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Billet de blog 28 mars 2015

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LA VILLE EST TRANQUILLE ET TOUT VA BIEN

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La Ville est tranquille et tout va bien.

Donc, nous dit « Le Monde », le déficit est « moins important que prévu » ; M. Valls nous l’avait annoncé, et M. Sapin vous l’avait promis (chanter ça le matin, à midi et le soir, vous verrez, c’est radical). [i]

Un article en plus petits caractères du même quotidien, nous signale que les chiffres du chômage ne sont pas « bons » ; c’est sans rapport, vous vous en doutez. Puisque le déficit baisse et que nous nous approchons (de loin et à quel prix !)  des fatidiques 3% du Traité de Maastricht que la majorité de nos concitoyen (-ne)s avait rejeté, tout va pour le mieux, il suffit d’attendre.

La veille, avant que « Le Monde » ne   claironne que, petit à petit, les signaux économiques virent au vert, C. Gaessler, interviewe Marine le Pen ; il était grand temps .On ne l’avait ni vue ni entendue depuis des lustres ; et comme le dit un de ses collègues du PAF , JM Morandini répondant rigolard, sur Europe N°1 à un auditeur qui proteste qu’on n’entend parler que du FN , jamais du PCF, «  Il faut dire qu’il ne fait pas le même score » .

Cela n’a pas l’air de préoccuper ni N Sarkozy, ni E Ciotti ni C Estrosi ni …… car ils passent leur temps à tirer sur le FN POUR démolir le Front de Gauche, lequel, on s’en doute, est bien pire. Le fait que ces Messieurs visent directement JL Mélenchon ne doit pas faire illusion ; sans le PCF, le Front de Gauche n’existerait pas.

Donc, puisqu’il faut en passer par là, écoutons ce que dit la Dame au sourire en forme de lame de couteau. Carole Gaessler lui demande si « les bons chiffres » économiques  ne lui donnent pas à penser que les orientations politiques suivies donnent maintenant des résultats. Marine le Pen s’exclame (c’est lui faire beaucoup d’honneur ; quand elle parle, elle vocifère) : « Mais je peux vous assurer que personne ne se rend compte que ça « va mieux » ,   sauf les banques  , le chômage continue d’augmenter ………. » 

Et voilà pourquoi mon vieux copain près de chez moi, me dit avec une sorte de regret «  Désolé mon vieux, elle dit la vérité ».Il ne l’aime pas, mais ce que fait « la gauche », là franchement …  

C’est une forme de retour à l’expression de Laurent Fabius, reprise par tous les ténors de la droite,  «  Elle pose les bonnes questions mais n’apporte pas les bonnes réponses ».  

Mais même lorsque Marine le Pen « dit la vérité », elle MENT ; c’est là le hic.

Pour elle, comme pour le FN, le MEDEF n’existe pas et les milliards qui se sont engouffrés à fonds perdus dans le soi- disant «Pacte de compétitivité » et que les actionnaires du CAC 40 ont immédiatement empochés au point que la Bourse de Paris n’arrête pas de sabrer le champagne, non plus. Elle s’en prend – verbalement- aux banques, c’est déjà ça, direz- vous. Eh bien justement non,  et ce n’est pas une question de « ça ne fait pas le compte » ; « les banques » dans le discours du Front National ne sont que l’exutoire d’une prétendue « colère ». La colère existe, je l’ai rencontrée et vous aussi, elle existe dans les couches populaires mais ce n’est pas d’elle qu’il s’agit ici. La colère populaire ne s’exprime pas ainsi ;  quand elle parle, aujourd’hui, c’est les poings serrés dans les poches, c’est l’ABSTENTION.

