SYLVAIN MORAILLON
Président de la Ligue française des droits de l'enfant, président de l'Adua, vice-président de Violette Justice
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Billet de blog 18 nov. 2016

SYLVAIN MORAILLON
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QUE FAIRE DE LA JUSTICE ?

LETTRE OUVERTE DE L'ADUA ADRESSÉE A TOUS LES CANDIDATS A LA PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE

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Illustration 1

François Miterrand déclara un jour : « Si vous aimez la République, ne donnez jamais le pouvoir aux juges. » Il ajouta que ce serait un danger pour la démocratie. Les relations violentes entre les présidents de la Veme République et la magistrature doivent nous interroger sur la place et le fonctionnement de la justice dans notre nation. François Hollande, plus récemment, la décrivit comme une « institution de lâcheté ».Nicolas Sarkozy également en tant que président, n’eut de cesse d’en dénoncer les dérives, envisageant même la suppression des juges d’instruction, et certains députés, comme Henri Guaino ne mâchèrent pas davantage leurs mots en évoquant les magistrats au cours de ces dernières années.

Ce qu’il y a de choquant, dans ces prises de positions, c’est que notre Constitution confère au président de la République le statut de premier magistrat de France, et à ce titre, il connaît particulièrement bien, par la force des choses, l’institution et son mode de fonctionnement. Une étude a par ailleurs démontré que 75 % des français ne font aucune confiance au service public de la justice. Comment le pourraient-ils, d’ailleurs, après avoir découvert l’existence du mur des cons au sein du syndicat de la magistrature, ou après avoir entendu Éric de Montgolfier dire publiquement aux justiciables : « Vous ne pouvez pas demander aux juges de faire ce que vous-mêmes vous ne faites pas. » Il faudrait en déduire que les juges, tout en réclamant tous les pouvoirs, y compris sur les politiques, se dédouanent par avance de leurs exactions ou de leurs forfaitures, pourtant courantes dans la protection de l’enfance ou les tribunaux de commerce, au prétexte qu’ils seraient « des hommes comme les autres » (sic, toujours Éric de Mongolfier , le même qui mit Bernard Tapie en prison pour reconnaître, des années plus tard, qu’il ne disposait d’aucun argument réel justifiant son incarcération devant les caméras de télévision). On nage en pleine tartufferie.

La magistrature jouit aujourd’hui d’un pouvoir sans limite, et sans contrôle. Elle exerce en roue libre, se jugeant elle-même, c’est-à-dire jamais. Le CSM lui-même reconnaît que la procédure de sanction éventuelle est un parfait échec : les plaintes des justiciables à l’égard de leurs juges sont systématiquement mises au panier. Quant à la réalité dans les tribunaux, elle est encore bien plus tragique : un certain nombre de magistrats, sans foi, font également peu de cas de la loi et des textes de la République, qu’ils violent allègrement, sciemment, impunément. Les procès truqués ou falsifiés sont monnaies courantes, les voies de recours effectives sont une chimère puisqu’il est même des tribunaux où l’on s’arrange pour faire, tout simplement, disparaître des audiences d’appel. Des avocats menacés par des présidents de cour, ou enjoints de se taire, cela se voit aussi.

Des preuves qui disparaissent, des procédures uniquement à charge, des règles de droits élémentaires bafoués avec cynisme, comme le respect du contradictoire ou le droit à un procès équitable… Des trafics d’influence pour éteindre des procédures gênantes s'initient jusqu’à la cour de cassation, ou plus haut encore , à la CEDH… Ne parlons même pas des procédures baillons pour faire taire les lanceurs d’alerte. Il faudrait plusieurs tomes, aujourd’hui, pour décrire les abus, les dérives et les dysfonctionnements constatés au sein de la justice. Or, la France, en s’abandonnant à ses juges, paie un lourd tribu : entreprises ruinées, familles détruites, tutelles abusives, tolérance extrême face à certaines formes de délinquances plus graves que d’autre, les violences sexuelles sur mineurs par exemple… Le coût social est incommensurable.

