observait du pont, et c’est elle qui me décida. C’est sa volonté, tu comprends... Elle avait employé une voix douce bien que rauque avec tous ces paquets de clopes partagés avec son mari. Elle ajouta. On se grouille, les requins sont énervés...

Le sac à voile sur le pont, J-P me souffla, à toi l’honneur, j’peux pas... Alors, lentement je tirai la fermeture éclair et découvris Ramon déjà raide, au teint terreux, terriblement vieilli, les paupières n’avaient pas été baissées et un carton barrait le buste sur lequel était écrit au feutre, merci les potes. Je le saisis par les épaules, JP par les pieds et hop ! Adieu... Aussitôt, on hissa les voiles et J-P mit le moteur pour dégager plus vite. Je peux pas voir ça, marmonna-t-il se parlant à lui-même. Derrière nous, il y avait un tourbillon de museaux, de queues et d’ailerons. Tu sais, me dit Vivi, comme il était fasciné par le livre de Jack London, Martin Éden. Tu te souviens de la dernière page ? Oui, je me souvenais. Elle ajouta. Dans deux jours sa femme signalera sa disparition à la gendarmerie. Seul J-P a lâché un mot à l’approche de la Trinité, de toute façon, il était foutu... Sur le quai, J-P m’a plus ou moins invité à passer quelques jours à leurs côté mais j’ai répondu. Ramène-moi à la gare d’Auray, s’il te plait.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.