L’ECLATANTE VICTOIRE DE SYRIZA II
Par hasard, hier soir, après un petit rassemblement à Nice destiné à saluer la victoire de Syriza, à l’initiative du Front de Gauche et singulièrement du PCF j’écoute la radio. Une voix claire, féminine, sympathique, que j’ai déjà entendue mais que je ne reconnais pas y défend bec et ongles la victoire de Syriza, la nécessité et la possibilité de faire abandonner la dette souveraine grecque « illégitime » ; je pensais que la discussion là-dessus était dépassée mais non. Illusion.
Plus tard dans l’émission on indiquera la déclaration de François Hollande qui, dans des mots Merkel-liens rappelle Tsipras aux « engagements souscrits par son pays et qui doivent être tenus » ; la honte me monte au front ; voilà tout ce que celui qui représente mon pays trouve à dire à la Grèce : « Un gouvernement grec a souscrit l’engagement de saigner à blanc le peuple grec ;celui-ci vous a élu pour le sortir de l’enfer ; eh bien, non , maintenant, vous n’avez pas le choix , obéissez aux engagements souscrits par vos prédécesseurs ! ». Terrible. C’est bien pire que la non –intervention de Léon Blum au temps de la guerre d’Espagne.
Je vais revenir sur cette émission qui en dit beaucoup sur l’état de la gauche en France y compris du côté du Front de Gauche hélas, mais auparavant, petit saut dans le temps .Je regarde ce qui s’écrit sur Médiapart : article de Une sur l’alliance « contre-nature » conclue par Syriza avec un parti ANEL qui est décrit comme un parti national –populiste. La veille, découvrant cet accord gouvernemental, pas une « alliance », j’avais écrit « Un sans –faute jusque-là » et je maintiens.
Certes l’article explique en long et en large que cette alliance gouvernementale donne à ANEL un seul Ministère qui de surcroit n’est pas de nature à infléchir les engagements de Syriza au plan européen ; certes , l’article explique en long et en large – comme je l’ai fait moi-même que Tsipras n’avait pas d’autre choix sauf retour aux urnes irresponsable , puisque le KKE avait déclaré d’avance qu’il n’en serait pas ; certes l’article explique que ANEL est souverainiste à la Grecque c’est-à-dire est opposé aux exigences européennes , et est donc COMPATIBLE avec le programme sur lequel Syriza a gagné . Certes, l’article dédouane ANEL des pires abjections de l’extrême droite grecque et si ses liens avec Dupont- Aignan en France sont mentionnés c’est aussitôt pour dire qu’en fait les deux partis n’ont pas beaucoup de points communs. Mais alors pourquoi ce titre provocateur ? « Alliance contre nature » ?
Or justement ce n’est pas une alliance mais une combinaison gouvernementale. La nuance est de taille.
Or justement, l’article de Médiapart ne souligne pas que dès l’élection passée, la presse française du capital faisait de « To –Potami » le partenaire préférentiel et exclusif de Syriza, mais ce n’est pas ce qui s’est produit ! Avec « To-Potami » le capital européen avait son entrée au gouvernement grec et pouvait ruiner le programme social politique de Syriza ; eh bien ! Il faut s’y faire, ça ne se passe pas comme ça. Complot déjoué.
Bravo Tsipras et bravo Syriza. Mais ce n’est pas tout ; cette combinaison gouvernementale est justement TOUT SAUF « CONTRE-NATURE » ; car il faut impérativement que les verrous de la politique nationale grecque sautent, il faut que la Grèce sorte du carcan ; et le carcan entre autres c’est la dette ! Pour cela ANEL est un partenaire, et pas « To-Potami » ; et l’annulation de la dette ne fait pas tout ; faut-il encore que le programme social de Syriza puisse être largement appliqué et sans attendre ; et là encore, ANEL est un partenaire compatible et pas « To-Potami » . Est-il possible de demander aux voix de gauche comme Médiapart d’attendre un peu pour découvrir des poux dans la tête de Tsipras ? Le CNR en France ne réunissait-il pas des forces politiques différentes voire opposées avec les résultats que l’on sait et que la droite française appuyée par l’extrême droite essaie, maintenant avec la participation d’un gouvernement à étiquette socialiste de mettre à bas ? Médiapart n’a-t-il rien de mieux à faire qu’à commencer à jouer la chanson puriste ?
