L’ECLATANTE VICTOIRE DE SYRIZA III
Le répit des veillées d’armes me permet de revenir en détail sur ce qui me tient à cœur essentiellement ; je parle de LA GAUCHE , de TOUTE LA GAUCHE , donc y compris le PS et je veux m’étendre là-dessus . Suis-je devenu fou ? Suis-je un apostat ? Pas de jour ne se passe sans que telle ou telle déclaration d’un responsable du PS ne fasse hurler ; j’ai dit ce que je pensais des réactions de F Hollande ; maintenant c’est Bruno Le Roux qui entonne une chanson dont on peut à bon droit être ulcéré ; d’abord « la gauche a fait depuis longtemps ce que dit le programme de Syriza » ; Ah Bon, « la gauche a fait ». Où cela ? On l’ignore, mais Bruno le Roux le sait surement ; il poursuit en disant qu’ »il a lu le programme de Syriza », on l’espère en effet et ajoute car c’est là qu’il veut en venir que « la Loi Macron contient de nombreux marqueurs de gauche » Ah Bon. Mais même dans son parti, on n’en est rien moins que convaincu.
Toujours est-il qu’une grande majorité de nos concitoyen-ennes voteraient cette Loi si on en croit des sondages sérieux , et allant dans le même sens , Valls a maintenant une « popularité » qui commence à le faire regarder comme présidentiable ; les qualités retenues sont un peu contradictoires mais ça ne fait rien ; Valls « sait où il va « ( c’est vrai ) , il a de l’assurance , du charisme etc…. etc… et il « a de l’autorité » .
On se doute que je ne vais pas passer M Valls au crible ; ce qui compte pour moi c’est ce qu’en pensent mes compatriotes ; je suis certain que le sondage ne ment pas et je dois vous dire que ça m’alerte.
Je ne tire aucune autre conclusion de ce sondage que celle –ci : celles et ceux qui, à gauche, ulcérés à bon droit, par les déclarations récentes de dirigeants du PS et antérieurement par la politique qu’il a menée au gouvernement se trompent lourdement en lui prédisant le sort du PASOK voire en faisant tout pour que cela arrive et ils peuvent peu en la circonstance ; le PS n’est pas « moribond ». Il ne s’apprête pas à le devenir ; il se bat dos au mur, c’est tout autre chose.
Beaucoup de mes amis et camarades manient avec plus ou moins de bonheur une vieille notion de politique qui fit nos délices pendant un demi-siècle ( « L’union est un combat » en dériva ; la formule semblait dialectique et nous mena dans le mur ; le PS sait se battre ) ; la notion de « rapport des forces » est l’espace fondamental dans la pensée de Bismarck, on ignore comment elle a transité vers l’autre camp . Mais avant d’en démolir une large part, je veux juste dire ceci : si le « Rapport des forces « est restée catégorie fondamentale de la politique, alors il faut abandonner toute idée de faire sans le PS et a fortiori contre lui.
J’aboutis à une conclusion identique mais très différemment et dans une tout autre optique ; après deux années où les dirigeants de ce parti ont tout renié, où ils ont emprunté au gouvernement le bagage de la droite, donné tous les gages possibles à un MEDEF en état de guerre civile froide, après avoir fait leur tous les dogmes qui sévissent au sein de l’UE , le PS redevient une force qui compte grâce………. à la victoire de Syriza ce qui est un comble . Si on ne donne pas quelques instants de réflexion à cela, il n’est pas utile de dire qu’on veut changer le monde etc…………
Cette situation signifie plusieurs choses auxquelles il serait bon de songer avant de jouer au stratège en chambre.
