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Billet de blog 20 septembre 2025

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La lettre ouverte de la honte

Depuis leur résidence luxueuse, à 5000 kilomètres des bombes et des massacres de dizaines de milliers de civils, des bourgeois ont pris leur plus belle plume pour écrire une lettre ouverte à Emmanuel Macron afin qu'il s'oppose ce lundi à la reconnaissance de la Palestine.

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   Hamas. Hamas. Hamas. Quand les partisans d'Israël ne calomnient pas les soutiens de la Palestine d'antisémites, ils leur reste la carte du Hamas et des otages. C'est alors que dans le journal le Figaro, "des personnalités" ont publié une lettre ouverte destinée au Président de la République pour empêcher la reconnaissance de la Palestine ce lundi tant que le Hamas ne procédait pas à la libération des otages Israéliens. Les signataires de cette lettre de la honte oublient sciemment de dire que c'est Israël qui a rompu la trêve le 18 mars 2025, que c'est Israël qui a refusé d'appliquer la deuxième phase de l'accord qui prévoyait le retrait de ses troupes de la bande de Gaza et la libération des derniers otages israéliens, puis qui a interdit à partir du 2 mars le passage de l'aide humanitaire vers l'enclave palestinienne. Les otages ne sont qu'un prétexte pour continuer le génocide et in fine coloniser la Palestine. En avril 2025, Smotrich, Ministre des finances israélien, déclarait : "il faut dire la vérité : ramener les otages n'est pas le but le plus important". Selon lui, l'anéantissement du Hamas doit primer sur le retour des otages captifs encore détenus à Gaza. Déjà fin 2023, des colons en Cisjordanie affichaient publiquement leur opposition sur l'accord de libération des otages argumentant que la priorité était "d'écraser Gaza". En mars 2025, le président Isaac Herzog se disait lui-même "choqué" que la libération des otages ne soit plus une priorité. Ce désintérêt pour les otages provoque de nombreuses manifestations dans la société israélienne. Comme par exemple le samedi 24 mai 2025 dans la soirée , des manifestations avaient éclaté après la nomination par Benyamin Netanyahu d’un chef du service de sécurité intérieure s'opposant ouvertement à tout accord d’échange entre des otages et "prisonniers" palestiniens.

   Selon les signataires de la lettre de la honte, les vies de plus de 1,5 millions de personnes palestiniennes valent moins que celles des 49 otages israéliens. Yvan Attal, Charlotte Gainsbourg, Philippe Torreton, Bernard-Henri Levy, Raphaël Enthoven, Arthur, Dominique Reynié, Alain Minc, Joann Sfar... les mêmes qui ne se sont jamais indignés des otages Palestiniens détenus par Israël ou qui n'ont même jamais qualifié de terroriste l'armée israélienne. Oui, je dis bien otages. Remettons du sens dans les mots : « Plus de 500 enfants palestiniens sont envoyés, chaque année, en prison par les autorités israéliennes. Dès l’âge de 12 ans, ils peuvent se retrouver devant une cour militaire. Illégales, ces conditions d’incarcération se sont encore durcies depuis le 7 octobre ». « Israël et territoires palestiniens occupés. Des détenu·e·s palestiniens sont soumis à des actes de torture et des traitements dégradants, sur fond de multiplication des arrestations arbitraires ». (Amnesty International). Comment ces civils arrêtés arbitrairement, détenus illégalement et torturés peuvent-ils être qualifiés de « prisonniers » ? Ceux que l'on s’évertue à appeler « prisonniers palestiniens » servent de monnaie d’échange pour faire libérer des otages israéliens, et c’est précisément cela la définition d’un otage : « Personne qu'une armée, un gouvernement livre à la partie adverse ou détient, en garantie de l'exécution d'un traité, d'une promesse.» 

