Spartacus 2022 (avatar)

Spartacus 2022

Romancier Jardinier et doux réveur

Abonné·e de Mediapart

125 Billets

0 Édition

Billet de blog 2 avril 2020

Spartacus 2022 (avatar)

Spartacus 2022

Romancier Jardinier et doux réveur

Abonné·e de Mediapart

Lutte des classes et COVID-19

Le golfeur fortuné de Neuilly a besoin de l'infirmier guadeloupéen de Montreuil qui lui aime le foot. « Les gens qui ne sont rien » sont en réalité les premiers de cordée. Ce sont les invisibles du quotidien qui font la France. Ces gens en ont marre d'être marginalisés. La révolte gronde. Ils veulent que cessent les inégalités d'une société capitaliste et foncièrement injuste.

Spartacus 2022 (avatar)

Spartacus 2022

Romancier Jardinier et doux réveur

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Lutte des classes et COVID-19

Souvenons-nous du Macron-Jupiter. Il était le chef emblématique d'une start-up qui nous montrait le chemin à suivre. À la tête des premiers de cordée, son parti devait relever la France et la mettre sur de nouveaux rails capables de lui faire affronter les dangers du XXIe siècle. Son arrogance et son mépris, à l'égard des « gens qui ne sont rien », ont ulcéré de nombreux français, pas assez cependant pour le discréditer entièrement. Il gardait, en effet, une popularité honorable. Cette crise inattendue rebat les cartes. Elle vient mettre à mal, pour l'instant, son discours superfétatoire sur la nécessité de réduire drastiquement le nombre de fonctionnaires tout en restreignant le champ d'action de l'état. Finie donc la privatisation d'ADP et la réforme si controversée des retraites. « Nécessité fait loi », dirait le législateur en signe de regret. Mais attention, le mégalo n'a pas dit son dernier mot. Je ne crois pas en effet à un revirement de sa politique économique. Il a trop à perdre auprès de ses amis. Et puis, comme il a si souvent fait, Jupiter reprend d'une main ce qu'il donne de l'autre et cela d'autant plus facilement que ce n'est pas son « pognon de dingue », mais le nôtre et, qu'il en fait par décision du prince, ce qu'il en veut. Cette crise révèle aussi un aspect des plus essentiels pour notre société, le rôle primordial des « gens qui ne sont rien ». Ce sont eux qui font la France. Ce sont eux qui vident les poubelles à cinq heures du mat. Ce sont eux qui soignent les malades dans les hôpitaux. Toujours eux qui restent confinés avec leurs patients dans les EHPAD. Encore eux qui, à la caisse des supermarchés, enregistrent nos achats. Cette France là est courageuse, solidaire, héroïque, bien plus que ne l'est celle qui boursicote, qui spécule ou qui rêve de vacances dans un palace 5 étoiles aux Bahamas. Il y a deux mondes qui se font face mais pour une fois, la France d'en-haut trouve d'énormes qualités à la France d'en-bas. Elle a besoin d'elle, de son dévouement, de son abnégation. Jusqu'à quand cette reconnaissance durera-t-elle ? Cela reste pour moi une inconnue.

