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Billet de blog 5 mai 2014

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RENCONTRE SUR LA CÔTE EST (SUITE) CHAPITRE V

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V Avant le quadrille : Rencontre sur la Côte Est (Suite)

Je vous ai dit que je n’étais pas économiste ; ni de près ni de loin ; mais toute personne sensée comprendra qu’à l’heure où, comme jamais auparavant – c’est d’ailleurs un problème en soi- les économistes sérieux  ou réputés tels (existe-t-il des économistes pas sérieux ? En avez-vous rencontrés ?) sont convoqués à tout moment pour donner leur «  avis » sur la politique gouvernementale et que ledit « avis » coïncide, comme par hasard,  avec ce qu’ils ont « expliqué » auparavant – ce qu’on appelle la « pédagogie »  , que c’est à l’aune de ces « explications » qu’on est censé « juger » d’une politique , il est vital , je le répète pour toute personne sensée de chercher à y voir le plus clair possible . Ce serait en principe le rôle des partis politiques de s’y employer, des organisations syndicales,  de la presse dite d’ « opinion », et évidement des médias en général ; c’est à des degrés divers le cas des partis de gauche ; le livre de JC Cambadélis s’y essaie mais on a commencé de voir que son propos  montre plutôt une ignorance profonde du sujet, si ce n’est pas pire. Le PCF s’y emploie vigoureusement mais pour différentes raisons dont certaines seront scrutées plus loin, son audience artificiellement réduite fait que son discours ne porte pas assez loin ; de plus , s’il faut devenir plus ou moins communiste pour être éclairé sur les enjeux des choix économiques , il y a un problème sérieux . Les organisations syndicales le font aussi à des degrés divers ; on se demande par exemple quelle contribution apporte la CFDT à cet égard ; pour la CGT, on peut être certain que au niveau confédéral, la chose est l’objet de soins particuliers, mais cela ne touche hélas qu’une proportion de ses cadres – on ne se prononce pas ici sur la « valeur »  de cette formation ; elle impulse des luttes dont la cible est la prédation du capital  , c’est déjà ça  ; la FSU ne produit à cet égard RIEN ; ce n’est pas une petite question. Les Journaux d’opinion  s’y livrent ; là encore, la masse de nos concitoyennes et concitoyens ne s’adonne  pas à cette lecture et encore moins à des études comparatives  ; quant aux médias , le message qu’il délivre est tout sauf pluraliste et malgré l’apostrophe quasi quotidienne de David Pujadas «  Pour mieux « comprendre » -insistez sur COMPRENDRE en clignant de yeux et en prenant un air pénétré – qui interroge des gourous tels que F Lenglet quand ce n’est pas directement DSK , le grand retour , de l’homme qui a été directeur du FMI , on ne peut pas dire que ce soit « éclairant » .

On en est donc réduit à une tâche ingrate mais nécessaire , celle qui consiste à essayer pour soi-même d’y voir plus clair, et si possible de restituer ce qu’on a compris ; c’est l’objectif de cette partie et de celel qui suit ,  en fait.

En lisant P Krugman jusqu’au bout, j’ai fait plusieurs découvertes importantes et la première d’entre elles est d’avoir compris un peu mieux ce qui différencie un keynésien conséquent d’un – je n’ose pas le dire – marxiste conséquent ; je ne me pique évidemment pas de faire partie de la seconde catégorie ; pour faire cela , il me faudrait une culture infiniment plus vaste et une universalité de compréhension qui est loin de faire partie de mes petites capacités ; je ne vais pas évoquer cette différence ici ; on sortirait vraiment du sujet. La seconde découverte est de m’être vraiment convaincu de la POSSIBLITE d’alternative DE GAUCHE  à la politique suivie actuellement dans l’Union Européenne ; bien sûr, beaucoup de lectures antérieures et de discussions, des convictions politiques solidement ancrées auraient pu me l’épargner. C’était tomber dans la facilité d’asséner des convictions face à d’autres ; cela ne convainc personne et ne m’aurait pas convaincu non plus. LA CONVICTION NAIT DU DEBAT ET DE LA CONFRONTATION D’IDEES. C’est sans doute pourquoi, les grands médias s’y refusent. Le résultat de cette attitude délibérée est le « scepticisme » d’une grande partie de nos compatriotes avec comme sous -produit  une abstention de masse, quand ce n’est pas pire, lors des scrutins, qu’ils soient dits de « proximité » ou ne le soient pas comme celui qui est devant nous aujourd’hui dont en tout état de cause on peut prévoir un résultat déplorable.

