Effectuant quelques recherches sur un sujet connexe, je suis tombé sur le blog de Craig Willy (vivement recommandé) et en particulier sur un de ses billets commentant l'un des discours de Draghi : http://www.craigwilly.info/2013/06/21/francais-mario-draghi-leuro-est-ordoliberal/#more-2153 ce discours démontre si besoin était, mais sans doute est ce utile à l'attention de ceux qui prétendent qu'une "autre politique" économique est possible dans le cadre de la zone euro, que le système monétaire de la zone euro est pleinenement conforme aux prinicpes de l'ordolibéralisme, c'est à dire à la conception allemande du libéralisme.
De l'ordolibéralisme allemand...
Il convient de rappeler que l'ordolibéralisme est une branche du libéralisme. On en trouvera une définition complète dans cet article de wikilibébral bien plus complet que l'article lacunaire de wikipedia : http://www.wikiberal.org/wiki/Ordo-lib%C3%A9ralisme Par rapport à d'autres variantes du libéralisme, l'ordolibéralisme se distingue par le refus de toute politique discrétionnaire et le primat donné aux règles qui doivent s'appliquer en toutes circonstances, sous peine de sombrer, soutiennent ils, dans des dérèglements, voire la dictature. Cette philosophie politique est dominante en Allemangne depuis la dernière guerre, la proscription de toute politique discrétionnaire du pouvoir politique, budgétaire ou monétaire, étant supposée empêcher la résurgence d'un régime tel que le IIIème Reich. La social démocratie allemande s'y est ralliée depuis longtemps. L'objectif que doit suivre l'Etat selon cette philosophie est de faire respecter "l'ordre" résultant des processus concurrentiels à l'oeuvre dans un cadre stable et d'y prêter main forte, le cas échéant, par une politique visant à empêcher que la libre concurrence ne soit fausée.
Leur premier exigence est l'existence d'une monnaie stable, garantie par une banque centrale indépendante dont l'unique mission est d'assurer la stabilité des prix. La deuxième, un "conservtisme fiscal" dont l'objectif est l'équilibre des comptes publics. La troisième une politique de régulation de la concurrence, également grâce à des intitution indépendantes investies de la mission de maintenir la concurrence. Ces prinicpes sont ceux sur lesquels repose le "modèle économique allemand" depuis 1948.
...à la constitution montaire de la zone euro..
La mise en place, au sein de l'union européenne, d'une zone monétaire unique avec une seule monnaie ayant cours légal, l'euro, présentait le risque, du point de vue allemand, de mettre en péril l'édifice monétaire sur lequel reposait l'Allemagne depuis la création du Deustsmark en 1948.
C'est pourquoi, les allemends ont exigé, et obtenu, que les principes qui étaient les leurs soient élargis à l'ensemble de la future zone euro: création d'un système monétaire piloté par une banque centrale indépendante (la BCE, intallée à Francfort), et même plus indépendante que n'importe quelle autre banque centrale, des banques centrales nationales subordonnées devant également être indépendantes dans les Etats membres de par la loi (ce fût chose faite en France en 1993), un objectif unique d'assurer la stabilité des prix, une interdiction d'acquérir des titres de dettes publiques des Etats membres, et des règles imposant le retour à des budgets publics équilibrés dans les différents Etats membres sous peine de sanctions, dorénavant quasi automatiques puisque si la Commission enclanche le dispositif de sanctions, il faut qu'un Etat qui prétendrait s'y soustraire réunisse une majorité qualifiée contre cette action de la Commision devenue garante de la trajectoire des politiques budgétaires des Etats vers la vertu que constituerait un budget public équilibré, sans considération du fait que le niveau des investissements publics est différent d'un Etat à un autre (notamment pour des raisons démographiques) ou des différences de taux d'épargne des ménages (acquéreurs des titres de dettes publiques si le budget n'est pas en équilibre et que l'Etat emprunte).
..la confirmation par Draghi..
Le 18 juin 2013, Mario Draghi a prononcé un discours à Jérusalem à l'occasion du départ de son collège de la banque centrale d'Israel, Stanley Fisher, dont le thème était : "repenser les limitations de la politique monétaire" : http://www.ecb.europa.eu/press/key/date/2013/html/sp130618.en.html L'objet prinicpal de ce discours était de se défendre des accusations, de provenance allemande, selon lesquelles l'adoption par la BCE de politiques non conventionelles, à la suite de celles de la Fed et de la banque d'Angleterre, était suceptible de metre en péril les fondations sur lesquelles reposent la BCE et l'Union monétaire.
Et à cette occasion, Draghi rappelle quelques évidences qui méritent d'être citées :
"In this context, it is worth recalling that the monetary constitution of the ECB is firmly grounded in the principles of ‘ordoliberalism’, particularly two of its central tenets:
First, a clear separation of power and objectives between authorities;
And second, adherence to the principles of an open market economy with free competition, favouring an efficient allocation of resources."
Et Draghi de se défendre que l'action non orthodoxe de la BCE, notamment par le biais de rachats indirects de titres de dettes publiques des Etats membres (OMT), constituerait une violation des prinicpes de l'ordolibéralisme : "Does the fact that our operations entail some credit risk on the balance sheet of the central bank imply a violation of our ordoliberal principles? Does it imply that the ECB policy interferes with credit allocation? My answer is no". Draghi explique ensuite pourquoi et les lecteurs pourront s'ils le souhaitent se référe au discours.
Sa conclusion est sans ambiguïté : "What must be clear from what I have said so far is what constitutes the limitations to our actions, consistent both with the letter of our mandate and with the philosophy of the market economy that underpins it".
..pour finir, une défense de l'union monétaire sur des critères purement politiques..
Enfin, à l'adresse des critiques extérieurs à l'UE, visant ici une large partie des économistes anglo-saxons, mettant en doute le bien fondé d'une monnaie unique dans une zone aussi hétérogène, Draghi reconnait implicitement l'absence de bien fondé sur le plan économique en mettant en avant des arguments purement politiques :
"When observers from outside look at our Economic and Monetary Union, they often emphasise how unfinished it appears compared with fully established unions such as the United States. In so doing, they highlight a number of unresolved issues, for example that in a monetary union of 17 otherwise sovereign states, a credit or transfer across Member States is viewed differently from a credit or transfer within an individual Member State. The equivalent of Target balances, for example, is a non-issue in the United States. However, such observers vastly underestimate the political capital invested in the euro by our leaders, as well as the political significance that such an investment has for the future of Europe".
....et de conclure, bien entendu, que si des progrès restent à accomplir, la prospérité est au coin de la rue comme le disait Hoover en 1932 :
"Of course, much work remains to be done for economic policy-makers across Europe. But I am confident that together we can build a stronger economic and monetary union that ultimately delivers jobs, growth and a return to prosperity for the citizens of the euro area".