Tout indique que dès le moment des attentats, le discours du Président , puis ceux de ses ministres et Valls au premier chef, a fortiori avec Syriza , reprennent des tonalités qui appartient au corpus de la gauche ; le mot gauche avait disparu , le revoilà soudain ; la majorité de nos compatriotes y est sensible ; ceux d’entre eux qui s’étaient détournés du PS , voire en étaient « déçus » , n’étaient qu’en réserve de la République ; ils ne l’avaient pas quitté dans leur esprit . Au moindre frémissement, les voilà qui répondent présent. Ceci ne décide pas de l’élection législative partielle du Doubs, faut-il le dire, mais le signal est sans équivoque.
Le PS se présente maintenant en partenaire NATUREL de Syriza et G. Tsipras ne fera pas la faute de ne pas lui demander en quoi ça consiste au juste ; aidera-t-il la Grèce ou l’enfoncera-t-il comme ses dirigeants l’ont fait depuis des mois ? Si à Bruxelles, le PS appuie, fût-ce du bout des lèvres les exigences grecques incontournables, il apparaîtra comme ce qu’il veut être, incontournable à gauche, en France et en Europe ; s’il enfonce la Grèce, il se suicide ; devinez un peu ce qu’il choisira. Comme de toutes manières la question de la dette grecque ne peut être l’objet que d’un compromis soit imposé à Merkel et au capital européen, soit imposé au gouvernement grec et dans ce cas bonsoir, on voit qu’il y a place pour toutes les manœuvres, toutes les postures, toutes les zônes grises.
Je fais totalement confiance à G Tsipras et au gouvernement grec ; mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit ; d’autant que sur la scène européenne le PS ne sera pas seul acteur ; il y a le groupe GUE , et il y a les forces militantes en France qui vont donner de la voix .
Mais ce n’est pas la question ; la question est de savoir ce que nous allons faire en France pour que 2017 ne soit pas un désastre pour celles et ceux pour qui le retour de la droite appuyée sur l’extrême droite est un cauchemar, bien avant l’idée de construire à gauche un programme présentable.
2015 sera jalonnée par des élections ; c’est en général peu propice à un grand dessein ; on peut déjà garantir un taux d’abstentions record aux départementales – cantonales. Ensuite en décembre, les régionales sur lesquelles je ne dirais pas un mot pour le moment.
Mais que nous allions aux élections en ordre dispersé ou non n’est pas à mes yeux l’essentiel ; un front anti-austérité se constitue et ce Front va très au-delà du Front de Gauche c’est bien, utile, nécessaire. Des courants socialistes entiers y participent ; tant mieux mais ce n’est toujours pas la réponse à la question. Ça en fait partie.
Beaucoup de nos compatriotes seront réceptifs et sont déjà réceptifs à une idée simple que j’ai déjà soulignée : la France n’est pas la Gréce ; on peut compter sur le PS pour chanter cette musique sur tous les tons ; « si nous aidons la Grèce c’est justement pour faire les réformes que nous faisons » ; Bruno Le Roux ne dit pas autre chose même s’il le dit de façon pataude « à la Bruno Le Roux » c’est-à-dire sans talent.
Si nous ne trouvons pas les moyens de rassembler toutes les forces disponibles pour travailler à des réformes de gauche lesquelles justement ne sont PAS « celles que nous faisons » , on peut déjà prédire qu’avec la pire politique menée par le PS depuis la guerre froide , celui-ci tirera son épingle du jeu et imputera le cas échéant une défaite éventuelle au Front de gauche et au PCF singulièrement.
Rien qu’avec ce qui précède, le « concept fondamental » a du plomb dans l’aile.
