Que de confusions y compris dans le billet initial !
1) la question de la révolution est toujours actuelle et Staline n'a rien à faire là .
Elle est actuelle dès qu'un systéme ( cad un ensemble complexe mais descriptible ) de rapports sociaux et historiques des êtres humains entre eux ne permet plus de développer les capacités humaines dans leur plénitude ( ce qui dépend des conditions historiques ) ; c'est , à défaut d'être le verbatim de K Marx ,le reflet de son idée fondamentale qui fut ensuite transformée voire dénaturée de diverses façons ; une révolution au sens précédent qui PEUT être accompagnée d'une révolution des "forces productives" au sens où l'entend K Marx mais ne lui est pas nécessairement liée , en tout cas pas nécessairement la précéder ni lui être concomittante , suppose de briser les entraves au développement des capacités humaines chez chacune , chacun et chez toutes et tous, individuellement et collectivement ;entraves qu'il convient d'identifier .
Une fois cette généralité générale admise, K Marx ne dit RIEN relativement à son inéluctabilité . Il ne dit RIEN quant aux méthodes qui sont susceptibles de la faire advenir ; ses réflexions sur la Commune de Paris qui servirent beaucoup - pas toujours à mauvais escient mais pas toujours à bon - mirent en évidence un aspect complétement nouveau sur quoi se cristallisa la réflexion des révolutionnaires d'hier ; à savoir qu'un pouvoir révolutionnaire c'est à dire voulant ACCOMPLIR les tâches de la révolution au sens précédent ne pouvait PAS se contenter de mettre ses pas dans ceux de l'ancienne machine coercitive de l'Etat telle qu'ils la trouvérent ; un pouvoir révolutionaire devait aussi faire éclater le cadre de l'Etat tel qu'il s'était justement constitué pour la perpétuation des rapports sociaux anciens.
Ces idées furent reprises in extenso et fidélement par V.I Lénine lequel se trouva confronté à des problémes immenses imprévisibles et que la vie ne lui donna pas le moyen d'approfondir comme sans aucun doute il l'eût souhaité . Il ya ici des pages à écrire qui nous éloigneraient du sujet mais ce rappel est indispensable .
Cela dit , la focalisation des révolutionnaires à la suite des bolcheviks russes sur l'idée fondamentale de K Marx rappelée ci dessus les fit se concentrer sur "la prise du pouvoir" avant de se concentrer sur le contenu de ce pouvoir ; il en résulta diverses conséquences dont tout le mouvement progressiste en France paye aujourd'hui encore le prix .
Aux difficultés majeures qui précédent , aux visions mécanistes et/ ou schématiques qui perdurent , s'ajoute évidemment un fait nouveau que personne ne pouvait prévoir ; d'une part le capitalisme a renforcé comme jamais auparavant son étreinte sur toute la planéte ce qui ruine l'idée définitivement du "socialisme dans un seul pays" , d'autre part il a créé par son développement même les conditions d'une situation catastrophique pour l'espéce humaine , catastrophe appelée changement climatique à lauquelle il est impensable de faire face individuellement ou isolément ; la France peut bien" être exemplaire" dans 20 ans , cela n'aura aucun effet si des mesures planétaires ne sont pas prises et ces mesures sont dans une large mesure INCOMPATIBLES avec le capitalisme tel qu 'il se conçoit lui-même aujourd'hui ; en gros , produire POUR LE PROFIT et PRODUIRE DU PROFIT SANS PRODUIRE , cette dernière tendance étant la plus lourde , et pour ce faire DISSOCIER ABSOLUMENT l'EXECUTION DE LA DECISION .
Du fait de la mondialisation capitaliste on peut induire faussement que, ou bien c'est l'ensemble de l'Humanité qui change de systéme EN MEME TEMPS ou bien elle y demeure sans espoir d'en sortir .
2) Il ne peut donc pas être question d'"Humaniser le capitalisme" ce qui est une contradiction dans les termes ; et il doit être question de savoir comment , par quelles voies nouvelles on peut s'en libérer.C'est ce que le Billet appelle justement "le dépasser" mais on n'a pas le sentiment que ses auteurs sachent exactement ce qu'il convient d'entendre par là .