  Israël est un État terroriste. La décision-cadre du Conseil européen du 13 juin 2002 relative à la lutte contre le terrorisme propose une définition du terrorisme dont certains points devraient retenir notre attention : 
• le fait de causer des destructions massives à une installation gouvernementale ou publique, à un système de transport, à une infrastructure, y compris un système informatique, à une plate-forme fixe située sur le plateau continental, à un lieu public ou une propriété privée susceptible de mettre en danger des vies humaines ou de produire des pertes économiques considérables ;
• la capture d’aéronefs et de navires ou d’autres moyens de transport collectifs ou de marchandises ;
• la libération de substances dangereuses, ou la provocation d’incendies, d’inondations ou d’explosions, ayant pour effet de mettre en danger des vies humaines ;
• la perturbation ou l’interruption de l’approvisionnement en eau, en électricité ou toute autre ressource naturelle fondamentale ayant pour effet de mettre en danger des vies humaines.

   Terrorisme israélien. Des éléments factuels. Pour rappel Israël a bombardé la Palestine, l'Iran, le Liban, le Qatar, la Syrie, le Yémen en ciblant volontairement des civils. Les dirigeants israéliens ont pris la parole publiquement sur leur projet de colonisation (le " Grand Israël") sur fonds de délires messianiques et d'idéologie suprémaciste. Le mercredi 17 septembre, le ministre des Finances ultranationaliste Bezalel Smotrich a déclaré que la bande de Gaza était une « mine d’or » immobilière potentielle et qu’il était en pourparlers avec les États-Unis sur la manière de diviser l’enclave après la guerre, réaffirmant ainsi clairement le projet colonial et de nettoyage ethnique. Plus de 640 000 Palestiniens ont été déplacés de force à Gaza depuis le mois de mars 2025. 1,5 millions vont être jetés dans un camp de concentration faussement nommé "ville humanitaire", 100% des Gazaouis sont menacés par la famine. Plus de 85 000 tonnes de bombes ont été larguées sur ce territoire de 360 km2 [trois fois la superficie de Paris] entre octobre 2023 et décembre 2024. Plus de 90 % des infrastructures ont été détruites et près de 70 % des zones agricoles ont été rasées. Une étude publiée dans le journal scientifique The Lancet estimait déjà en juillet 2024 le nombre total de morts à 186 000. On serait donc a minima autour de 200 000 morts, soit 8 à 10 % de la population de la bande de Gaza. Et non, je ne reprendrai plus le chiffre "officiel" faux de 60 000 morts qui arrange tant les partisans d'Israël tant il est sous-évalué puiqu'il ne prend ni en compte les personnes disparues, les personnes mortes de maladie ou de la famine. L'armée israélienne tire sur les Gazaouis qui tentent désespérément d'accéder à l'aide alimentaire et arrêtent dans les eaux internationales des civils apportant de l'aide humanitaire. Plus de 210 journalistes et plus de 410 humanitaires ont été assassinés à Gaza. Netanyahou est SOUS MANDAT D'ARRÊT DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE. La commission d'enquête de l'ONU vient de reconnaître officiellement le génocide. 

    Le gang des signataires de la lettre de la honte sont les mêmes qui nous disent :  «Il n’y a AUCUN journaliste à Gaza. Uniquement des tueurs, des combattants ou des preneurs d’otages avec une carte de presse» comme ce cher Enthoven. Ou encore qui affirment que : "Depuis 1948, les Palestiniens se sont construits en miroir d’Israël et ont voulu se réapproprier notre histoire. Ils ont envie d’être nous. Même notre Shoah, ils nous l’envient. Ils veulent absolument un génocide. Mais pourquoi ? Parce qu'ils pensent que le monde nous a donné Israël après la shoah, donc après un vrai génocide. Donc ils se disent on va émouvoir le monde en disant que nous aussi on est victime d'un génocide et on va nous donner des territoires" comme ce cher Yvan Attal. Ou qui instrumentalisent la lutte contre l’antisémitisme pour museler celles et ceux qui dénoncent les crimes contre l'humanité commis par Israël comme ces chers Arthur, Sfar, Terreton... Alors si, dans cette lettre ouverte, vous y voyez des messages de paix, ne vous y trompez pas : quand on conditionne la reconnaissance d'un État à la libération de 49 otages au mépris de la vie de plus de 1,5 millions de personnes en proie à un génocide, c'est ni plus ni moins qu'une hiérarchisation des vies humaines selon leur origine ethnique, du suprémacisme.

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