La grève est donc terminée dans les locaux du site internet de 20 Minutes. Après la descente expresse à Paris du vice-président de l'actionnaire norvégien Schibsted, un compromis a été trouvé avec la rédaction. Cette implication de la direction scandinave et la sortie de crise qui en a découlée sont en soi une remise en cause profonde de la gouvernance qui est aujourd'hui à l'œuvre dans le quotidien. Pour autant, on reste sur sa faim.
Pour mémoire, voici les deux billets précédemment publiés sur cette affaire (l'un sur son interprétation et son aspect hautement symbolique dans la presse française, l'autre sur les faits qui agitent actuellement un titre de presse composé de journalistes qui ne se satisfont pas de la marchandisation de l'information telle qu'elle va).
Le mouvement s'est donc achevé vendredi. Le plus important a été gagné, et ce n'est pas une petite victoire: le rédacteur en chef de 20minutes.fr initialement mis à pied brutalement a vu son honneur restauré. Selon le communiqué rendu public par les journalistes, qui ont (il est important de le rappeler) reconduit unanimement et à quatre reprises leur grève: «"Cet épisode ne va pas atteindre la réputation et l'honneur de Johan Hufnagel", nous a assuré Sverre Munck». Il n'est plus question de «faute lourde», et l'on attend avec intérêt les motifs qui vont être reprochés à Johan Hufnagel lors de l'entretien préalable à son licenciement vendredi 22 août prochain.
Je vous invite à lire une analyse très intéressante de ce qui se joue en ce moment quant à la vision de l'information à 20 Minutes, par Narvic sur le site Novövision. Le communiqué de sortie de grève des journalistes est disponible en cliquant ici.
Toutefois, maintenant que la direction de 20 Minutes a été aussi violemment désavouée par l'actionnaire qu'elle avait tenté de se débarrasser de Johan Hufnagel en plein mois d'août, une question demeure: pourquoi, s'il n'y a rien à lui reprocher, se séparer de celui que ses journalistes présentent comme «l'ADN» d'un site véritablement innovant dans le paysage du web-journalisme français?
Lundi doit avoir lieu une assemblée générale de la Société des journalistes de 20 Minutes (créée il y a un an, après la nomination de la directrice de la rédaction Corinne Sorin, en provenance d'un journal gratuit québécois -24h- et en remplacement du fondateur Frédéric Filloux). On y causera sans doute conception de l'information et gestion des ressources humaines. Mais si la rédaction a admirablement réussi à rétablir la morale en faisant manger son chapeau à ceux qui pensaient pouvoir traiter les journalistes comme des poins sur un jeu d'échecs, pourquoi n'obtiendrait-elle pas celui de conserver l'une de leur pièce maîtresse, plutôt que de la sacrifier sans raison?