La question du dépassement - en allemand AUFHEBUNG - est en effet centrale ; elle l'est dans les réflexions de VI Lénine sur l'ETAT qu'on n'abolit pas, mais qui dépérit .Il ne dépendit pas de lui que la réalité fût tout autre ; il ne s'y serait pas reconnu , ayant combattu à boulets toute forme de coercition SUR le pouvoir populaire incarné par les SOVIETS qui ne jouérent jamais après 1923 ( environ ) le rôle qu'ils eusent dû avoir; parler ainsi nous écarte à nouveau car il n'est pas question de résussir là où les révolutionnaires russes ont échoué .La réflexion sérieuse au sujet de la Révolution d'Octobre et ses suites est nénamoins incontournable si on ne veut pas être conduit à errer san fin.
Qu'est ce que le dépassement ? Dans l'acception qui est la nôtre ici il s'oppose catégoriquement au schéma de la voiture . Il n' a strictement rien en commun .
Le seul exemple significatif - et accessible en principe - qui me vienne à l'esprit est celui du DEPASSEMENT de la Mécanique newtonienne par la Relativité ( Restreinte et/ou Générale ) - Il ya une foule d'autres exemples mais ils demandent d'être plus introduits - . Ce dépassement n'est pas la négation au sens de l'invalidation de la mécanique Newtonnienne, ce dépassement ne met pas à la poubelle Newton ; au contraire , et à nouveau en fidélité avec K Marx , c'est la Mécanique relativiste qui PERMET DE COMPRENDRE la Mécanique Newtonnienne , de COMPRENDRE comment l'esprit humain s'est fait une représentation correspondant à son environnement matériel à une époque - longue - donnée caractérisée par les MOUVEMENTS LENTS . La Mécanique relativiste construit SUR NEWTON qu'elle DEPASSE sans la détruire .
3) Mais de même qu'il est loisible à l'esprit humain de se représenter des mouvements qui roulent sans glisser, de négliger les forces de frottement etc .. dans l'étude ANALYTIQUE de processus physiques , il ne peut venir à l'idée que le mouvement réel, LUI, soit conforme à ces constructions intellectuelles ; c'est pourquoi si ce qui précéde a un sens , l'analogie ne peut être poursuivie longtemps dans l'approche du processus révolutionnaire REEL qui, lui, contient des forces de frottement et beaucoup d'autres impossibles à lister et qu'il convient ABSOLUMENT de ne PAS NEGLIGER .
C'est pourquoi , à la fois , l'idée de dépassement du capitalisme est centrale et c'est aussi pourquoi elle ne saurait induire l'idée d'un passage sans frottements; par contre , l'analogie a un sens pour penser que les FORMES capitalistes pourront coexister sur une longue période avec des formes sociales qui s'en passent complétement ou semi-complétement , de même que la Mécanique newtonienne "suffit" pour l'étude des systémes dynamiques à vitesse lente .
4) L'étendue , la nouveauté sans précédent historique des questions posées à l'Humanité entière nécessite de repenser complétement les modes de pensée d'hier obsolétes aujourd'hui comme l'antagonisme supposé entre réforme et révolution ; ce qui est décisif est de savoir si telle réforme s'en prend au coeur du fonctionnement du capital- si elle l'affaiblit , lui porte des coups , ou si au contraire elle le laisse en paix, voire lui donne de nouvelles forces pour poursuivre dans la même voie .
5) Les formes du débat entre partisans d'un capitalisme différent et révolutionnaires ont elles aussi changé .En effet , il faut savoir si le capitalisme en tant que forme d'organisation socio-économique a ou non épuisé ses capacités historiques. Si c'est , comme je le pense , la seconde hypothése qui est la bonne et en dehors de mon petit esprit , mille et mille faits démontrent que l'Humanité est bien à un tournant de son histoire - ce qui n'a rien à voir avec une vision catastrophiste de l'histoire- par exemple on pouvait penser que le capitalisme saurait vivre en étant débarassé du racisme et on voit qu'il n'en est rien et que ce qui perdure n'est en rien une simple survivance et cependant personne n'imagine que les Etats Unis changeront demain matin de mode d'existence ou qu'à cause de ce vice fondamental , le capitalisme américain s'effondrerait sur lui-même - , donc si l'hypothése de l'épuisement historique du capitalisme est fondée , elle implique que TOUTE réforme visant réellement à développer les capcités humaines heurte de front la logique du capital . Il en résulte aussi qu'il n'existe pas de "troisiéme voie" au sens où on pourrait imaginer une sorte de compromis historique instable auxquelles se résoudraient vaille que vaille les forces du capital .