Les derniers chapitres de P Krugman se concentrent sur la politique économique Nord-Américaine ; on n’en dira donc rien ; on y trouve aussi des passages très détaillés et construits sur la « dette », L’inflation, la déflation, la récession et à peu près tout ce que comporte la macro-économie, tout y passe. Mais on conviendra que présenter des extraits découpés de l’ouvrage de P Krugman n’a aucun intérêt ; je me contenterais ici de mettre en regard des aspects choisis avec les propos tenus par JC Cambadélis. Jusqu’à un certain point, en fait assez loin, ce que dit P Krugman conforte ce que je pense et ce que pensent et disent en gros les communistes mais ce qui est important est qu’il soit en fait,  GLOBALEMENT, de la même trajectoire de pensée que JC Cambadélis  mais en aboutissant à des conclusions autrement nettes et en fait OPPOSEES . Ceci explique que  la discussion avec P Krugman soit aisée pour moi et que JC Cambadélis aurait tort de ne pas visiter le livre en question un peu plus qu’il ne l’a fait, s’il l’a fait, ce dont on peut quand même douter. 

On l’a dit d’entrée : JC Cambadélis ignore absolument la crise systémique du capitalisme comme tel, mais P Krugman aussi ; comment se fait-il que je sois admiratif devant le second et beaucoup moins devant le premier ?La raison en est simple : P Krugman JOUE à ignorer la dimension systémique , il ne l’ignore pas en fait : les dimensions qu’il brasse excluent qu’on lui fasse ce procès ; mais P Krugman est convaincu que : « on peut en sortir maintenant » , de cette crise et qu’on peut le faire dans le cadre du capitalisme ,  parce que « perplexe devant ce qui pourrait le remplacer »Mais JC Cambadélis lui , est surement « perplexe devant ce qui pourrait remplacer » le capitalisme mais n’a aucunement l’idée qu’on puisse sortir de cette crise maintenant SI c’est au prix – et c’est au prix – de contrarier temporairement et PARTIELLEMENT  la logique du capitalisme actuel,  pour lequel « tout prendre » est devenu une seconde nature, ce devant quoi ne recule justement PAS P Krugman  .

À dire vrai, le débat existe bel et bien au sein du parti socialiste mais il est et reste timoré : la raison en est simple et elle est POLITIQUE : les socialistes qui sont sur la pente de pensée de P Krugman ont peur de déstabiliser la Présidence de F Hollande ; et disons le nettement ce n’est  pas par des appels à la sécession ouverte ou camouflée  que cette peur sera apaisée. Ou bien le parti socialiste sera amené globalement à détacher la vision de ce qu’il représente, des options gouvernementales actuelles, ou il ne le sera pas ; c’est son affaire, mais c’est aussi celle des citoyennes et des citoyens de gauche. Est-ce vraiment demander l’impossible que de se convaincre que les options suivies par la politique gouvernementale conduisent globalement la gauche et le parti socialiste à une défaite sans précédent historique ? En quoi cela devrait conduire le parti socialiste à renier ses convictions ? N’est- ce pas plutôt l’inverse ? Nous ne ferons que poser la question.

Poursuivons donc notre étude sans désemparer

Chapitre VIII «  La grande régression » : JC Cambadélis  trouve là des développements étonnants, compte tenu de ce qui précède .Il puise, dit-il, quelques éléments « capitaux » chez  …..Marx : « D’abord son analyse du capitalisme financier , elle est tellement moderne et opérante » (p158 Op Cité ) ; je ne veuxpas être inutilement méchant ; si JC Cambadélis trouve quelque vertu « moderne » à l’analyse de Marx , on ne va pas s’en plaindre même si le condensé qu’il en donne fait tousser quiconque a lu l’analyse en question DANS LE TEXTE ; c’est la suite qui nous importe : «  Marx disait que cette survalorisation dans la sphère financière   est en grande partie fictive , dans le sens où elle n’ a pas de contrepartie travail mais prospère de la spéculation……… »  Il disait ça Marx ? Non seulement Marx ne disait pas ça même approximativement, mais P Krugman s’en garde bien ; l’économie dit Krugman, en quoi il est d’ACCORD avec Marx, ne procède d’aucune valeur « morale » ; Il n’y a pas d’un côté le capital « productif », producteur d’inégalités mais qui « laisse perplexe sur ce qui pourrait s’y substituer » et de l’autre le capital financier « parasitaire ».  Poursuivons : après avoir dit que les capitaux flottants progressent quatre fois plus vite que le PIB,  JC Cambadélis ajoute « Alors évidemment, ces capitaux, cette finance, tel un nuage de sauterelles s’abat là où il y a à « manger » et « rapidement » » (P 159 Op Cité )  ; admettons ; c’est la suite qui importe «  Dans le même temps , les États-Unis et l’Europe , qui ont vu une partie de leur production industrielle délocalisée , ont commencé à vivre à crédit. Le crédit facile qui est venu se substituer à la production, à l’industrie. La rente a acquis ainsi ses lettres de noblesse » (ibid.) Il poursuit : « En Europe, l’endettement privé a crû en 10 ans deux à trois fois plus vite que les revenus, ou la richesse nationale. Évidemment, la croissance très rapide de la dette sans lien avec l’économie réelle a conduit dans le mur » ; on commence à voir où il veut en venir mais déjà on peut utilement poser une question : si l’endettement PRIVE  a cru etc…, pourquoi, mais pourquoi faut-il absolument  s’attaquer à la dette PUBLIQUE ?

