« Nous proposons à la ministre de réduire le phénomène de pénurie en France en confiant au site de Famar Lyon, certains de ces médicaments en rupture. L’existence de capacités industrielles non utilisées sur le site de Saint-Genis-Laval sont à disposition pour répondre aux besoins sanitaires de milliers de patients en souffrance. » Cette proposition de l’intersyndicale CGT, CFE-CGC, FO de l’entreprise Famar à côté de Lyon est restée lettre morte depuis le 9 juillet.
Pourtant, la question est sérieuse. Le nombre de ruptures de stock de médicaments affectant les pharmacies comme les hôpitaux est passé de 44 à 868 entre 2008 et 2018 selon l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Tous les types de médicaments sont concernés, même ceux d’intérêt thérapeutique majeur (MITM). De plus, ces pénuries peuvent perdurer dans le temps : la moitié des médicaments ont manqué pendant plus de 60 jours, selon l’ordre des pharmaciens. Pour répondre à une crise montante, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé le 8 juillet la mise en œuvre de 28 mesures. Parmi elles : l’échange d’informations entre acteurs de la filière et une feuille de route pour un comité de pilotage devant commencer ses travaux après l’été. Celui-ci, réuni par la ministre pour la première fois le 23 septembre devra rentre ses premières conclusions en janvier.
Monopoly sur la production de médicaments
En attendant, la production pharmaceutique à Saint-Genis-Laval est sur la sellette. Dans cette commune, 300 salariés produisent et conditionnent de nombreux médicaments pour les laboratoires. Parmi eux, certains sont d’intérêt thérapeutique majeur comme la Teralithe, un antipsychotique produit pour Sanofi, ou la Disulone utilisée dans le traitement de la lèpre et de maladies auto-immunes. Les syndicats de l’entreprise pointent par ailleurs être le dernier site de production dans le monde sur lequel s’appuie l’Organisation mondiale de la santé pour la Notezine, un antiparasitaire. Pour autant, son placement en redressement judiciaire le 24 juin, avec une période d’observation de trois mois, n’a suscité aucune réaction de la part de la ministre.
Comment un tel site se trouve-t-il au bord de la fermeture ? La faute à des erreurs stratégiques et un Monopoly capitalistique à en croire les syndicats de l’entreprise. Anciennement Rhône-Poulenc, l’usine a ensuite été revendue par le groupe Aventis en 2004. Elle passe alors dans les mains du sous-traitant pharmaceutique Famar, propriété du groupe familial grec Marinopoulos. Le projet de ce dernier d’ajouter une ligne de produit cosmétique sur le site n’a jamais trouvé sa rentabilité financière. Il a été interrompu en 2015. De plus, frappé par la crise économique qui affecte la Grèce, le groupe Marinopoulos fait face à une procédure de sauvegarde lancée auprès de la justice hellène. Ses avoirs sont alors contrôlés par quatre groupes bancaires. Manquant de trésorerie, dans l’impossibilité de se fournir en matières premières, le site de Saint-Genis-Laval se trouve dans l’incapacité de produire pour honorer un carnet de commandes bien rempli, explique dans une lettre ouverte Yannig Donius, le secrétaire du comité d’entreprise et délégué syndical CGT de Famar Lyon.