Mardi prochain s’ouvrira au Luxembourg le procès du lanceur d’alerte Antoine Deltour et du journaliste Edouard Perrin dans le cadre de l’affaire « Lux Leaks ».
Antoine Deltour, c’est ce jeune diplômé de l’ESC Bordeaux, employé par le cabinet d’audit Pricewaterhouse au Luxembourg, qui a permis par son courage, et avec l’aide d’Antoine Deltour, d’informer le monde sur les pratiques douteuses du Luxembourg. A savoir des montages fiscaux secrets qui permettaient aux multinationales comme Fiat ou Starbucks de ne payer presqu'aucun impôt dans l’Union Européenne. Rappelons que les fichiers divulgués, les fameux « tax rulings » ne sont pas illégaux, car ils ont été réalisés avec l’accord de l’administration luxembourgeoise.
Pourtant la justice Luxembourgeoise décide aujourd’hui de poursuive Antoine Deltour, décoré du prix du citoyen Européen en juin 2015 par le Parlement Européen, pour 5 chefs d’accusation dont la violation du secret des affaires. Secret des affaires que le Parlement Européen vient d’ériger en règle en votant à une large majorité une directive le 13 avril 2016. Pour justifier l’adoption de cette directive, les députés européens disent vouloir lutter contre l’espionnage industriel. Celui-ci, même s’il existe, représente moins de 20% des fraudes qui touchent les entreprises. Cette directive cache en réalité une autre volonté. Celle de museler toutes celles et ceux qui chercheraient à remettre en cause l’opacité de l’oligarchie financière.
Moins d’un mois après l’affaire « Panama Papers » où François Hollande remerciait les lanceurs d’alertes et les journalistes, précisant au passage « qu’ils devaient être protégés car ils prenaient de nombreux risques », la France doit agir. Elle peut, avec d’autres pays, bloquer, via le conseil d’état, cette directive qui porte gravement atteinte au travail des journalistes, des lanceurs d’alertes mais aussi à la liberté d’expression comme au droit d’accéder aux informations d’intérêt général. Les paroles ne suffisent pas, il faut des actes forts.
Ce procès rend encore plus impératif la mise en place d’un statut de lanceur d’alerte, véritable sentinelle de l’intérêt général. Dans un monde où l’opacité est érigée en règle d’or, le travail de ces lanceurs d’alertes est bénéfique pour la démocratie. Il faut mettre en place un dispositif qui garantit leur anonymat, leur évitant ainsi pression et représailles, et accélérer la mise en place d’un « portail internet unique » chargé de recueillir des signalements et de les rediriger vers les autorités compétentes.
Antoine Deltour et Edouard Perrin doivent être déclarés innocent, au nom de l’intérêt général et du droit à l’information.