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Billet de blog 10 juillet 2025

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L'Événement. Chapitre 2 : le basculement

Avant que ne survienne l’Événement – le 1er septembre 2026 – je n’avais plus d’espoir de changement. Guerres, génocides, crises économiques, concentration des richesses, racismes, sixième extinction. Une poignée de dirigeants et de milliardaires faisaient régner le chaos et avaient convaincu l'humanité du fameux « there is no alternative ».

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

   Remontons le temps. Lors d’une commission des Affaires européennes, le 2 juillet 2025, les députés LR, RN et macronistes avaient rejeté un amendement qui sommait les pays européens – dont la France – de respecter les décisions de la Cour pénale internationale : ils avaient donc choisi de désobéir au Droit international. Et ce n’était que le début de leur désobéissance. Depuis près d’une dizaine d’années, les lois antiterroristes étaient utilisées contre des journalistes, des éditeurs, des manifestants, des personnes racisées, des musulmans et c’est ainsi qu’en janvier 2026, le gouvernement avait décrété que toutes les manifestations pour la Palestine étaient illégales car considérées comme un soutien au terrorisme islamiste. Toute opposition à la politique d’extrême-droite israélienne était considérée comme de l’antisémitisme. Toute communication sur le nombre réel de victimes palestiniennes du génocide était interdite. Israël, les USA et leurs alliés, la France et l’Allemagne, était entrés en guerre contre la Syrie, La Libye, Le Liban, L’Iran. Et en février 2026, après le nettoyage ethnique, les projets immobiliers de la « Gaza Riviera » ou « Gaza plage » avaient commencé.

   À l’été 2026, aux USA, Trump avait déporté au total un million de personnes depuis le début de son mandat en janvier 2025. 100 000 d’entre elles étaient encore détenues au Salvador. Dans sa guerre contre l'immigration sur le sol américain, l'allié de Trump était le ICE : Immigration and Customs Enforcement. Kidnapping de femmes et enfants, enferment des individus en situation régulière au motif de leur origine, sans mandat d’arrêt, sans aval d’un juge. L'administration Trump s’était affranchie du cadre légal : elle ne respectait plus la loi. Elle passait outre les décisions des juges, expulsant les migrants avant que le juge du tribunal de l'immigration saisi du dossier puisse rendre un avis. Partout à travers le pays, il y avait eu des manifestations antifascistes d’ampleur pendant une année entière mais Trump avait envoyé l’armée. Dans certaines villes des États-Unis nous assistions à des guerres civiles.

   Et puis il y eu l’Événement, la mort des puissants, le retour de nos espoirs et la possibilité d’imaginer un avenir dans cet « autre monde ».

10 octobre 2026 : jour 40 après l’Événement.

   J’entre, épuisée, dans l’appart d’Audrey et Stef. Fred est affalé dans le canapé devant la télé.

- Fred, bouge un peu, tu prends toute la place là, je veux m’assoir. J’ai marché 10 bornes pour trouver un pauvre paquet de clopes.

- Ouai, beh peut-être qu’avec la fin du monde, tu devrais arrêter de fumer.

- Je t’emmerde. Puis c’est pas la fin du monde, c’est juste la fin du Capitalisme. « Ça va bien se passer » comme disait l’autre con. Tu regardes quoi ?

- Cnews, « L’heure des pro », avec Pascal qui est à deux doigts de nous faire un AVC. Sa voix n’est jamais autant montée dans les aigues. Avec un peu de chance, j’me dis que je vais le voir trépasser en direct.

- Pfff, il est insignifiant, l’Événement ne cible pas ce genre de bouffon. Tu peux zapper s’te plait ?

- Comment ça il ne cible pas les trouducs ? Tu plaisantes ou quoi ? T’as pas vu pour Andrew Tate, le masculiniste proxénète faisant du trafic d’êtres humains qui avait obtenu l’asile politique aux USA grâce à papa Trump ?

- Non quoi ?

- Ils ont retrouvé ses restes dans une forêt où il faisait du survivalisme… il a été bouffé par un ours ce con !

Une larme de joie coule sur ma joue.