Tant et si bien qu’il est courant d’entendre des avocats dire qu’ils réfléchissent au contenu de leur plaidoirie non pas en référence à une certaine logique de la justice et des lois, mais en prévention de ce que pourrait penser et décider le juge. Histoire de ne pas le « froisser ». A ce stade, ce n’est plus de la tartufferie, c’est le règne de la terreur. Aussi, il est difficile aujourd’hui de trouver un avocat qui ne soit pas aliéné par la peur, qui soit libre de ses pensées et donc disponible à défendre correctement, voire honnêtement son client. Nombres de justiciables dépensent des sommes astronomiques pour tout simplement perdre leur cause ou leur procès d’avance. Cette situation est intenable, inadmissible et scandaleuse.

Les italiens ont, eux, mis en place une législation qui permet de sanctionner durement les juges lorsqu’ils commettent des fautes. Aux Etas-Unis, quiconque viole la loi est punissable, qu’il soit citoyen ordinaire, élu ou magistrat. Le principe d’égalité devant la loi est respecté, alors qu’il ne l’est pas chez nous. En France, la loi n’est pas la même pour tous, puisque trop de juges en fonction s’arrogent le droit de récrire, de réinterpréter les textes ou plus souvent, de les ignorer totalement.

Cela ne peut plus durer. Les récentes révélations sur le dossier d’instruction à l'encontre de M.Farouk Ben Abbes ont démontré que la justice savait depuis environ cinq ans que le Bataclan était visé. Le magistrat n’a prévenu personne, et surtout pas le Bataclan, qui aurait pourtant pu prendre des mesures effectives pour sa protection. La toute-puissance dont se sentent investis les membres de l’ordre judiciaire est un danger qui a dépassé depuis longtemps son seuil critique. Que l’on parle de placements abusifs, du scandale des tutelles ou des tribunaux de commerce, du terrorisme ou de la corruption, l’institution judiciaire est au centre des enjeux. Nous ne pouvons continuer à la laisser partir à la dérive, fonctionner en roue libre et espérer qu’en l’absence de contrôle et de sanction, des personnes jouissant d’un tel pouvoir permettront, par leur seul sens de l’éthique, d’équilibrer les choses. Les juges réclament toujours plus de moyens et d’indépendance, mais cette indépendance ne peut fonctionner à sens unique et surtout pas sans un organe arbitral indépendant . Les juges s’infiltrent dans chaque corps d’état, dans chaque ministère, chaque commission : ils veulent être partout sans que personne ne leur demande de compte nulle part. L’admettre, ou le laisser faire, c’est renoncer à l’état de droit.

S’agissant de la protection de l’enfance, certains juges ne connaissant pas ou mal les dossiers, en sont à répéter ce que les acteurs des services sociaux leurs demandent . Ainsi Force est de constater que les services sociaux sont de véritables états dans l’État. (La Cour des Comptes ne se lasse pas de dénoncer ces escroqueries).

L'injustice a toujours été le terreau des soulèvements et des révolutions . Nous ne cesserons de répéter que certains juges en méprisant l'état de droit , augmentent sciemment et gravement notre défiance à l'égard des hommes politiques , rendant ainsi notre pays ingouvernable , c'est pourquoi les juges qui n'accomplissent pas véritablement leur mission , qui violent les lois, doivent être sanctionnés voire exclus de la magistrature, et le cas échéant, incarcérés. Nous devons rendre à la loi son caractère sacrée, et à la justice des hommes son sens égalitaire. Cette justice sans foi ni loi à laquelle nous avons affaire aujourd’hui n’a pas sa place dans la République.

Alors , Madame, Monsieur , que ferez vous de la justice si vous êtes élu ?

ADUA :Association d’Entraide des Usagers de l’Administration des services publics et privés

366 ter Rue de Vaugirard-75015 PARIS- Bureau :4 Rue Amélie- BAL n°29-75007 PARIS. Site internet : www.adua.com

Association déclarée le 11 février 1985 à la Préfecture de Police : n°85/000464 sous dossier n° 00073351

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