Le courage de nombreux parisiens, confrontés aux attentats de ce vendredi 13, mérite d’être salué. Certains ont sacrifié leur vie pour protéger leurs proches, d’autres l’ont risquée pour secourir des blessés alors que les fusillades se poursuivaient. Nous ne pouvons qu’applaudir, également, la prise en charge de la situation à la fois par les forces de l’ordre, les membres du Raid, les services médicaux et hospitaliers, les urgentistes, les pompiers, les psychologues… La mobilisation immédiate des réseaux sociaux, qui a soudain transformé la communauté internet en immense terre de solidarité, a montré que même au cœur du drame en train de s’accomplir, nos concitoyens ont su réagir avec intelligence et dignité, comme l’ont par ailleurs fait les membres du gouvernement. La vive émotion de François Hollande, s’exprimant à la nation la voix tremblante, trahissait l’incrédulité générale face aux évènements. Malgré l’extrême difficulté de la situation, la complexité à intervenir auprès des innombrables blessés et la barbarie des tueries, les identifications, réalisées sans liste préalablement établies, ont été aussi rapides qu’elles pouvaient vraisemblablement l’être.
La France dispose donc de ressources humaines, institutionnelles, logistiques et sociales extraordinaires. Le peuple de Paris, à travers son comportement, sa mobilisation, ses témoignages, a une fois encore montré au monde sa détermination à défendre, debout, son modèle de vie et de citoyenneté. Il a donné une leçon d’humilité à ceux qui voulaient le rendre vulnérable, et porter un coup fatal à la République. Ce sont exactement ces armes-là qu’il nous faut aujourd’hui utiliser pour affronter la menace terroriste qui s’amplifie.
Retisser le lien social pour extirper nos consciences du repli sur soi, c’est en effet contraindre les terroristes à s’exposer au grand jour. Connaître son voisinage, se parler à nouveau, partager des évènements de la vie quotidienne, municipale, locale, quelle qu’en soit leur nature : sportive, associative, sociale, politique, culturelle… Nous devons savoir ce qui se passe chez nous et autour de chez nous, parmi nos proches, dans notre commune, dans nos lieux de rencontres, d’échanges et de partage. Et parce que le langage reflète toujours, d’une manière ou d’une autre, l’intimité d’une personne, communiquer apparaît désormais plus essentiel que jamais. Qui côtoyons-nous ? Qui sommes-nous, nous-mêmes ? Quelle est notre place dans la société, et quel est notre degré d’intégration ? Connaissons-nous des gens, des autres, des jeunes, qui sont livrés à eux-mêmes tout en faisant semblant du contraire, alors que manifestement, nous pouvons deviner, à leurs attitudes, à leurs manières, à leur vocabulaire, à leurs idées, qu’ils sont en perte de repères, en colère ou en révolte face à un ennemi qui, pourtant, n’est pas le bon ? C’est là que commence l’unité nationale, dans nos quartiers, dans notre entourage, parfois dans notre famille.
Dès les premiers instants, le message a surgi : « Nous n’avons pas peur. » Alors commençons par prouver que nous n’avons pas peur de l’autre. Ne nous laissons plus diviser par de prétendus prétextes idéologiques fallacieux ou les ambitions politiques des uns et des autres. En ces journées de deuil national, et pour les mois, longs et difficiles qui nous attendent, nous devons nous montrer unis et fraternels au-delà des réactions partisanes. Faire corps dans l'enceinte de la République, et porter l'image d'une France une et indivisible.
Notre force, la solidarité
Les pouvoirs publics ont appelés, ce matin même, à la vigilance de chacun dans les transports publics. Mais c’est partout que nous devrons, à l’avenir, être vigilant. Nous devrons reprendre l’habitude de lier connaissance avec nos voisins, "ces étrangers"; avec nos collègues, jusque là superbement ignorés alors que nous les croisons tous les jours; avec les jeunes, enfin, qui fréquentent nos quartiers, nos rues, nos résidences, et auxquels, bien souvent, nous donnons le sentiment d’être invisibles ou inexistants.
Chaque citoyen de France, en s’ouvrant à l’autre, deviendra ainsi le meilleur rempart contre l’arbitraire du terrorisme.
Ce combat pour la prévention de nouveaux attentats, ni le pouvoir politique, ni la police, ni les services spéciaux, ni même l’armée ne pourront le mener seuls. Nous sommes des dizaines de millions, exposés à une poignée d’assassins qui croient nous mettre à terre à nous inspirant la terreur, parce que nous allons boire un verre avec nos amis, parce que nous allons voir un concert de rock ou assister à un match de foot.Nous continuerons. Nos regards croisés sur le monde et les gens qui nous entourent sont notre plus belle armure : vivre ensemble, c’est empêcher les terroristes de nous diviser tout en les obligeant à sortir de leur tanière, car nous ne le leur laisserons plus aucune place.