- Merde… lui aussi a fini par choisir l’ours… mais visiblement ça s’est mal passé.

Fred monte le son de la télé. Je suis alors prise d’un fou-rire en écoutant Pascal Praud : « Mais c’est tragiiiique, des présideeeeents et des hooooommes d’affaiiiires les plus importaaants du mooonde meuuurent et cela ne semble pas émouvoir la populatiooon… il devrait y avoir des veillées funèbres partouuut ».

- Merde, t’as raison Fred. Je chiale de rire.

Je me lève pour aller me chercher une bière. Et tout d’un coup j’entends Fred s’énerver :

- Rhoooo… bordel il se passe quoi encore ?

   Je me retourne et regarde l’écran. « No signal ». En ce J+40, Cnews a cessé d'émettre, sans un « au revoir » ou un « adieu » de Pascal… et sans émoi de la « populatiooooon ». La chaine d’extrême-droite ne fût que la première d’une longue série : en moins d’une semaine tous les médias de propagande appartenant à des milliardaires, soit morts soit disparus, ont cessé d'exister. Les éditorialistes qui passaient leur JT à pleurer la mort d’assassins capitalistes (souvent leur patron) étaient les mêmes qui ne s'étaient jamais émus de la mort de milliers de réfugiés en mer Méditerranée fuyant la guerre ou la famine, de la mort de milliers de personnes dans les inondations ou des incendies en Inde, en Algérie ou en Grèce, des génocides en Palestine, au Yémen, au Congo ou au Soudan. Mais presque plus personne n'écoutait ces nostalgiques de l’ancien monde. C'était l'effondrement de leur monde.

   Notre deuil de Cnews avait duré environ deux secondes. Et Fred avait zappé sur France Info. Au même moment, Audrey était rentrée de sa journée de travail.

- Vous faites quoi les chômeurs ?

Fred la toisa avec un large sourire :

- On a regardé Cnews décéder en direct.

- Hein ? Fred ne me donne pas des faux espoirs stp.

- Beh sur Internet, ils disent juste que la chaine a cessé d’émettre. Sans plus de précision.

- Hum oki ! je vais me boire un jus d’orange.

   La voix de la présentatrice du JT de France Info nous sort violement de notre fou-rire. « Bienvenue à toutes et tous pour cette édition spéciale. L’élection présidentielle est reportée. Pour l’instant aucune date n’a été communiquée. Le Président par intérim, Gérard Larcher, n’a pas donné d’explication ». Fred se lève d’un bond en faisant les cent pas :

- Ben voyons… tu violes la Constitution, pourquoi t’emmerder à donner une explication ? Puis tu parles ! Larcher il est pépouze là, même avant d’être Président, il nous coûtait déjà le PIB du Danemark en frais de bouche alors aujourd’hui… Puis, ils nous prennent vraiment pour des cons. On sait très bien que c’est à cause de l’Événement… peut-être qu’il n’y a plus de candidat à l’élection parce qu’ils ont tous peur de crever.

- Fred… il reste encore des Présidents en vie… enfin, je crois. L’Événement ne semble que viser les pires d’entre eux.

- Audrey… ça : on n’en sait rien. Moi je me pose des questions sur ce truc… pourquoi il a buté Macron dans les premiers et pas des Poutine, Xi Jinping, Kim Jong-Un, les Mollah, Al Sissi et tous les autres dictateurs ? C’est bizarre non ?

- Je t’arrête tout de suite, ça c’est un point de vue très occidentalo-centré. Macron a été le complice de crimes de guerre en Égypte aux côtés d’Al Sissi justement ! Il a été le complice d’un génocide et d’un nettoyage ethnique en Palestine, il a mené des politiques néocoloniales violentes dans les territoires d’Outre-mer, il a vendu des armes à Israël, à l’Arabie Saoudite, à l’Égypte et aux Émirats arabes unis. Des pays qui ont utilisé ces équipements pour commettre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité sur des population civiles en Palestine, en Égypte ou au Yémen. C’était un criminel.

- T’as raison Clara. C’était une ordure. Mais d’ailleurs concernant Poutine ou les autres troufions, on n’a pas de nouvelle ?

