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Billet de blog 11 septembre 2014

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A la racine de l'échec économique du Gouvernement

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ce billet reprend en les développant deux commentaires que j'ai publié sur le fil de l'article de Laurent Mauduit : "Economie : échec, confusion et amateurisme" :  http://www.mediapart.fr/journal/france/100914/economie-echec-confusion-et-amateurisme car il me parait possible et nécessaire d'aller plus loin dans l'explication de l'échec de la politique gouvernementale. Certes, elle a échouée, mais pouvait il en aller autrement et peut il en aller différement à l'avenir ?

Quand Hollande valide les promesses de Sarkozy...

Alors que le déficit public diminuait d'environ 0,5 point de PIB depuis 2010, une diminution lente mais réelle, il va augmenter en 2014 ce qui est le signe le plus patent de l'échec du Gouvernement puisque comme l'écrit Laurent Mauduit, il avait fait, certes à tort, de la réduction du déficit public sa priorité numéro 1, l'objectif devant à la fois supplanter tous les autres et rendre possible l'atteinte de ces derniers.

A dire vrai, il n'avait guère le choix puisque cette priorité découle directement du traité sur la stabililité la coordination et la gouvernance  (TSCG), dit traité Merkozy, qu' Hollande s'était empressé de ratifier après avoir promis de le renégocier. Lors de la campagne présidentielle en février 2012, Montebourg avait cru pouvoir dire que "ce traité ne sera jamais ratifié", qu"une emajorité de gauche ne le votera jamais" et quril en ira de même dans d'autres pays, citant entre autres l'Irlande et le Royame Uni. Il ajoutait que "ce traité inflige l'austérité à toute l'Europe et nous plonge dangeureusement dans la récession" (http://www.europe1.fr/politique/le-traite-merkozy-ne-sera-jamais-ratifie-ps-958987) . De fait, c'est bien ce traité qui impose aux Etats membres de se doter d'une programmation budgétaire à moyen terme, d'un observateur indépendant de surveillance et d'alerte (en France, le Haut Conseil des Finances Publiques) et de réduire leurs déficits publics selon un calendrier négocié avec Bruxelles, la Commission étant doté du pouvoir de demander à un Etat de revoir son projets de budget et de sanctionner les contrevenants éventuels avec des amendes pouvant aller jusqu'à 0,5 point de PIB, soit s'agissant de la France, 10 Md€ environ.   

Il faut souvenir que la trajectoire de réduction rapide des déficits promise par Hollande lors de sa campagne résulte d'un choix purement politicien qui n'est pas rappelé dans l'article de Laurent Mauduit : pour coincer le PS, peu avant de quitter le pouvoir, Sarkozy avait transmis à Bruxelles une trajectoire prévoyant un retour à 3% dès 2013 et la suppression à terme de tout déficit public : 0% dès 2016. Aubry avait estimé, à raison, cette trajectoire déraisonable et retenu un retour à 0% en 2017, soit un an de décalage.

Afin de faire passer cette dernière pour une dépensière laxiste, Hollande avait pris position pour le maintien de la trajectoire fixée par Sarkozy, soit 2016. L'argument avait porté : Hollande avait réussi à se faire passer pour plus sérieux qu'elle. On voit les résultats..

Il y a bien plus grave...

Mais il y a plus grave. Certes, Hollande a réussi à tuer la demande intérieure en augmentant massivement les impots, en pure perte puisque le déficit ne baisse pas pour la raison indiquée par Laurent Mauduit : la politique budgétaire restrictive mis en oeuvre a contribué massivement à réduire le rythme de l'activité économique, donc à baisser les recettes publiques.

Mais on cite perpétuellement le cas de pays, Canada et Suède en particulier, ayant réussi à réduire leurs dépenses et leurs déficits publics dans des conditions satisfaisantes dans les années 90. Ce que l'on cache, c'est que leur politique a pu réussir car une condition nécessaire a été remplie : ces pays ont simultanément laissé filer leur monnaie permettant à la demande extérieure de compenser l'impact récessif de leur politique budgétaire. On cite également le cas de l'Allemagne depuis le début des années 2000, mais ce pays a bénéficié d'un taux de change également favorable car, pour l'Allemagne, l'€ n'était pas surévalué depuis 2001, mais sous évalué comme le montre la croissance pharamineuse de leur exédent extérieur : 6% du PIB aujourd'hui.

Rien de tel pour la France pour qui l'€ est surévalué comme le montre la croissance continue du son déficit extérieur, plus de 3% du PIB, et la baisse continue de sa part de marché dans le monde.

