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Billet de blog 13 septembre 2023

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Refus de désespérer

Loin de vouloir critiquer sans retenue, je m'interroge néanmoins sur ces morts dont la liste semble s'allonger dangereusement.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

A d'autres temps d'autres moeurs sans doute, mais il se trouve que j'ai moi même, il y a un million d'années, été confronté à un refus d'obtempérer. J'avais alors en main un fameux FAMAS et 25 cartouches de guerre dans le chargeur. 

Et j'étais là, face au camion, qui semblait vouloir poursuivre sa route après avoir pénétré dans une zone militaire sensible.

"Halte ou nous tirons" avions crié ensembles, moi et mon binôme. 

Mais le camion étrangement sourd à nos sommations, continuait d'avancer, menaçant sans aucun doute les installations que nous étions censés défendre contre les intrusions probables des Soviets.

La menace semblait d'ailleurs d'autant plus prégnante que le camion était en fait un camion citerne ! 

Imagine t-on ce qui se serait passé, si ce camion bondé d'essence probablement communiste, s'était écrasé contre un ou plusieurs vertueux hélicoptères du monde libre dont nous avions la garde ? Nous aurions frôlé le drame, la guerre peut être, et sans nul doute alors aurions été balayés par une horde de sauvages dotée de chars surpuissants et d'une aviation surdimensionnée ! Çà n'était pas pour rien que chaque soir où j'étais désigné pour faire cet office je rejoignais mon poste de garde en brandissant mon Fameux FAMAS en hurlant : "Mort aux Soviets !" Il fallait bien que je me donnasse du courage ! AU fond si j'étais parti faire mon service militaire c'était parce que, disait on, l'armée de notre bon Brejnev était à moins de 48 heures de Paris et qu'il fallait mobiliser tous les corps et tous les esprits pour faire face à cette menace potentielle.

Mais qu'importe ces considérations géostratégiques de haut vol.

Revenons à notre camion.

En fait, dans la panique, nous n'avions même  pas vu que c'était un camion citerne, et nous n'avions surtout pas vu que c'était un camion de pompier... Que ce serait il passé si, "en état de siège" avec une mentalité de guerrier sur le qui vive, nous avions fait feu, conformément aux consignes qui nous avaient été données, et en considérant au surplus que " des morts ne parleraient jamais"  ?

Nul doute que si ce camion était chargé de kérosène, nous aurions fait sauter la caserne toute entière.

Belle idée !

Nul doute que si ce camion était chargé de retardant pour incendie, nous aurions forcément tué deux personnes dont la fonction première était de... sauver des vies !

- désastre suprême.-

Certes les deux imbéciles que nous avons "gentiment" invités à s'expliquer nous ont répondu :

"si vous aviez de C... vous n'aviez qu'à tirer"

D'accord, un sommet de bêtise ! Mais je vous le demande : une telle faute méritait elle la mort ?

Honnêtement près de quarante ans après, je préfère l'option que nous avons choisie à l'époque et je tremble encore à l'idée de ce qui aurait pu m'arriver si, même en état de "légitime défense étendue", j'avais fait feu sur des jeunes gens d'à peine Vingt Ans ! Qui plus est des compatriotes et finalement des "'amis" !

Pourquoi ce long développement, me direz vous sans doute ?

Eh bien pour en venir à ce questionnement là :

Pourquoi avons nous aujourd'hui tant de tirs policiers ? 

Pourquoi ces tirs policiers et ces refus d'obtempérer se terminent ils si souvent par des drames ? Pourquoi y a t-il autant d"accidents de la route ?" 

Y a t-il quelque part des consignes, des principes enseignés, des ordres donnés pour formater des esprits, pour interpeller à tout prix, en vue de leur faire faire ?...

Dans mon viseur, je m'en souviens encore, il y avait un jeune homme de vingt ans qui parlait ma langue, regardait les mêmes séries télé que moi, avait les mêmes aspirations que moi, et peut être aujourd'hui a t-il des enfants et des petits enfants !

Non, non, non ne le pensez surtout pas, çà n'est pas une réflexion en l'air, un geste désespéré de mon clavier pour être lu et peut être entendu.

Une idée donc comme çà : et si on apprenait d'abord à ceux qui ont pour fonction de porter les armes ET DE NOUS PROTEGER qu'ils ont une RESPONSABILITE GIGANTESQUE ? Et si on s'assurait en tout cas et avant toute chose que leur libre arbitre est capable du plus grand sang froid, de la plus grande maîtrise, du plus grand discernement, en toute circonstance.

Je sais on me rétorquera qu'en face...

Mais c'est justement parce qu'en face il y a la sauvagerie, le vol et la mort, que les forces de l'ordre portent des armes et doivent toujours s'affirmer  absolument en toute circonstance comme les forces du bien, des biens...et de la vie.

Afin de faire du métier de policier, un engagement donc : philosophique, en fait. 

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