Poutine, Kim Jong Un et Xi Jinping n’avaient plus fait d’apparition publique depuis environ un mois. Mais au fond la question n’était pas de savoir s’ils étaient morts, mais comment étaient-ils morts ?

   Le jours suivants, l’agonie de l’ancien monde se poursuivait. Crash boursier. Dévaluation des monnaies. Arrêt des productions de textile. Arrêt des exploitations minières et pétrolières. Arrêt des vols internationaux. Fermeture de Twitter et des réseaux sociaux Meta. Au jour 46, il n'y avait plus aucun milliardaire sur la planète : l'argent, les devises, le flouz, la maille n'avaient plus de valeur. Les notions de profits, de croissance, de retour sur investissement s'étaient crashées en même temps que le CaC et le Dow jones. La dystopie des uns avait fait l'utopie des autres. Je ne sais pas comment mais Internet continuait malgré tout de fonctionner et par ce biais que nous pouvions avoir quelques informations. Les journalistes indépendants et ceux des chaines publiques n’avaient pas cessé de travailler et les réseaux Mastodon et Bluesky nous permettaient de communiquer avec une partie du monde. Ainsi, nous avons appris qu’il y avait eu des tentatives de putsch en Israël et en Russie. Mais tous les généraux à l'origine de ces prises de pouvoir avaient disparu du jour au lendemain… comme s'ils s'étaient évaporés. Impossible d'avoir la vérité sur ce qui c'était réellement passé : étaient-ils morts eux aussi dans des circonstances mystérieuses ? Aux USA, alors que Trump était réduit à l’état de légume et ne survivait que brancher à des machines, J.D Vance, son colistier avait pris sa place conformément au 25ième amendement. Et sans surprise, il avait tenté d'imposer la loi martiale. L'armée avait été déployée dans les rues, avait pris le contrôle des ministères, des hôpitaux... Interdiction de se réunir, de manifester, de circuler sans motif impérieux. Ce cirque n’avait pas duré bien longtemps. Sept jours très exactement. Et lors d’un diner officiel, Vance mourut étouffé par un morceau de pastèque.

   Au jour 50 : tout a basculé. La sidération avait laissé place à l'affolement. Suite aux différents putschs et aux tentatives d’imposer la loi martiale, des émeutes avaient éclaté dans plusieurs pays. L'effondrement aussi rapide d'un système est violent. En France, après les premières coupures de courant, il y eut des exodes massifs des grandes villes. Les supermarchés n'étaient plus approvisionnés, et après avoir été pillés des derniers vivres, les citadins avaient fui vers les campagnes espérant trouver de quoi se nourrir directement auprès des paysans et des agriculteurs. Et si l’Événement éliminait bien ceux qui détruisaient le vivant, il ne guérissait pas miraculeusement les malades. Alors, des médecins avaient continué d’exercer et des hôpitaux continuaient d’accueillir des patients, mais trouver des médicaments pour soigner certaines pathologies devenait extrêmement difficile.

   J’aurais bien rejoint mes parents et mon frère dans le sud mais aucun train ne circulait et je n’avais pas de voiture… puis de toute façon, il y avait une pénurie mondiale d’essence. Nous étions restés à Montreuil, tous les cinq avec nos quatre chats. Nous n’habitions pas très loin les uns des autres mais nous avions établi notre « campement » chez Audrey et Stef. Betty, qui habitait dans le 12ième arrondissement, ne pouvait plus venir nous voir. Dans ce nouveau monde, sans métro et sans bus, elle aurait dû marcher 1h40 pour arriver au QG et avec les dernières émeutes survenues dans Paris, ce n’était pas prudent. Nous étions donc bloqués là. À cette époque, nous pensions encore que notre colocation était temporaire et que c’ était une question de jours avant que la circulation des trains ne reprenne, nous étions tellement habitués à la résilience du Capitalisme qu’il nous était impossible d’envisager la durabilité de cette crise. Nous avions décidé très vite de mettre en commun toutes la nourriture et les produits d’hygiène que nous avions chez nous. Germain avait passé la porte trainant derrière lui une valise d’environ trente kilos.

