L’ECLATANTE VICTOIRE DE SYRIZA V
Que mes lectrices et lecteurs éventuels m'excusent : ce billet est un peu décousu mais bon .
À quoi ressemble un gouvernement de gauche faisant une politique de gauche ? On ne savait pas, on ne savait plus. Depuis Samedi on sait. Il suffit de regarder l’extraordinaire bras de fer entre le gouvernement grec et le reste des gouvernements de l’UE, tous coalisés à divers titres pour éviter toute possible inflexion dans l’inflexibilité .La petite Grèce peut. Avec Syriza. La grande France, avec F Hollande et le PS, ne peut pas et n’a pas su, pas voulu. Cette bataille titanesque dont nous ne voyons que le début, le gouvernement grec avec G Tsipras, va en gagner la première manche.
Courrez mesdames et messieurs les saigneurs du peuple grec, avec vos ultimatums, vos propos incendiaires et indécents, vos interdits et vos memoranda , il va vous falloir changer de disque , composer , c’est ainsi .
Dans mon précédent billet j’écrivais « Et Claude Bartolone poursuit « Depuis deux ans et demi je dis non aux 3 %, non à l’Europe de la règle, non à l’Europe qui sacrifie sa jeunesse, non à l’Europe qui sacrifie ses services publics, oui à l’Europe des biens communs. C’est tout cela qui était contenu dans le message de Syriza. Quelque chose m’a frappé dans le discours de Tsipras, il était beaucoup plus dans le retour d’une certaine fierté nationale, dans le respect de la nation grecque, que sur un certain nombre de mesures économiques. Nous aurions dû traiter cette question de la dette grecque et de la situation dans laquelle elle était bien avant. Il y a une responsabilité européenne. On voit que malgré les sacrifices terribles qui ont été demandés, ça ne pouvait pas continuer comme ça. »
Non, en effet, C Bartolone a raison : ça ne pouvait pas continuer comme ça, ça ne peut pas continuer comme ça et ça ne continuera pas comme ça. Mézalor, quand on lit la dernière déclaration de P Moscovici « "je dis qu'il faut respecter les engagements et que dans le même temps nous sommes prêts nous les Européens à voir quelles marges de manœuvre sont possibles", on s’étonne, on se demande ; C Bartolone et P Moscovici sont-ils membres du même parti ? JC Cambadélis devrait quand même s’inquiéter : il y a bien du désordre rue Solferino ; le Président de l’Assemblée Nationale dit que « ça ne pouvait pas continuer comme ça », et le Commissaire Européen désigné par le même parti dit à G Tsipras « les engagements souscrits (par la Gréce) doivent être respectés ……… « mais il est vrai qu’il ajoute, oh merveille de la dialectique, « mais en même temps , nous les européens ………. » .Attendez …. « Nous les européens….. « . C’est qui au juste ce « nous » ? La Grèce ne fait pas partie de « Nous les européens » ? On s’esclaffe à ce degré.
Mais la chute est sublime, oui Mr Moscovici, vous n’allez pas devoir chercher les marges de manœuvre dans des traités que VOUS et votre parti avez soutenus constamment, vous n’allez pas les chercher dans « Les règles immuables proclamées par les marchés financiers «, vous allez devoir CONSIDERER la nécessité POLITIQUE. Et cette nécessité ouvrira une première brèche dans le talon de fer imposé aux peuples européens par vos traités, vos règles immuables et votre soumission de larbin aux diktats de la finance ; VOS traités, Mr Moscovici, VOS traités, Mme Merkel, VOS traités et VOTRE SOUMISSION DE LARBIN, Mr Hollande.
Syriza et le peuple grec, Syriza et toute l’opinion de gauche en France, en Europe et dans le monde vont imposer dans un contexte impitoyable, là où hier « on » considérait cela impossible, de premiers RECULS. Dans le monde ? Oui dans le monde ; il n’est pas jusqu’aux États Unis des voix considérables, de gauche mais proches de la social-démocratie qui ne vous lâchent, vous, les tenants de l’ « ordo libéralisme » puisqu’il semble que cette appellation imprononçable doive vous être accolée comme la tunique de Nessus . Vous allez devoir RECULER ; reculer avec effroi comme MME Merkel qui ne peut pas imaginer qu’on remette le couvert des dettes allemandes dues à l’occupation nazie en Grèce et qui, devant cette évocation DEVRA RECULER. Reculer avec le courage des lâches comme P Moscovici et ses ineffables « marges de manœuvre ».