Mais en fait , les choses vont encore plus loin ; on peut penser que puisque je dénonce –et c’est légitime – les palinodies de certains dirigeants du PS , c’est bien qu’il y a une coupure entre ce parti comme tel et celles et ceux qu’il influence ; et que l’exhortation à rassembler le gauche et toute la gauche est ,soit vaine , soit dissimule des calculs inavouables ; or , si par exemple M Valls aujourd’hui- ça peut changer demain mais ce n’est pas important- retrouve une cote de popularité significative , c’est aussi parce que un nombre important de nos compatriotes trouve en lui quelque chose qui les attire et leur ressemble . Le divorce présumé n’est donc pas ce qu’on imagine ; comme je l’ai dit antérieurement, beaucoup de nos concitoyen-nes qui se sont écartés temporairement du PS et de ses œuvres n’en ont pas pour autant divorcé ; ils y reviennent au moindre signe que le PS pourrait redevenir un parti qui respecte ses engagements et se situe à gauche de l’échiquier politique ; les insulter , les traiter en ignorants ou pire, leur demander d’abdiquer leurs convictions « de bien vouloir se reconnaître dans nos valeurs » , les écarte systématiquement du large rassemblement populaire à construire ; oui , ce rassemblement comporte et comportera ,s’il se crée, des contradictions importantes mais où sera le centre de gravité ?
Vers l’application résolue de mesures de gauche ou vers une tendance immédiate à composer et à prétendre qu’il faut abandonner le terrain, les engagements et tout ce qui a si bien caractérisé le quinquennat Hollande ?
Le centre de gravité sera ce que nous en ferons et il ne se positionnera pas au bon endroit si nous n’y incluons pas celles et ceux qui a priori penchent vers ce qu’ils comprennent comme le compromis indispensable, obligatoire et immédiat.
Si ceux et celles de nos concitoyen-nes qui penchent a priori vers ce qu’ils comprennent comme le compromis ne se mêlent pas, avant l’échéance ,à celles et ceux qui de façon diverse sont plus avancés dans la conscience des choix nécessaires , nous laissons le champ libre au raisonnement du choix du « moins pire » ; ce qui est une situation connue , moins que jamais une garantie contre le retour de la droite , et une méthode certaine pour laisser au PS la part qui ne lui revient pas .
Nous en sommes à J+4 du gouvernement de Syriza ; sur le champ celui-ci a annoncé des mesures, qui sans être encore le cœur des choses, c’est à venir, donnent immédiatement au peuple grec de l’espoir ; on réembauche là où on avait jeté dehors, on décide d’arrêter les privatisations ; rien que cela, affole les marchés financiers, ce qui est tout dire. Quelle leçon de choses pour la France ! Bravo Tsipras et bravo Syriza !
Que l’on m’entende bien : je n’attends pas ce comportement-là du PS, ni aujourd’hui, ni demain, mais il peut être conduit, sauf à connaître le sort du PASOK, à ne pas prendre de front un mouvement ample, déterminé sur lequel dans les faits , il n’a pas la main .
Une idée aussi simple que celle –ci nous échapperait : en vouant les citoyen-nes proches ou influencés par le PS aux gémonies, nous créons toutes les difficultés pour la suite, en les incluant nous leur permettons de cheminer. Ce n’est pas une petite affaire et encore moins une question de sièges …….
Dans ce contexte, il va de soi que plus la partie déterminée – par exemple le mouvement anti- austérité, est fort ,plus grandit la possibilité d’un rassemblement de gauche conquérant mais cette équation n’est possible qu’avec celles et ceux qui hésitent, ne croient pas encore possible de faire une politique réellement nouvelle, tout simplement et souvent parce qu’ils et elles n’en ont pas été co-auteurs.
Ainsi, les idées sommaires sur le rapport des forces conduisent inéluctablement à laisser au PS le champ libre, les abandonner permet de dégager l’horizon.
On le voit : la question du « rapport des forces » prend une singulière coloration ; ce qui devrait en rester est l’affrontement incontournable avec les forces du capital ; selon toute vraisemblance la Grèce leur portera de premiers coups ; c’est pourquoi aussi , elle a vitalement besoin de plus qu’un soutien ample , elle a besoin qu’on la rejoigne justement dans l’un des pays capitalistes les plus développés de la planète ; c’est bien autre chose que la préférence pour une radicalité de façade, excluant de fait une large proportion de celles et de ceux qui pourraient en être si on leur en donnait l’occasion .Et c’est surement autre chose que les sages conseils de Cécile Duflot.