Selon Wikipedia (consulté le 20/11/2025 à 20h37) : "Parmi les 11 exemples d'actes antisémites proposés par l'IHRA à la suite de sa définition, 7 d’entre eux ont essentiellement trait à l’État d'Israël", ce qui entretient une confusion entre antisémitisme et antisionisme.
Cette définition controversée de l'antisémitisme date de 2016. Elle a été adoptée par les 31 pays qui étaient membres de l'IHRA à l'époque.
Le 20 février 2019, lors du dîner annuel du CRIF, Macron a rappelé l'engagement qu'il avait pris en 2017 pour que la France assimile l'antisionisme à l'antisémitisme en adoptant la définition choisie par l'IHRA :
Video officielle : https://www.youtube.com/watch?v=HP87mnIkD-g) - 8mn09 - 8mn51 : "Qui ne voit que l'antisémitisme se cache de plus en plus sous le masque de l'antisionisme ? Je l'ai dit lors du 75e anniversaire de la rafle du Vel d'Hiv. L'antisionisme est une des formes modernes de l'antisémitisme. (Applaudissements) (...) C'est pourquoi je confirme que la France, qui, comme vous l'avez rappelé, l'a endossée en décembre avec ses partenaires européens, mettra en oeuvre la définition de l'antisémitisme adoptée par l'Alliance internationale pour la mémoire de la Shoah. (Applaudissements)"
En novembre de la même année, cette définition de l'antisémitisme choisie par l'IHRA a donné lieu à une proposition de résolution portée devant l'Assemblée Nationale par le groupe LREM (Sylvain Maillard) et soutenue par le gouvernement Philippe II et par Macron.
A cette occasion, un lobbying a été effectué par le CRIF sur les réseaux sociaux (X/Twitter, Instagram, campagne #VoteIHRA) afin de présenter comme acceptable la critique d'Israël "comme tout autre Etat" alors que la critique du sionisme serait devenue inacceptable.
Une lettre datée du 27 novembre 2019, signée par 127 universitaires juifs, a demandé aux députés de ne pas voter cette résolution en raison de nombreuses critiques. Cette lettre a été publiée sous forme de tribune dans Le Monde du 02 décembre 2019. Voir le texte de cette lettre sur le site de la Ligue des Droits de l'Homme, ici : https://site.ldh-france.org/ldh66/lassemblee-nationale-vote-texte-assimile-lantisionisme-a-lantisemitisme/. Voici quelques extraits de la JDA mettant en évidence les principales critiques formulées :
- "[...] Premièrement, l’exposé des motifs de la proposition de résolution associe l’antisionisme à l’antisémitisme. Il assimile même l’antisionisme à l’antisémitisme en précisant que « critiquer l’existence même d’Israël en ce qu’elle constitue une collectivité composée de citoyens juifs revient à exprimer une haine à l’égard de la communauté́ juive dans son ensemble ».
Avant de poursuivre notre argumentation, nous déplorons que l’exposé des motifs désigne Israël comme « une collectivité composée de citoyens juifs ». Environ 20 pour cent de la population d’Israël sont des citoyens palestiniens, dont la plupart sont musulmans et chrétiens. La désignation choisie occulte et nie leur existence. Nous considérons cette approche comme hautement problématique, compte tenu également de l’engagement de votre pays en faveur d’une définition de la citoyenneté française qui n’est pas basée sur l’ethnicité.
Nos opinions sur le sionisme peuvent être diverses, mais nous pensons tous, y compris ceux qui se considèrent comme sionistes, que l’association de l’antisionisme et de l’antisémitisme est fondamentalement fau[sse]. Pour les nombreux juifs se considérant antisionistes, cet amalgame est profondément injurieux.
L’antisionisme est un point de vue légitime dans l’histoire juive, et il a une longue tradition, y compris en Israël. Certains Juifs s’opposent au sionisme pour des raisons religieuses, d’autres pour des raisons politiques ou culturelles. De nombreuses victimes de l’Holocauste étaient antisionistes. Le projet de résolution les déshonore et offense leur mémoire, en les considérant rétroactivement comme antisémites.