J’entends déjà les puristes s’exclamer : « oui, peut-être mais G Tsipras devra AUSSI composer, c’est à dire aboutir à un COMPROMIS » ; oui sans doute, pouvait-il être question d’autre chose ?
Dans un billet précédent j’écrivais « Si à Bruxelles, le PS appuie, fût-ce du bout des lèvres les exigences grecques incontournables, il apparaîtra comme ce qu’il veut être, incontournable à gauche, en France et en Europe ; s’il enfonce la Grèce, il se suicide ; devinez un peu ce qu’il choisira. Comme de toutes manières la question de la dette grecque ne peut être l’objet que d’un compromis soit imposé à Merkel et au capital européen, soit imposé au gouvernement grec et dans ce cas bonsoir, on voit qu’il y a place pour toutes les manœuvres, toutes les postures, toutes les zônes grises. » ; Je ne ferais pas l’affront aux « puristes » de commenter. Le COMPROMIS qui s’esquisse sera IMPOSE à MERKEL et au capital européen qui l’a, lui déjà compris. La question, l’unique question est de savoir si ce COMPROMIS préserve ou non les chances de la poursuite du programme de Syriza et la réponse va de soi.
Bravo Syriza et Bravo Tsipras !
C’est du JAMAIS VU.
Avant de poursuivre mon propos quant aux conséquences politiques pour notre CHANGEMENT DE LOGICIEL, je reviens un instant sur l’élection du Doubs ; j’ai écrit « Mr Cambadélis, ce sera Blücher. Écrit le 02/02 2015 à 22h.36 » ; eh bien, il s’en est fallu d’un cheveu, et même le candidat devenu député du PS ne pavoisait pas le soir de l’élection ; une victoire au goût de défaite, il n’y a que le PS pour inventer ça.
En tout cas, même si le siège a été sauvé in extremis, le reste de mon billet reste d’une totale validité : l’électorat abstentionniste de gauche ne s’est pas déplacé en masse et il n’est pas certain que les voix du Front de Gauche se soient en définitive portées sur le candidat du PS.
Cette affaire du Vote du Doubs et ce qui se passe sur la scène européenne ont des conséquences considérables ; pour le moment, le PS ne les entend pas au moins officiellement, mais ………. Déjà le vote des « frondeurs » méprisés par le gouvernement Valls –Hollande, relatif à la LOI MACRO-LIBERALE, n’est plus si sur( depuis que ces lignes étaient écrites , on sait : 49-3!) ; autre petite brèche dans le sacro-saint consensus de l’ « esprit du 11 janvier ». Il faut maintenant aussi compter avec les revendications SALARIALES qui s’expriment maintenant avec plus de force et qui touchent au cœur du sujet ; si la Grèce est capable de déchirer les pactes austéritaires, pourquoi pas nous ? Voilà qui promet. Mais comme déjà dit , pour le moment Rue Solferino , on est aveugle et sourd au moins officiellement. On peut nationaliser le scrutin du Doubs mais pas « doubiser » les Départementales – Cantonales de Mars. Celles –ci seront marquées par une cinglante défaite du PS, une montée du FN, et un record d’abstentions populaires ; on ne prend aucun risque à prédire ça. Le PS engagé jusqu’au cou dans une politique suicidaire à gauche a sûrement compté avec « la part du feu » mais sûrement pas avec ce qui se profile ; il va avoir l’occasion de réfléchir au concept de « victoire au goût de défaite ». Mais tout cela, dont il est LE SEUL RESPONSABLE, Mr Cambadélis, ne fait pas l’affaire ; ne fait pas l’affaire de la gauche. Au lieu de me borner au constat, je vais tenter de dire ce que j’entends par « Changer de logiciel » ; car comme je l’ai déjà écrit, 2017 c’est demain, et ne pas se résoudre à un duel FN -DROITE ou à un DUEL FN- PS, moins probable, suppose qu’on y songe dès maintenant.