Le Front National VEUT FAIRE PEUPLE ; c’est cela la démagogie politique ; mon ami Alain Hayot  a mille fois raisons de souligner que lorsque la crise sociale atteint de tels degrés, que la misère enfle , que le chômage frappe dans des proportions encore jamais atteintes après-guerre , alors vient le temps des démagogues ; il n’aime pas qu’on fasse le rapprochement avec la montée du nazisme en Allemagne et nous n’en discuterons pas ici , bien qu’il y ait matière, mais juste au passage ,   le fascisme allemand naissant utilisa aussi des thématiques, jusque-là propres à la gauche . Ce qui nous menace n’est pourtant pas le fascisme, au moins tel que sa figure historique nous l’a fait connaître, mais la captation de thématiques anticapitalistes fait partie du « patrimoine idéologique » du fascisme.

Comme N Sarkozy et d’autres ténors de la droite prétendent dénoncer le FN, il est utile de regarder comment ils le font ; N Sarkozy n’hésite pas : »Le programme du FN est « le même » que celui du Front de Gauche ». Vous avez vu, entendu, Marine le Pen exiger une Loi qui interdise les licenciements boursiers ? Ces licenciements massifs dans des entreprises hautement rentables, vous n’en avez jamais entendu parler ?

N Sarkozy est révulsé par le soi-disant « fait » selon lequel Marine le Pen  serait pour le retour du droit à la retraite à 60 ans ! Marine le Pen MENT et N Sarkozy MENT ;  pour ma part je suis pour le DROIT de toutes et tous nos concitoyennes et concitoyens à être bien portants jusqu’à la fin de leurs jours et même au-delà ……….( riches, non, ce n’est pas une condition du bonheur ).

Le petit problème vient du FAIT que les droits fondamentaux ONT UN COÛT ; et que, qui ne finance pas les droits dont il parle, est un DEMAGOGUE ; que celui qui prétend RESTREINDRE des droits acquis de  haute lutte et devenus UNIVERSELS est simplement partisan de l’extension sans limite de la logique du capitalisme.

J’entends déjà les protestations indignées de celles et ceux qui ayant entendu les propos inspirés de  A de Juniac aux « Entretiens de Royaumont »    se sont convaincus que « les droits acquis » étaient « une vieille lune » et que la mondialisation, voyez –vous, avait comme dans « Le Malade Imaginaire », « changé tout cela » ; l’expression « Droits acquis » n’est peut- être pas la meilleure avec l’idée qu’elle implique que « tout reste pareil dans un monde qui change », mais il est certain que les DROITS de Mr de Juniac , eux, sont MENACES par la pérennité des DROITS ACQUIS PAR LES LUTTES DE CLASSE ; et qu’il est tout aussi certain que les premiers n’intéressent pas la société mais beaucoup Mr de Juniac et que les seconds intéressent  beaucoup l’immense majorité de nos concitoyennes et concitoyens et beaucoup moins Mr de Juniac  . Celles –ci et ceux –là ne sont PAS CONTRE « LA REFORME », ils et elles sont CONTRE celles qui  s’attaquent à leur vie.

Et il va de soi que ces DROITS ACQUIS PAR LES LUTTES DE CLASSE n’intéressent en RIEN le Front National lequel, s’il parvenait aux responsabilités, les réduiraient en poudre au  nom de la « préférence nationale ».  Ce n’est évidemment pas une « expérience » à tenter.

Qu’au pays de Descartes et de tant d’autres , pour qui , ce qui se pense bien s’énonce aisément , il soit devenu nécessaire d’expliquer que justement parce que TOUT a changé , jamais les MOYENS de satisfaire les exigences nouvelles, en même temps que les DROITS ACQUIS PAR LES LUTTTES DE CLASSE sont pérennisés et rajeunis , n’ont été aussi visibles, aussi massifs et aussi importants , est un sujet de stupéfaction.

Revenons donc aux « Bons chiffres de l’économie » exceptés ceux du chômage, lesquels bien sûr,  n’ont rien à voir.