Je note en passant que c’est la même chanson qui est jouée ce matin par le Journal Marxiste bien connu « Nice –Matin » ; on se frottait les mains à gauche s’écrie le commentateur ; « patatras voilà Tsipras qui conclut une alliance contre-nature ! » Ah les beaux esprits. Laissons cela .
Où la gauche française a-t-elle la tête ?
Ceci nous ramène à l’émission d’hier ; la voix féminine et sympathique – c’est celle de Raquel Garrido comme je le découvrirais – explique que la Gréce n’a jusqu’à présent pas de véritable État ; que justement la constitution d’une véritable fiscalité , d’un cadastre et bien d’autres réformes très importantes sont à l’ordre du jour et que tout cela justement fait partie de la négociation avec les chacals qui veulent continuer à enfoncer le peuple grec dans la misère et la souffrance sans fin ; bien sûr , elle ne dit pas que lorsque les forces du capital parlent de « réformes structurelles « ce n’est pas de celles –là qu’elles parlent mais bon , elle dit « C’est jouable » ; elle a raison ; on n’a jamais vu le capital hésiter à tourner casaque dans l’heure pour peu qu’on sauve l’essentiel ; une stratégie européenne pour contrer le programme de Syriza n’est pas au point , pas encore . Et s’opposer de front à des réformes structurelles dotant la Grèce d’un État digne de ce nom, ça ne fait pas « sérieux » et de plus ces réformes-là, peuvent AUSSI permettre au Capital grec d’avoir des assises plus fortes , plus efficaces ; « business is business » .
La Grèce et Syriza n’ont pas comme programme de sortir du capitalisme, même s’il y a un bras de fer ,mais de sortir la Grèce de l’emprisonnement .Pour le moment il s’agit de la mise en œuvre d’une POLITIQUE DE GAUCHE ; en tout cas on l’aurait appelée ainsi en France avant que des esprits biscornus ne commencent à finasser ; une POLITIQUE DE GAUCHE DANS UN PAYS CONSISTE A REPONDRE AUX EXIGENCES POPULAIRES . POINT. Ce n’est ni le « socialisme » ni l’écosocialisme » et encore moins le « communisme » mais c’est déjà bien assez pour les tenants du capital qui ont commencé à hurler
Donc « jouable » dit Mme Garrido ; on applaudit ; j’applaudis ; la suite sera hélas d’un autre tonneau.
Soudain la voilà qui part sur des considérations institutionnelles françaises ; bien .Personne ne discute le fait que les institutions de la V° République ont vécu ; mais Mme Garrido considère que la grande innovation serait la possibilité révocatoire d’un ou d’une élue ; déjà en soi, il y aurait de quoi dire mais y voir le fin du fin de la souveraineté populaire, là, on s’égare. S’étant ainsi égarée, elle nous livre d’autres réflexions évidemment pénétrées d’écologie mais dont aucune ne concerne les premières exigences de nos compatriotes ; je n’invente rien ; les sondages sont unanimes, la question n° 1 très largement avant celle du pouvoir d’achat qui arrive en 3° position après la sécurité ce qui est compréhensible EST CELLE DE L'EMPLOI .
Trouve-t-on dans son propos le moindre écho à l’urgence pour – cette fois je ne dis pas la gauche – le FRONT DE GAUCHE ou, au moins l’ensemble de ses composantes de TRAVAILLER à UNE ALTERNATIVE DE GAUCHE CREDIBLE ? Non, Mme Garrido n’en perçoit pas la nécessité.
Entendons-nous bien , pas de mauvais procès ; Mme Garrido a ses idées et les défend ; on ne voit pas qui peut le lui reprocher mais ce qui est ici en question c’est que les idées de Mme Garrido ne peuvent constituer à elles seules et pas même en partie l’alternative qu’il s’agit de co-construire ; cette véritable inconscience du péril est sidérante ; continuons ainsi et que vaudront les déclaration enflammées de soutien au peuple grec ? Ce sera tout pour aujourd’hui