L'idéologie macronienne est, dans son fondement, strictement libérale. C'est donc une conception politique et économique parfaitement logique qui interdit toute contradiction et privilégie le chacun pour soi à la manière des Lloyd's, compagnie d'assurance purement capitaliste où l'on s'assure pour soi-même. À l'inverse, le système de Sécurité Sociale français, qui est par essence solidaire, couvre les risques pour tous les assurés sociaux et davantage si nécessaire. Il y a donc d'un côté une vision individualiste et égoïste de la société, et de l'autre, un système solidaire et fraternel. Pour résumer Macron, on pourrait lui attribuer cette phrase, « Je pense donc tu suis ». Ainsi « les premiers de cordées » ordonnent et, « les gens qui ne sont rien » obéissent. Voilà que le COVID-19 montre ou démontre l'inintelligence d'une telle vision sociale. Nous avons besoin de chacun dans une vision solidaire de la société. Le « chacun pour soi » est suicidaire et n'amènera rien de bon. Il ne faut donc pas confondre la santé sanitaire d'une nation et la santé financière d'une entreprise, fut-elle assurée par les Lloyd's. Ces « gens qui ne sont rien » sont des salariés, des étudiants, des retraités, des fonctionnaires, des artisans et, dans leur grande majorité, les transparents du quotidien qui prouvent en cette période de crise la nécessité absolue d'être solidaires les uns avec les autres. Il n'y a pas besoin d'assurances privées pour cela. Le COVID-19 se moque de savoir si tu paies l'IFI ou si tu touches le RSA. Il se moque de savoir si tu vis à Neuilly ou à Montreuil. Le COVID-19 dédaigne la couleur de peau et d'origine. Elle touche sans distinctions les petits et les gros, les inconnus comme les artistes, les blancs et les noirs, les amateurs de foot ou de golf. En revanche, le golfeur fortuné de Neuilly a besoin de l'infirmier guadeloupéen transparent de Montreuil qui lui aime le foot. C'est peut-être un peu trop caricatural, et pourtant réfléchissez-bien à cette stratification de destins dans la société. On abolit uniquement les différences sociales quand l'existence devient d'une urgence vitale pour les plus fortunés. Lorsque Didier Lallement disait de son air arrogant à une Gilet Jaune « Nous ne sommes pas dans le même camp », je voudrais aujourd'hui qu'il pense sérieusement à l'indécence d'une telle phrase. Je ne lui souhaite pas d'être atteint du COVID-19 mais au cas où cela lui arriverait, osera-t-il demander à l'aide-soignante si elle fût, ou est encore Gilet Jaune ? Il en est de même du baqueux qui a éborgné une innocente. Il en est de même de Castaner qui ordonne de tels actes répressifs. Il y aura donc l'avant et l'après COVID-19 comme il y eut l'avant et l'après 11 septembre 2001. Cela nous montre qu'il y a réellement plusieurs France qui se côtoient et qui s'ignorent souvent. Celle qui soigne et celle qui maltraite. Le dire n'est pas un crime mais un fait. La France d'en-bas relève les manches. Elle se penche au chevet des malades. Elle accompagne les familles. Elle souffre. Elle pleure. Voilà la France que j'aime. Et l'autre France qui me fait horreur. Elle gaze. Elle matraque. Elle mutile. Elle s'accapare les richesses. J'ai choisi mon camp depuis longtemps, n'en déplaise à Lallement et à Macron. Je suis le fils de Jean Valjean et le frère des enfants du bagne de Belle-l'île.

La lutte des classes n'est pas une théorie mais une réalité bien plus grande qui dépasse les frontières de la France. Ne voit-on pas en effet les pays riches comme les Pays-Bas, l'Allemagne et, en partie la Finlande, s'opposer à une action commune avec l'Italie ou l'Espagne considérés comme des pays dispendieux. L'absence de solidarité européenne sera une faillite des institutions bruxelloises. Là aussi, il existe deux camps qui ont peine à se trouver ; le camp des pays riches et le camp des pays pauvres. Macron, qui n'est pas à un paradoxe près, dit vouloir convaincre Bruxelles d'agir en faveur d'une Europe solidaire. Ces paroles n'engagent que lui car après tous ses discours prononcés aussi bien à La Sorbonne qu'ailleurs, il est navrant de constater que les résultats ne sont pas à la hauteur des promesses faites. Par ailleurs, des voix en France s'élèvent pour expliquer qu'il est urgent de changer de système pour un système moins inégalitaire. Citons Thomas Piketty, Éloi Laurent, Thomas Porcher et dans un autre mesure, David Djaïz. En revanche, si ces promoteurs d'une nouvelle économie donnent des solutions, ils ne donnent pas les moyens politiques pour y parvenir. Est-ce par une issue pacifique ou par la violence d'une révolution que le monde sera meilleur ? Tout cela reste en suspens et dépend du niveau d'acceptation du peuple français et des autres peuples européens. « Les gens qui ne sont rien » n'auront pas toujours envie de suppléer aux incompétences et aux erreurs des « premiers de cordée ». Aujourd'hui, ils acceptent de se sacrifier pour que les nations demeurent mais si demain les riches ne prennent pas leur part du fardeau, il se pourrait qu'à la prochaine catastrophe comme par exemple une crise alimentaire, la lutte des classes entraîne des flots de sang dans les fossés nauséabonds de l'histoire. La seule vertu que je vois dans cette crise, est de mettre nos dirigeants politiques face à leurs responsabilités et à leurs obligations. La lutte des classes entre « les gens qui ne sont rien » et « les premiers de cordée » n'est donc pas morte. Le COVID-19 la remet simplement en lumière.

Spartacus 2022

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.