Mais cette question, si elle est peut-être pertinente, nous égare, on verra pourquoi, et là P Krugman nous l’explique en long et en large ; mais JC Cambadélis ne l’a pas lu. On fait cette hypothèse sinon c’est infiniment plus grave.

Plus loin, notre auteur poursuit soudain sur une nouvelle ligne de pente plus « radicale » ; ce sera « il faut ».

Jugeons –en : « Encore une fois, si les capitaux fictifs décident de quitter la sphère financière hautement rentable pour s’aventurer dans la sphère industrielle, c’est pour un retour sur investissement avec le même rendement : le plus de profit possible, le plus rapidement possible, le plus sûr possible pour les actionnaires ………. L’OCDE a chiffré à dix points le recul de la part du travail dans la valeur ajoutée depuis 1976. Parallèlement la part des profits est exponentielle. ………la baisse de la part salariale n’a pas été utilisée pour augmenter l’investissement mais pour verser des dividendes aux actionnaires .On est loin de la fameuse réflexion sur la compétitivité. Le  capital financier vit comme un prédateur de richesses……… On ne peut plus « laisser faire » indépendamment du volet strictement européen (qui sera étudié plus loin) . Il faut à l’évidence domestiquer l’économie de marché, et ceci à trois niveaux   : d’abord au niveau mondial en brisant la logique du capital financier, en taxant les mouvements de capitaux.. Ensuite, il faut, pour chasser les capitaux sales et les paradis fiscaux séparer les activités bancaires de dépôt et de spéculation …. , enfin au niveau européen instaurer  des Euro bonds –Projet. La mutualisation de la dette ne veut pas dire exonérer les États impécunieux……… »   (p159 et seq op cité )

JC Cambadélis est-il victime de dédoublement de la personnalité ?

Il a d’autres maux dont il doit s’occuper d’urgence : qu’il veuille bien expliquer comment des capitaux « fictifs » « décident » de quitter la sphère financière pour « s’aventurer » dans la sphère industrielle ? Si les capitaux en question sont « fictifs », ils ne « décident » rien du tout. Ces capitaux sont bien REELS et ils SONT PRELEVES sur la force de  travail, soit directement par le salaire  sur lequel s’exerce une pression à la baisse formidable en pouvoir d’achat soit indirectement et plus massivement  sur l’épargne, laquelle elle aussi constitue une part de la rétribution de la force de travail , ou les deux à la fois . Mais il y a plus grave : que JC Cambadélis veuille bien nous expliquer POURQUOI ces capitaux qui se rétribuent dans une sphère  financière hautement rentable iraient soudain « s’aventurer » dans la sphère industrielle laquelle présente évidement d’autres aléas ?  Cette « explication » ne tient pas debout.

« Il faut briser la  logique du capital financier » ; JC Cambadélis deviendrait-il « rupturiste » à l’insu de son plein gré ? Mais ne chipotons  pas  ; il FAUT dit-il . Deux ans plus tard, où en sommes- nous de ces « il faut » ? ; JC Cambadélis pour qui l’on n’existe que si on est socialiste cite Emmanuelli, en son temps auteur d’un Rapport à l’Assemblée nationale ; soit. Mais que fait- il du rapport déposé en 2013 par la Commission des affaires étrangères, Rapport présenté par Alain Bocquet et Nicolas Dupont Aignan, lequel a pour titre « Si on passait des paroles aux actes ? »  On dira qu’il n’en fait rien puisqu’il écrit en 2012 et que par définition il ne peut pas savoir  ce qui se passera en 2013 ; mais c’est trop facile : de ce Rapport, le gouvernement   n’a rien fait. Les paradis fiscaux se sont évaporés …….. Ils se sont « mis en règle », voyez –vous.    Exit le « il faut » des paradis fiscaux ; circulez. Quant à taxer les mouvements de capitaux, BRISER LA LOGIQUE DU CAPITAL FINANCIER, excusez du peu …….. Là, autre argument, un pays isolément ne peut rien faire ………C’est pourquoi on verra ce que ça donne au niveau de l’UE. Et alors cerise sur le gâteau «  on est loin de la fameuse réflexion sur la compétitivité » ‼ ‼ ‼ Le gouvernement et François Hollande en tête font-ils autre chose que la reprendre cette « fameuse réflexion » ?

« Et l’on entend souvent dire aujourd’hui que ce qu’il nous faut, c’est davantage de "flexibilité" de l’emploi – un euphémisme pour désigner la baisse des salaires »  (P Krugman in « Sortez nous de cette crise maintenant ! P70)

Mais on le comprend bien, par contre, si on fait du discours sur la mutualisation des dettes par euro-bonds projet – terminologie complétement absconse- il n’est pas question d’ »exonérer les états impécunieux » ; ça on l’a bien compris en effet.

Alors parlons- en de cette « dette »...

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