Charlie hebdo dans un dessin reprennant les codes racistes des fantasmes coloniaux s'en prend à Rokhaya Diallo car, selon eux, elle "ridiculise la laïcité à travers le monde". Mais que dit Rokhaya Diallo sur la laïcité qui énerve tant Charlie ? Dans un interview sur France Culture, elle dit simplement que le dévoiement de la loi 1905 sur la laïcité a institutionnalisé le harcèlement de jeunes filles depuis 2004, pointant les circulaires successives qui permettent de considérer qu’un vêtement « puisse devenir un signe religieux par destination ». La journaliste évoque le risque d’un « profilage racial » lorsqu’« une robe identique sera perçue différemment selon que la jeune fille est présumée musulmane ou non ». Rokhaya Diallo souligne les effets sociaux et politiques des interprétations contemporaines : « La question, c’est quelle est la place des musulmans et musulmanes, et de quelle manière ils peuvent visiblement être musulmans tout en restant pleinement français. »
Et voilà que le Printemps Républicain vient au secours de Charlie Hebdo : selon eux, la caricature opposerait la lutte de Josephine Baker qui était "contre la partition de l'humanité en race et adhérant aux valeurs de notre République" et la lutte de Rokhaya Diallo appelant "à kiffer sa race et à "détester la laïcité". Comme vu précédemment, Rokhaya Diallo ne deteste pas la laïcité, elle denonce son récent dévoiement à des fins islamophobes ayant conduit à l'adoption de lois ségrégationnistes envers les musulman.e.s. Quant à la référence à Josephine Baker dans la caricature, encore une fois le Printemps Républicain se ridiculise. Baker était consciente d'incarner 'la sauvage'. Baker avec sa ceinture de banane se moque et ridiculise les fantasmes coloniaux. La réalisatrice Ilana Navaro dans son documentaire "Baker, première icône noire" explique : "Autour de ses reins, les bananes, symboles racistes par excellence, se transforment en trophées phaliques".
Je lis ça et là des critiques plus ou moins pertinentes sur Joséphine Baker et comment elle a, en partie, contribué à nourrir cet imaginaire colonial. Mais n'oublions jamais l'époque dans laquelle elle a évolué : comment pouvait-elle être parfaite en tant que défenseuse des droits des personnes Noires dans un occident où la ségrégation dominait, où les zoos humains existaient, où la femme noire n'était considérait que comme un objet, un bien ? Elle a fait comme elle a pu.
Revenons au dessin de Riss. Pour retrouver ce genre de "caricature", remontons aux années 30 : c'est aussi sous couvert de caricatures "humoristiques" que la propagande nazie a fait passer ses idées suprémacistes et antisémites. Il est incroyable qu'en France, en 2025, nous devions encore expliquer les préjugés racistes les plus basiques. Chers Charlies, vous pouvez continuer de dévoyer les mots "universalisme" et "laïcité" pour planquer votre racisme et votre haine des musulmans : on vous voit.
Soutien à Rokhaya Diallo
Illustration : Les Répliques
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