- Germain, qui as-tu mis dans cette valise ?

- T’es con… Fred, c’est de la nourriture et des savons…

Il ouvre la valise. 23 paquets de pates. 7 paquets de riz. Des sauces. Des condiments. 12 brosses à dent. Un lot de trois dentifrices. Et 142 savons. J’éclate de rire.

- Mais Germain, t’as braqué Barilla et une savonnerie ou quoi ? Tu te prépares à la fin du monde depuis quand exactement ?

- Non mais j’aime bien prévoir…

- Là tout suite, je suis contente de ta passion pour les pâtes et de ton obsession de l’hygiène… vraiment heureuse.

   Jour 54. 20h, nous nous étions tous posés sur le canapé devant la télé. En France, il ne restait plus que deux chaines publiques qui continuaient d’émettre. Nous venions d’apprendre au JT que Gérard Larcher venait de démissionner de ses fonctions de Président intérimaire.

- Comment vous croyez qu’il va manger et boire à l’œil maintenant ? avait lancé Stef.

Rire général. Mais ce soir-là, comme la majorité de la population française, nous n’attendions qu’une chose : l’émission spéciale consacrée à « l’Événement » sur France 2. Il avait fallu attendre 54 jours après les premiers morts pour qu’enfin des journalistes, des médecins, des écologues, des politiques, des sociologues, des philosophes, des religieux s’assoient autour d’une table pour parler de ce phénomène aussi extraordinaire que brutal.

   Le Présentateur introduit l'émission : « Slavoj Žižek disait : "Il est plus facile d'imaginer la fin du monde que d'imaginer la fin du Capitalisme." Dans le monde dans lequel nous vivions il y a encore deux mois, le capitalisme n'était plus un cadre économique, il était devenu notre caverne platonicienne, nous ne pouvions concevoir notre existence en dehors ou par-delà son cadre. Son influence et son expansion étaient si immenses qu'elles semblaient échapper à tout contrôle, nous rendant incapable ne serait-ce que d'envisager vivre sans lui. Ce système, nous promettant une croissance illimitée, s'est heurté aux limites de la planète aux ressources finie mais personne ne pouvait l'arrêter tel un train sans conducteur fonçant dans un mur de bêton. Marx avait prédit que le capitalisme finirait par s'effondrer sous son propre poids, sa quête d'une expansion sans fin dans un monde fini, le rendant fondamentalement insoutenable. Puis il y 54 jours, l'Événement a tout changé. Si ce soir nous allons évidemment parler des hypothèses scientifiques et religieuses autour de ce phénomène, nous allons aussi débattre sur le "monde d'après" et de ce que nous allons faire pour que la mort du Capitalisme ne nous entraîne pas dans sa chute. »

   Une philosophe prend la parole : « Nietzsche soutenait que le capitalisme reflète nos impulsions humaines les plus profondes. Notre désir de puissance se manifestant à travers l'argent et les biens de consommation. Nous avons été conditionnés par le Capital et nous n'avons pas d'autres choix que de déconstruire nos croyances et les buts de notre existence. Nous allons devoir trouver comment donner du sens à la vie en dehors de tout désir matériel, d'enrichissement ou de pouvoir. L'Événement en soi n’est qu’un accélérateur à ce qui devait inéluctablement arriver : l'effondrement du Capital. Pour ma part aujourd'hui je ne me pose pas la question des origines du phénomène que nous avons nommé « Événement ». Car nous n'avons pas de recul, nous n'avons que des hypothèses, et or le fait de savoir qu'il cible des gens de pouvoir qui étaient responsables d'écocide, de guerre, de génocide, il ne nous donne pas de mode d'emploi sur comment nous, les autres, allons survivre à l'effondrement d'un système mondialisé. Et selon moi, la priorité c'est bien de savoir comment nous allons survivre. »

