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Billet de blog 25 juin 2009

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Nouveau "pataquès électoral" à Perpignan ?

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Après la décision du Conseil d’Etat de confirmer l’annulation du dernier scrutin municipal de Perpignan, consécutif à la « fraude à la chaussette », le premier tour des nouvelles élections ont eu lieu dimanche dernier. D’ores et déjà, la réélection de la liste conduite par le maire UMP sortant, Jean-Paul Alduy, apparaît assurée.

En effet, elle a réussi à consolider son avance avec 40,35% des suffrages, contre 24,75% pour sa principale concurrente de gauche et 14,19% pour la liste « divers gauche, Verts MODEM. Surtout, contrairement à 2008, le FN, avec 9,42% des voix, n’est pas en mesure de se maintenir.

Dans ces conditions, à moins d’un retournement surprenant lié à une mobilisation importante des abstentionnistes en faveur de la gauche, la victoire de la droite classique apparaît assurée dimanche prochain. D’autant plus que la liste divers gauche a décidé de se maintenir. Les résultats, dans ces conditions de triangulaire, risquent même d’être largement favorables à l’UMP.Il reste que les conditions du maintien de cette liste ont été contestées.

En effet, deux des candidats, membres du MODEM, ne voulant pas être accusés de faire le jeu de la droite et refusant la perspective (hypothétique) de suffrages d’électeurs ayant voté à en faveur de l’extrême droite au premier tour ont décidé de se retirer. Ce retrait leur a été refusé par le candidat tête de liste, qui a bien été enregistré en préfecture des Pyrénées Orientales, comme le rapporte cet article de Rue89. Le journaliste s’interroge : « si ces deux candidats souhaitent se retirer de la liste, il doit bien exister un moyen pour qu’ils le fassent, non ? Nos recherches dans le code électoral n’ont rien donné sur les modalités du « retrait volontaire » évoqué dans l’article L267. »

Qu’il me soit permis de lui répondre ici. Non, les retraits individuels ne sont pas possibles. Que nous apprennent en effet les dispositions sur les déclarations de candidature du code électoral ? L’article L 265 précise que la déclaration est faite « collectivement » pour chaque tour par la personne ayant la qualité de responsable de la liste (en général, bien que cela ne soit pas obligatoire, la tête de liste). Auparavant, ce responsable de la liste a pris soin de faire signer par l’ensemble des candidats un « mandat »signé de lui, confiant « au responsable de liste le soin de faire ou de faire faire, par une personne déléguée par lui, toutes déclarations et démarches utiles à l’enregistrement de la liste, pour le premier et le second tours ». Ainsi donc ce mandat pour effectuer les démarches d’enregistrement de la liste à la préfecture est valable pour les deux tours. Il n’a pas obligatoirement à consulter les membres de sa liste pour savoir si la liste doit être maintenue ou non (bien que la plupart du temps, c’est ainsi que les choses se passent). Et la préfecture n’a bien entendu pas à effectuer d’autres contrôles que ceux prévus par la loi.

Par ailleurs, si Pour chaque tour de scrutin, la déclaration de candidature comporte obligatoirement « la signature de chaque candidat, sauf le droit pour tout candidat de compléter la déclaration collective non signée de lui par une déclaration individuelle faite dans le même délai et portant sa signature », cette signature n’est pas exigée pour le second tour des listes qui ne sont pas modifiées au second tour : « Toutefois, les signatures de chaque candidat ne sont pas exigées pour la déclaration de candidature des listes qui ne procèdent à aucune modification de leur composition au second tour. »

La thèse de l’absence de possibilité de retraits individuels est corroborée par l’article L 267 du même code. D’une part, aucun retrait volontaire de liste ou remplacement de candidats n’est possible après le dépôt de la liste. D’autre part, et surtout, « Les retraits des listes complètes qui interviennent avant l’expiration des délais prévus à l’alinéa 1 du présent article pour le dépôt des déclarations de candidatures sont enregistrés; ils comportent la signature de la majorité des candidats de la liste. » Une fois queledélai de dépôt des listes a expiré, le retrait de la liste est impossible. Mais tant que ce délai n’est pas expiré, les demandes de retrait, que nous soyons au 1er ou au 2ème tour, sont toujours possibles. Mais elles doivent alors comporter la signature de la majorité des candidats de la liste concernée. Le Conseil d’Etat, par un arrêt du 29 juillet 2002, a même considéré que cette formalité de signature par une majorité de candidats était substantielle et entachait tout retrait la méconnaissant d’irrégulier. Mais en l’espèce, cette irrégularité n’a eu aucune incidence sur les résultats du scrutin.

Cette dissymétrie, pas de signature obligatoire pour le deuxième tour, mandat valable pour les deux tours du responsable de la liste, signature obligatoire de la majorité des candidats pour le retrait des listes montre que le retrait esseulé de candidats est impossible et une telle tentative nécessairement avortée peut même apparaître comme une manœuvre.

Lire aussi cet autre article sur les élections perpignanaises “après les chaussettes, les bulletins sous les aisselles”.

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