« Wir wären gut , anstatt so roh ,
Doch die Verhältnisse , die sind nicht so”
Tel est le refrain du choeur de l’Opera de 4 sous” de B Brecht ; les langues sont intraduisibles ; elles incorporent toute l’histoire des peuples qui, jusqu’à la mondialisation capitaliste était unique pour chacun d’eux, raison pour laquelle aujourd’hui Wall Street dicte sa loi y compris dans les idiomes ; très approximativement le passage ci-dessus donne « Nous serions bons au lieu d’être des brutes, mais les circonstances, elles, ne le permettent pas ».
B Brecht écrit le texte de cet opéra en 1929 ; période où B Brecht, déjà très à gauche, est encore un peu « anarchiste » ; j’ai conscience du ridicule de cet adjectif. L’anarchisme au sens où on a pu le connaître hors d’Allemagne n’y existe tout simplement pas ; 1929, vous savez ?
La langue si particulière de B Brecht ne changera pas : elle est tranchante comme une lame d’acier ; les « circonstances » , comme y font écho les dessins de Käthe Kollwitz à propos de laquelle on cherche vainement « l’Appel urgent » signé par elle et beaucoup d’autres aux Partis de gauche allemands avant la prise de pouvoir que vous savez .
Cette œuvre prend en France une résonnance particulière ; il y a ce terrible chant de,Jenny -la -Pirate,Jenny -des -lupanars , qui attend son sauveur et qui lors de l’arrivée de son vaisseau mythique s’exclame à chacune des têtes (de ceux qui l’ont humiliée) qui tombent : « Hop là ! ». C’était l’Allemagne de 1929 ….
En France, où tout finit par des chansons, on ne fredonne (et encore ! ) que la chanson de Mackie Messer du même opéra ; mais on ne fait jamais le rapprochement .
“Der Haifisch , der hat Zähne , und der trägt die ins Gesicht
Aber Mackie , der hat ein Messer , doch das Messer sieht man nicht
… denn der HaIfisch is kein Haifisch wenn mann NICHTS bedeuten kann ”
Le requin, lui, a des dents et il les porte en pleine gueule
Mais Mackie lui, a un couteau, quant au couteau, on ne le voit pas….
Car le requin n’est pas un requin quand on ne peut rien prouver. ».
Le rapprochement ? Mais de quoi parlez-vous ?
Obama rencontre Trump ; photo, poignée de main ….
Stop the show , honey, stop the show !
Le lendemain Obama se découvre des craintes ; D Trump ne perd pas une minute ; autour de sa fine équipe de trois personnages au pedigree effrayant, - le dessinateur de l’Humanité se Trumpe ; la première mesure n’est pas « Dehors le Nègre ! » -, il annonce que les Juges qu’il nommera interdiront l’avortement ce qui, entre autres, équivaut à LEGALISER LE VIOL. Il n’y avait rien de plus urgent … Voilà les têtes de Jenny- la- Pirate qui tomberont , la sienne et celle de beaucoup d’autres comme elle qui ont imaginé que Trump était leur vaisseau salvateur sans parler de leurs bébés provenant de leur viol !
Au même moment, au pays où tout finit par des chansons, Sarkozy déclare que Trump « représente le Peuple » ; aussitôt dit, son factotum au crâne rasé s’écrie « Sarkozy représente le Peuple ! »
Perdons une seconde dans ce développement : toute citoyenne et tout citoyen du pays où tout finit par des chansons doit le savoir : le bulletin de vote de ces gens-là leur salira les mains. On devra avoir honte de s’en servir ; il faut que cela soit clamé partout, que ce qui reste de conscience démocratique se lève pour le dire.
Vous vous représentez votre vie au pays où ces gens-là « représentent le peuple » ?
L’opéra de B Brecht désigne un seul souteneur criminel et prêt à tout, à la vindicte ; « les circonstances » nous en montrent ici des foules dont on ne voit pas le couteau ….pour le moment . Il n’est pas jusqu’à Alain Juppé qui ne s’inquiète mais, comme il le dit, « c’est sa famille ».