6) D'autre part et en même temps , il est manifeste que l'idée précédente selon laquelle , répétons le le capitalisme en quelque sorte a fait son temps , est très loin d'être majoritaire et ceci ne doit pas surprendre ; pour deux raisons : si ce systéme a pu s'étendre à toute la planéte c'est la "preuve" de sa vitalité ; la seonde est qu'il est devenu difficile d'imaginer un monde sans lui . Voilà sur quoi se fonde la pensée politique de forces de gauche dont l'objectif n'EST PAS de sortir de ce systéme mais de le "gérer plus efficacement" .
7) Toutefois il serait parfaitement stérile d'opposer les tenants d'un "capitalisme décent" ( formule de JC Cambadélis à peine modifiée ) aux tenants du changement révolutionnaire ; pour toutes les raisons indiquées les réformes d'aujourd'hui , si elles doivent rencontrer l'adhésion populaire se heurtent au capitalisme ; plusieurs exemples en fournissent la preuve ; le PS a tenté de contourner la difficulté d'une mise à la raison des transactions spéculatives bancaires par SUITE de ses conceptions; résultat : néant de son propre point de vue ; changer ou poursuivre, la question taraude le plus petit élément de la vie en société ; ne parlons pas de ce qu'il a fait avec l'ANI , le CICE etc en ETANT CONVAINCU que cela lui donnerait les bonnes grâces du capital ou au moins sa coopération d'où l'idée du PACTE ; il n'en est rien comme on le voit ; le PS pensa en outre que cette méthode -CONFORME à ses conceptions et essentiellement de son équipe dirigeante- ses adhérents n'ayant JAMAIS à discuter de semblables questions - couperait l'herbe sous le pied de la droite et on voit où cela conduit ; la droite politique est plus que jamais sur le pied de guerre ;mais celle-ci n'est pas sortie d'affaire pour autant car elle n'a RIEN en magasin pour sortir le pays de l'épreuve terrible où sa politique l'a entrâiné
Mais que le PS - sa fraction dirigeante et au delà un large pan de sa mouvance - fasse fausse route est une chose , le fait que le MEME PAN de sa mouvance et BIEN AU DELA souhaiterait voir des réformes dont il puisse se réclamer- tâche à laquelle Bruno le Roux s'emploie avec la plus grande difficulté ce matin sur France Inter - aiguise la contradiction "Changer ou poursuivre" ; et de ce fait celles et ceux qui sont déjà acquis à l'idée de "changer" ont devant eux l'initiative politique .Encore faut-il qu'elles et ils ne s'emploient pas à créer de toutes pièces des obstacles imbéciles, comme celui de demander à celels et ceux qui ne sont PAS acquis à cette idée d'bandonner ce qu'ils sont , de reconnaître qu'elles et ils se trompent etc......... .Des obstacles imbéciles il y en a d'autres mais celui-là est de loin le plus destructeur .
8) on comprend bien que l'étendue même du sujet oblige à des raccourcis et que ces mêmes raccourcis se prêtent à des critiques faciles; néanamoins et pour conclure provisoirement :
a) pour dépasser le capitalisme il faut avoir construit individuellement ET collectivement une pensée alternative , une LOGIQUE alternative ; c'est impossible sans créer partout les conditions du débat le plus arge et le plus respectueux des uns et des autres
b)pour dépasser le capitalisme il est nécessaire de reconstruire une gauche qui puisse dire son nom ; une gauche qui marche , pas une gauche qui piétine ,voire est honteuse d'elle -même .Aucune force de gauche aujourd'hui n'est en mesure d'assurer seule ou majoritairement le processus dont nous avons parlé longuement .
c) Pour dépasser le capitalisme il faut AVANT TOUT être en mesure de proposer publiquement un ensemble de mesures qui entrâinent l'adhésion POPULAIRE sans laquelle il ne peut RIEN advenir ; et pour cela à nouveau il faut débattre d'une question centrale " QUELS SONT AUJOURD'HUI les incontournables d'une politique de gauche " ; un tel débat ne peut avoir lieu entre militants ; il doit se tenir en place publique , dans les villes et les villages , dans les entreprises , partout où cette question apparaît aux populations comme nécessaire et utile pour "sortir du malheur" ; sortir du malheur est la façon dont nos compatriotes s'expriment quand ils parlent de la situation actuelle ; plutôt que de chercher à les convaincre de mettre un nom sur le MALHEUR , montrons par une pratique politique nouvelle que c'est d'elles et eux que TOUT DEPEND .