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Billet de blog 13 septembre 2008

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Sentence arbitrale au pays des sports

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Dans son audition relative à "l'affaire tapie" ayant défrayé la chronique dans une presse unanime à faire le refaire le procès à charge de l'ancien ministre homme d'affaire (1), le professeur Clay, dans sa brillante plaidoirie sur l'arbitrage, a oublié d'en dire un mot sur son utilisation habituelle (et même obligatoire s'il me semble) dans le domaine des sports qui comprend pourtant des enjeux financiers énormes. Il est vrai que le sport est un domaine fort peu commenté par les juristes (peut être rarement sportifs). Pour combler cette lacune, je voudrais ici faire connaître une jurisprudence du Tribunal arbitral des Sports sur les conséquences financières de la rupture unilatérale de son contrat par un footballeur professionnel.

Il s’agissait d’un litige entre un joueur professionnel de football qui avait eu le tort de refuser les propositions de son club pour un nouveau contrat. Demeurant “au frigo” après ce refus, le joueur n’a pas eu d’autre solution que de rompre unilatéralement son contrat pour trouver un nouveau club.

Las, l’ancien club a demandé que le joueur et le nouveau club le paiement d’une somme astronomique de 4 680 000 livres comprenant notamment la valeur résiduelle de la dernière année de contrat, mais aussi la perte d’une chance de recevoir une indemnité de transfert et le profit réalisé par le joueur avec son nouveau contrat.

Le TAS rejette les prétentions du club. Pour lui, “l’indemnité ne doit pas être punitive pour l’auteur de la rupture, ni permettre un enrichissement pour celui qui l’a subi”. Dans ces conditions, seule une indemnité correspondant à la valeur résiduelle du contrat pouvait être mis solidairement à la charge du joueur et du nouveau club. Exit la perte d'une chance de recevoir l'indemnité de transfert !Coup de tonnère dans le monde des transferts sportifs !

Cette décision, si elle accroît la liberté des joueurs de football est une mauvaise nouvelle pour les clubs, qui peuvent ainsi subir des pertes importantes (pas d’indemnité de transfert, indemnité inférieure à celle qu’il a fallu payer pour acquérir le joueur…). Cela étant, nous explique les auteurs, ils ont la possibilité de trouver des parades, en augmentant par exemple la durée des contrats jusqu’à 5 ans (durée maximale), en proposant des salaires plus encore élevés (toutes mesures ayant pour effet d’augmenter la valeur résiduelle des contrats) en renégociant de façon précoce les contrats tous les 2 ans pour les joueurs âgés de moins de 28 ans et tous les ans pour les plus de 28 ans afin de bénéficier de nouvelles périodes protégées (si nous avons bien compris, pendant ces périodes protégées, il ne peut y avoir de rupture de contrat hormis pour faute. ces périodes sont différentes selon l’âge des joueurs). Enfin, ils ont aussi la possibilité d’insérer des clauses pénales, c’est à dire des indemnités contractuelles.

Rien de révolutionnaire donc. cela ne va pas boulerser l'économie du sport professionnel. Mais ce n'est que justice.

Sources : quotidiens Les Petites Affiches, article de Nicolas Morelli et Benoît Biancheri. Billet initialement paru dans Lex Libris, avec un contenu légèrement différent.

(1) j'essayerai de rendre compte des erreurs juridiques journalistiques communément commises dans cette affaire sur l'édition "prendre le droit au sérieux", la forme juridique commnandant le fond des analyses, leur bien fondé.

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