Si j’ai parlé « des circonstances », c’est qu’une colère sourde et terrible monte du pays ; malheur au pays où « les circonstances » ne permettent au peuple « que la brutalité » ; de « ces circonstances », la gauche ne sortira pas exonérée. Un de mes lecteurs vient pleurnicher à propos » de la gauche de gouvernement », oxymore que j’ai évidemment exclu du rassemblement que le PCF recherche et recherchera quel que soit le vote qui s’approche. Que cet « avocat » de la honte à qui j’ai conseillé d’aller se cacher, recopie cent fois :« On voudrait bien pousser la bonté jusqu’à vous inclure, au lieu d’être aussi brutaux mais les circonstances ne le permettent pas. »
Mais tout le monde comprend que ce n’est pas de ce non -événement qu’il s’agit ; si « les circonstances » ne changent pas de toute urgence, la colère qui monte sera « représentée » par des Ménard, des Marine et Marion Le Pen et en tout premier lieu les représentants réels de la droite française d’Alain Juppé à NKM en s’arrêtant sur Sarkozy et au MEDEF , qui ranimeront demain la mémoire de toutes les trahisons, de toutes les juridictions d’exception, des chasses au faciès, des chômeurs coupables de l’être ; des pauvres enfoncés dans leur misère pour qui même les restaurants du cœur n’auront pas la moindre soupe , des pauvres par millions à qui l’on dira qu’il ne tient qu’à eux de ne plus l’être ;la chasse au « terrorisme » permettra tout - je ne parle pas de « dérives », pour dériver, il faut s’écarter du cap, or Trump c’est LEUR CAP- ; à celles et de ceux qui le sont moins (pauvres) on montrera qu’elles et ils doivent s’estimer être encore heureux de ne pas l’être davantage ; la question du changement climatique, origine centrale de mouvements de populations jamais vus , de territoires engloutis , de déferlement de catastrophes « naturelles « , il ne sera plus question ! On enrage de ne pas trouver les mots pour les « circonstances » en question.
Ne peut-on dans « ces circonstances » que nous résoudre à l’indignation ?
Vous ne pourrez pas dire demain « Did I do that ? » avec l’innocence du gamin qui a mis le feu à la maison .
Ne pouvons-nous être ENSEMBLE vent debout ?
« Ça ne tiendra pas » ; refrain connu ; Von Ribbentrop était un homme élégant et un « fin » diplomate ; dans l’entourage d’A Hitler il y avait les mêmes requins « qui ne sont pas des requins tant qu’on ne peut rien prouver » ; business as usual ; avec les chambres à gaz, les dents en or fondues, les cheveux transformés en savon ; mais vous verrez ma bonne dame « ça ne tiendra pas ».
Inventons un nouveau mot, « proto-fascisme » ; si ça vous chante … Avec ça vous aurez fait quoi ?
Vous avez vos idées, elles ne coïncident pas avec celles du PCF, en tout cas pas toutes, est-ce le sujet ?
Ce l’est, il faut bien le dire, pour d’excellents esprits qui aujourd’hui supputent et calculent ; vos supputations et vos savants calculs nous mènent au pire.
Giscard D’Estaing fit de l’affaiblissement du PCF un objectif que F Mitterrand reprit à son compte ; je n’aurais pas l’imbécillité de croire qu’ils furent SEULS responsables de sa chute verticale ;le PCF y mit du sien ou plutôt il y avait mis du sien ; mais une thèse politique apparut qui demeure à gauche semble-t-il un axiome ; on le constate ici ; le PCF, « trop » fort est une entrave au changement à gauche ; JLM la fait sienne ; mais personne ne demande à quiconque de favoriser le PCF , d’approuver ses idées , ni de le défendre . Nous sommes à des années-lumière du temps où Jean-Paul Sartre qui eût avec le PCF des démêlés aussi sérieux qu’absurdes déclarait « Un anticommuniste est un chien » ; mais où donc, à quel grand progrès a mené cette thèse d’un PCF force d’appoint quand elle n’est pas purement et simplement nuisible ??? ?
J’ignore de quoi sera fait demain au point de vue du vote du PCF mais si le pire se produit et quoi qu’il advienne, il sera en première ligne et le premier parti politique visé ; cela au moins est certain ; et comptez sur lui pour se tenir debout fût-il encore affaibli ; ce n’est surement pas par esprit de boutique que ce problème est évoqué ici.
Toutes les forces de gauche, progressistes, écologistes ont à conquérir des millions de concitoyennes et concitoyens , le PCF ne fait pas exception ; mettre en commun ce qui rassemble renforce le potentiel de tous ; je ne dirais pas que ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous sépare ; ce devrait être plus important , ce n’est pas pareil ; et c’est là et là seulement que se trouve la source de l’élan populaire qui peut nous sauver des requins qui n’en sont pas « tant qu’on ne peut rien prouver » ; ça mérite qu’on y songe .
W F Goethe écrit dans Werther que « Les graines de semence ne doivent pas être moulues » ; contribuerons-nous à les faire moudre ? Demain il sera trop tard et ça ne finira pas par des chansons.