   Un sociologue poursuit : « Je ne suis pas d'accord avec vous sur le fait de ne pas chercher, dès à présent, d'explications à L'Événement. Dans cette période aussi absurde qu'incertaine, les gens ont besoin de réponse sur ce qu'il se passe. À minima des hypothèses auxquelles se raccrocher. Toutes nos sociétés à travers les siècles ont été bâties sur des croyances pour donner un sens et un cap à notre existence. Que ces croyances soient religieuses, politiques ou scientifiques. Croire en un dieu pour donner du sens à notre passage sur terre ; Croire que la démocratie passe par le fait d'élire des maîtres en leur déléguant un pouvoir économique, social, législatif sur nos vies nous conférant ainsi l’impression que « tout est sous contrôle » ; Croire en la science alors qu'elle n'a cessé de se tromper, de changer, de se corriger à mesure que la technologie évoluait. L'humanité a besoin de croyances pour se repérer et avancer. Et voilà qu'aujourd'hui, du jour au lendemain, plus personne ne veut du pouvoir craignant d'être le prochain sur la liste de L'Événement... c'est inédit comme situation, à l'opposé des systèmes que nous connaissions depuis des siècles et sur lesquels nous nous sommes construits au fil des générations. Alors, en même temps que nous allons tenter de survivre dans ce nouveau monde, il va falloir continuer de se questionner sur les origines de L'Événement... c'est une quête de sens. »

   Un écologue surenchérit : « Si nous évoquons ici les hypothèses de l’origine de l’Événement, je ne peux m’empêcher de penser, à en juger par les causes des décès des anciens « maitres du monde », que la Nature a fini par identifier et éradiquer elle-même ceux qui, au nom du profit et de la croissance, voulaient la détruire, ceux qui voulaient épuiser ses ressources jusqu'à la dernière goutte. A-t-elle voulu rétablir l'équilibre ? Le Capitalisme nous avait habitués à ce que ce soit toujours les mêmes qui trinquent, ceux qui vivaient dans les pays les plus pauvres et mourraient par milliers dans des incendies, des inondations, des guerres, de virus, de famine, de soif. Des catastrophes provoquées par des industriels, des politiques avides de pouvoir et de richesses se foutant des conséquences de leurs actions militaires ou écocidaires. Et le 1er septembre 2026, ce que l’on nomme la Nature a peut-être fini par perfectionner sa "pensée" et a ciblé les problèmes en les éradiquant et on peut sérieusement se poser la question : est-elle dotée d’une conscience capable de contrôler les éléments ? ».

   Le présentateur, quelque peu énervé, reprend la parole : « Mais vous oubliez les dommages collatéraux ! Suite à l’Événement et à l’effondrement du système, il a eu des émeutes à travers le monde entier et elles ont engendré des morts ! ».

   L’écologue reprend : « Mais ce n’est pas l’Événement en lui-même qui a ciblé ces personnes. Les émeutes sont survenues après des tentatives de putsch ou l’imposition de la loi martiale dans certains pays. Ces victimes sont donc bien celles du Capital, celles d’Hommes qui ont ENCORE voulu s’approprier le pourvoir par la violence ».

   Sur le plateau, le prêtre, l’imam et le rabbin se regardent interloqués. Eux, qui avaient écouté avec attention le débat sans intervenir, ne tenaient plus en place. Le prêtre se lance et prend la parole : « Il est évident que c’est l'œuvre de Dieu. L'Événement est lié à une volonté divine de rétablir l'équilibre, la justice et la paix. Tous les jours, des milliards d'êtres humains de toutes les croyances se rejoignent pour prier Dieu et à chaque heure, ils sont de plus en plus nombreux. En tant que représentant de Dieu, et je parle aussi aux noms de mes frères ici présents, nous n'avons jamais observé autant de fraternités entre croyants de différentes religions ». Les deux autres religieux acquiescent.

   Nous écoutions l’émission avec une grande attention, essayant d’ouvrir nos esprits aux explications sur un phénomène que nous aurions été incapables d’envisager deux mois auparavant. L’Événement avait fait voler en éclat tout ce que nous pensions savoir autant sur un plan scientifique que spirituelle. Et aujourd’hui, il n'était pas plus invraisemblable de croire que la Nature était dotée d'une conscience que de croire en Dieu.

Mais alors que nous étions absorbés par les débats mêlant sciences et religions, tout d’un coup : plus de son, plus d’image, écran noir :

No signal.

À suivre...

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