C’est nourrir directement le Front national que d’abuser nos compatriotes avec les « Bons chiffres de l’économie » ; d’une part, ceux-ci ne sont PAS BONS ; d’autre part,  faire du 3% une nouvelle mystique est un exercice sans avenir ; les êtres humains se moquent du tiers comme du quart des 3% sur lesquels M Sapin a les yeux rivés.

De 2012 à fin 2014 , il fallait « attendre » l’inflexion de la courbe du chômage ; elle ne se produisit pas ; en 2015 , il faut « attendre » la « reprise » économique et se féliciter du fait que les bons chiffres de l’économie soient là ; F Lenglet- l’homme grâce auquel vous allez tout comprendre -  qui , par rapport au début de ses prestations, a fini par réaliser  que s’il voulait être crédible , ses sermons devaient se montrer prudents ,  nous parle d’une « économie convalescente » ; mais il ne nous dit pas de quelle maladie nous souffrons hors du « coût du travail » et de la « compétitivité de nos entreprises » non encore complétement restaurée ; ce qui est stupéfiant est que ça marche encore mais heureusement de moins en moins . Tous les indicateurs prédisent l’explosion d’une nouvelle crise financière mondiale et on ne voit pas ce qui pourrait contredire ce pronostic ; la BCE a injecté- à contrecœur-  des milliards d’euros  pour « la relance économique » ; mais tous ceux qui examinent en détail voient  que cette création monétaire n’est PAS allée à l’économie réelle mais AU SYSTÈME FINANCIER, AUX MARCHES FINANCIERS ; on ne voit pas que les mêmes causes aient jamais produit des effets différents. Je prédis ici que si – comme il est vraisemblable, la crise éclate, on nous dira en 2016 que «  en pleine convalescence, la crise nous est tombée dessus, que voulez-vous ma pauvre dame » ; après ça, étonnez-vous du score du Front National …………      

  Voilà un second tour bien singulier ; « la gauche » dans le vocabulaire de la « dream team », Hollande – Valls avait disparu sauf pour faire mine de s’épouvanter à l’idée de sa disparition ; tout n’était que république, tout n’était que républicain ; soudain, veille d’un second tour un peu spécial, voilà que chaque jour de la semaine fatidique tous les ténors du Parti Socialiste appellent « la gauche à se rassembler » ;  « la gauche » existe-t-elle donc pour eux ? Il n’est jamais trop tard pour s’en apercevoir et si plusieurs conseillers généraux sortants du PS retrouvent leur siège ce sera justement parce que « la gauche existe «  , que le Front de Gauche est ……de gauche et que le PCF est … de gauche ce qui explique que Paris ait aujourd’hui une municipalité de gauche , et à ce qu’on sache , la population parisienne n’a pas lieu de s’en plaindre , au contraire ; on n’attend pas des ténors du PS qu’ils soient reconnaissants.

D’ailleurs la question n’est pas là.  Si maintenant pour M Valls et JC Cambadélis « la gauche » existe et qu’ils l’ont rencontrée,  on peut espérer que la stratégie menée de haute main visant à transformer le PS en une sorte de parti démocrate, bourbier dans lequel il est déjà jusqu’à mi- cuisse, échouera. Le PS ne sort pas effondré de ces élections départementales mais l’aveuglement n’est pas de saison. Libre à certains de ses dirigeants, et au premier d’entre eux , de considérer qu’une retraite qui n’est pas une déroute est une victoire mais il faudra bien qu’ils finissent par se demander où leur formation va exactement avec de pareilles « victoires » ; pour le moment , le cap politique ne change pas et la victoire assurée de la droite au lendemain du second tour , des pertes considérables de position de pouvoir pour un parti qui fait de cela l’alpha et l’oméga de  son horizon , donnera sans nul doute des arguments – EN PUBLIC- à des dirigeants qui trouveront dans le vote populaire la justification de leurs reniements et de leurs compromissions . En public……… , en privé, c’est une autre affaire. «  Il n’y a pas de « syrization » » , voilà ce qui semble être pour eux le principal titre de gloire. Puisque la « droitisation de la société » est un fait – QUE JE DISCUTE PROFONDEMENT -, vous voyez bien qu’il n’est pas de saison de faire une politique de gauche, le problème est que pour le PS, et depuis très longtemps, faire une politique de gauche n’est jamais de saison.