Ceci veut dire que si la France ne dévalue pas, autrement dit, ne rétablit pas le franc, aucune politique budgétaire qu'elle qu'elle soit ne pourra permettre que la croissance reparte et que le chomage diminue. Aucun pays dans le monde n'y est parvenu avec un taux de change surévalué. Jamais..

Le coeur du problème est donc bien l'euro, une vérité que ne veut regarder en face aucun dirigeant politique, ayant tous investi leur capital politique dans l'€ dont ils avaient promis monts et merveille (voir leurs propos sur le premier billet de mon blog), et qu'ils ont d'autant plus peur de se dédire et de reconnaitre leur erreur qu'ils craignent de donner raison à Le Pen qui effectivement, sur ce point, a raison..

C'est également ce que les dirigeants français avaient fait dans les années 30, la France ayant été le dernier pays a abandonné l'étalon or, en 1936, contrainte et forcée, après que tous les autres pays l'eurent fait.

L'attachement fétichiste à l'€,(que l'on peut conserver comme monnaie commune) est la racine du problème. 

Perseverae diabolicum, mais pourquoi ?  

Il y a plusieurs éléments de réponse..Le premier est l'attachement de la quasi-totalité des dirigeants politiques à ce que j'appelle le fétichisme monétaire, c'est à dire une monnaie forte, c'est à dire une monnaie surévaluée.

Cela remonte à loin et les gens ont tendance à y croire....Certains d'entre eux, à commencer par le père contemporain de cette idée, Raymond  Barre, estiment meme que c'est le moyen de contraindre les français à faire des efforts de productivité qu'ils ne feraient pas s'ils n'y étaient pas contraints. Ensuite, il y a le lien entre l'€ et l'UE : les européistes expliquent sans relache que "la fin de l'€, c'est la fin de l'UE" qui s'en passait pourtant fort bien avant la mise en place de la monnaie unique. Enfin, il y a l'ignorance pure et simple. Il y a 15 jours, le président de la Bundesbank a donné une interview au Monde ou il dit qu"une Europe forte et un € fort vont de pair" : http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/08/13/pour-la-banque-centrale-d-allemagne-paris-doit-donner-le-bon-exemple_4470757_3234.html?xtmc=president_de_la_bundesbank&xtcr=8

Personne n'a relèvé cette ânerie. En fait, un € fort, c'est une Allemagne forte..

Mais il n'y a pas que cela. L'€ induit des effets redistributifs. Les emprunteurs, les grandes entreprises et les Etats y gagnent car ils peuvent emprunter à plus bas taux compte tenu de la garantie implicite de l'Allemagne, les banques également du fait de la garantie de moins en moins implicite de la BCE, de meme que tous ceux qui voyagent à l'étranger ou y achètent des actifs, financiers ou immobiliers. Les classes dirigeantes ont donc intéret à l'€. 

Les perdants sont les PME, tous ceux qui essaient d'exporter alors que leurs produits ne peuvent être vendus à des prix surélevés n'étant pas suffisament haut de gamme par rapport aux produits allemands pour pouvoir le supporter, les salariés des entreprises qui ferment en conséquence, etc..

Entre les uns et les autres, le choix politique est vite fait..et la France a vu sa part de marché divisée par 2(!) depuis vingt ans que l'on poursuit cette politique de change : alignement sur le mark ("politique dite du franc fort"), entrée dans l'€ avec une parité FF/€ surévaluée (présentée comme une necessité pour "se qualifier pour l'€"), puis "défense de l'€" coute que coute...

Les marchés financent le déficit public français car les liquidités sont pléthoriques, grace notamment à la BCE et qu'ils n'ont pas tant d'opportunités de placer leur argent de façon sure, alors 2%, ce n'est pas si mal..

Nous n'avons pas besoin de protectionisme, sauf sur quelques cas stratégiques ponctuels, ni de contrôle des changes. mais nous avons impérativement besoin d'un changement de parité monétaire, ce qui suppose le rétablissement d'une monnaie nationale.

A défaut, la majeure partie de ce qui subsite de l'industrie française disparaitra inéluctablement. Ne subsisteront que les secteurs à très forte valeur ajoutée, l'aéronatique par exemple, ou les produits pouvant sans trop de dommage être vendus plus chers : les grands crus, les parfums et quelques autres productions ou la baisse des volumes exportés peut être compensée par le haut niveau des prix...

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