Mais les choses vont vite ; depuis que j’ai écrit le début de ce billet on a vu un cyclone fondre sur l’Union Européenne ; bras de fer, et quel bras de fer ! À ce propos, vous voulez voir le visage du nazisme actuel ? C’est facile : regardez Schäuble le Ministre des finances allemand, vrai successeur de H. Schacht ; on aura tout entendu ; la Grèce ne pourra pas , la Grèce sortira , la Grèce devra payer ; eh bien ce n’est pas comme ça ; la Grèce reste ; la Grèce obtient un répit et bien entendu , un compromis est un compromis et donc il y a aussi des concessions de la part du gouvernement grec ; misérables analystes de « gauche » qui voient là une capitulation alors que en sous-main ils voulaient que la Grèce sorte de l’Euro ! Mais ce n’est pas le choix du gouvernement grec, désolé. Alors, qui sort victorieux de ce bras de fer ? Au vu des enjeux et sans regarder les détails, c’est le gouvernement grec ; celui-ci a joué des contradictions au sein de l’Union Européenne ; il a mis en échec relatif l’Allemagne pour qui ne compte que la mise à genoux du peuple grec ; mais d’autres forces du capital européen ont compris que les réformes structurelles de l’État grec peuvent aussi favoriser « business as usual » ; autrement dit, le gouvernement grec a gagné du TEMPS. Sans doute, certaines réformes sociales importantes elles aussi vont attendre mais pour les financer il fallait de toute manière que la Grèce reçoive des crédits et ne soit pas proclamée en faillite. En intégrant la dimension du TEMPS, le gouvernement grec et G Tsipras donnent une magistrale leçon de politique ; sur quoi donc mise le gouvernement grec ? En gagnant du TEMPS, le gouvernement grec escompte que la pression antiaustéritaire va monter en Europe ; comment peut-on le critiquer ? À elle seule, la Grèce pouvait-elle renverser la table ? Le TEMPS est donc donné à la Grèce pour faire un tout petit bout de chemin sur son programme , un programme où , je l’ai dit , des réformes sociales importantes vont devoir attendre mais où il lui devient possible de commencer à restructurer sa propre économie , assurer des rentrées fiscales , calmer la panique bancaire ;et G Tsipras lui –même a prévenu « nous avons gagné une bataille mais nous n’avons pas gagné la guerre »
Est-ce là tout ? OUI, si d’autres peuples n’entrent pas en lice et c’est pourquoi changer de logiciel prend tout son sens.
Car si les forces de gauche en France se montrent incapables d’ici 2017 , c’est-à-dire demain de mettre en mouvement les forces potentielles considérables dont elle dispose, et quoi que décide in fine la PS à son Congrès, lequel ne décidera rien, on peut le supposer, alors la défaite est au bout de la course et elle entrainera la défaite du seul gouvernement grec de gauche digne de ce nom et le seul de gauche jusqu’à présent dans l’Union Européenne ; nous ne sommes pas les spectateurs ici . Notre responsabilité est complétement engagée ; et pas parce que suivant la rhétorique facile un échec grec serait notre échec comme la victoire de Syriza est – un peu facilement- notre victoire, notre incapacité à créer les conditions non seulement d’une victoire électorale à gauche – en général nous savons faire ça – mais les conditions d’une POLITIQUE DE GAUCHE, SERA CAUSE DIRECTE de l’échec grec. C’est voir toute l’étendue du spectre que nous impose le changement de logiciel. C’est aussi pourquoi les présentes élections départementales sont une étape dans cet objectif ; il ne s’agit pas des résultats hélas prévisibles, il s’agit de savoir si nous parviendrons à commencer à faire comprendre que d’autres choix politiques sont possibles , à solliciter partout l’intelligence de nos concitoyennes et concitoyens , à faire monter l’indignation contre une droite hypocrite, adossée à l’extrême droite qui se pose en opposant alors qu’elle réclame pire encore . Et qu’on ne me dise pas que c’est un programme banal ; je le dis avec gravité ; à entendre les propos de diverses forces de gauche et y compris au Front de Gauche, nous en sommes LOIN. On susurre, on balbutie, on hésite à combattre, combattre oui, c’est de cela qu’il s’agit. Prenons –y garde : le Sommet mondial sur le Climat de 2015 est une grande affaire et loin de moi l’idée d’en minimiser les enjeux mais ……..Si F Hollande y trouve le moyen d’un nouveau souffle pour sa politique , comme il s’emploie à le faire , tout en forçant la cadence sur des réformes constamment plus favorables au capital , il y a risque , il y a danger . Oui, la façon dont chaque jour qui passe met les forces de gauche, de toute la gauche devant leurs responsabilités est une question capitale ; le gouvernement grec a gagné du temps, nous n’avons pas un INSTANT à perdre.