Tout ceci ne doit pas cacher la forêt :

  1. Dans nombre de cantons, les preuves du fait qu’existe un potentiel mobilisable à gauche, sur des idées de gauche, des mesures de gauche, une nette opposition aux idées et programmes de la droite et de l’extrême droite sont manifestes avec de scores importants où les voix des électrices et électeurs socialistes n’ont pas regimbé au PREMIER TOUR ,  à soutenir des listes qui n’émanaient pas de leur formation, et pour être plus précis  se réclamant du Front de Gauche et avec participation active du PCF dans tous les cas  .

  2.  Dès lors qu’existent les conditions d’un large rassemblement à gauche existent,  l’intérêt s’en manifeste.

    Les conditions. On ne va pas les énumérer : la question de l’austérité a, pour la première fois dans un scrutin considéré comme « local », fait irruption.  De façon encore insuffisante mais nette, la perception du FAIT que ces choix NE SONT PAS DES CHOIX DE GAUCHE, la perception du FAIT que critiquer sur le fond de pareils choix ne visent aucunement à porter des coups au PS, à faire tomber le gouvernement qui pourtant s’en réclame, fait son chemin ; ne pas le voir est faire preuve de myopie et d’irresponsabilité politique. C’est CETTE IRRUPTION que craint la droite ; c’est justement la prise de conscience que sans changement de cap, même celles et ceux qui ne veulent pour rien au monde nuire à la présidence de F Hollande, voient et mesurent que  son gouvernement, sa politique, le parti dont ils émanent, vont dans le mur. C’est cela  qui est l’objet de toutes les craintes à droite et aussi, ne le cachons pas, chez les Valls, Hollande, Cambadélis  et quelques autres. Dimanche soir, dans les Alpes Maritimes, là où s’affairent les Ciotti et les Estrosi, un conseiller général communiste sera réélu. Il faut croire que même à droite, on ne croit pas aux effets d’estrade des grands leaders.   

  3. Le besoin d’une politique de gauche sort considérablement renforcé de cette élection ; il ne s’agit pas ici du besoin « objectif » ; il faut ne pas avoir discuté, ne fût-ce qu’un instant avec nos concitoyennes et concitoyens pour ne pas voir que même les plus désabusés, ceux et celles qui « en ont trop vu », celles et ceux qu’on nomme dans un raccourci catastrophique « les déçus », s’animent dès lors qu’elles et ils  entrevoient la possibilité de faire autrement et ce possible TANGIBLE ouvre l’imaginaire politique dès lors que l’idée selon laquelle aucun préalable n’est  mis à l’engagement commun à Gauche est CLAIRE dès le départ de la discussion  ; le besoin d’une politique de gauche  se mêle de façon étroite ET COMPLEXE au besoin d’unité. Nos compatriotes ne sont pas des demeurés ; ils savent et conçoivent les différences et les divergences ; ils ne sont PAS d’ACCORD pour que celles –ci soient érigées en préalable ; ils et elles ne veulent ni abdiquer, ni se rendre.

    Dès lors que la discussion s’engage AVEC LE PREALABLE de L’ABSENCE DE PREALABLE, le discours du Front National  s’efface, la Droite est reléguée au rang des utilités ; ce qui l’emporte c’est l’idée d’un autre possible, c’est l’ESPOIR.

    C’est l’ESPOIR qu’a commencé à construire le gouvernement grec et c’est l’ESPOIR que de toute nécessité il faut s’ingénier à conforter et à DEPLOYER en France ; l’espoir de Gauche. Ce sera tout pour aujourd’hui.   

     

     

     


[i] Écouter la comptine qui parcourt le chef d’œuvre « Missisipi Burnings »

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