Pour les Palestiniens, le sionisme représente la dépossession, le déplacement, l’occupation et les inégalités structurelles. Il est cynique de les stigmatiser comme antisémites parce qu’ils s’opposent au sionisme. Ils s’opposent au sionisme non par haine des Juifs, mais parce qu’ils vivent le sionisme comme un mouvement politique oppressif. Agir ainsi témoigne d’une grande insensibilité et d’une politique de deux poids, deux mesures, sachant qu’Israël nie le droit de la Palestine à exister et mine son existence même.
Il n’y a aucun doute qu’il existe des antisémites parmi les gens qui s’opposent au sionisme. Mais il y a également beaucoup d’antisémites qui soutiennent le sionisme. Il est donc inapproprié et totalement inexact d’identifier de manière générale antisémitisme et antisionisme. En confondant ces deux phénomènes, l’Assemblée nationale compromettrait les efforts vitaux de lutte contre le véritable antisémitisme, qui est multidimensionnel et provient de différents secteurs de la société française. - Notre seconde objection est que la résolution approuve la « définition opérationnelle » de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA). Cette définition est hautement problématique. La résolution prétend que la définition « permet de désigner le plus précisément possible ce qu’est l’antisémitisme contemporain ». En réalité cependant, la définition est peu claire et imprécise et, par conséquent, n’est pas un instrument efficace de lutte contre l’antisémitisme. D’autre part, une législation visant à lutter efficacement contre l’antisémitisme et à le poursuivre existe déjà en France.
L’exposé des motifs de la proposition de résolution indique que la définition de l’IHRA « ne reconnaît pas comme antisémite la critique des politiques de l’État d’Israël ». En réalité cependant, plusieurs « exemples contemporains d’antisémitisme » ont été joints à la définition, qui assimilent intentionnellement la critique et l’opposition aux politiques de l’État d’Israël à l’antisémitisme. Ces exemples sont présentés et considérés comme partie intégrante de la définition.
D’après les exemples et la manière dont ils sont appliqués, il suffit de critiquer Israël d’une manière perçue comme différente de ce qui se fait pour d’autres pays, pour être considéré antisémite. Il suffit d’être en faveur d’une solution binationale ou démocratique au conflit israélo-palestinien, pour être considéré comme antisémite. Il en va de même, quand on blâme Israël pour son racisme institutionnalisé. On peut certainement ne pas être d’accord avec ces énoncés. Mais ces opinions sont considérées comme légitimes et protégées par la liberté d’expression dans tout autre contexte politique. Ainsi, la résolution crée un double standard injustifiable en faveur d’Israël et contre les Palestiniens.
La définition de l’IHRA est déjà utilisée pour stigmatiser et réduire au silence les critiques de l’État d’Israël, notamment les organisations de défense des droits humains et des experts respectés. Cette situation a été condamnée par d’éminents spécialistes de l’antisémitisme. Kenneth Stern, l’un des rédacteurs originaux de la définition de l’IHRA, a également mis en garde contre l’utilisation de cette définition pour saper la liberté d’expression.
La question clé est la suivante: pourquoi tout cela se produit-il ? Nous ne pouvons pas considérer cela comme déconnecté de l’agenda politique principal du gouvernement israélien visant à enraciner son occupation et son annexion de la Palestine et à faire taire toute critique à l’égard de cet agenda.
Depuis des années, le gouvernement israélien du Premier ministre Benjamin Netanyahu dénonce comme antisémite toute opposition à sa politique. Netanyahu lui-même a défendu avec force l’équivalence de l’antisionisme et de l’antisémitisme, ainsi que la définition de l’IHRA. Cela illustre la manière dont la lutte contre l’antisémitisme a été instrumentalisée pour protéger le gouvernement israélien.
C’est avec inquiétude que nous constatons que ces efforts du gouvernement israélien trouvent un soutien politique, jusqu’en France. Le 28 mai 2019, le député Sylvain Maillard avait participé à une conférence aux côtés de Yossi Dagan, un leader militant des colons, qui préside une autorité de l’État Israélien en charge des colonies en Cisjordanie occupée. Comme vous le savez, le député Maillard a initié la résolution en présence sur l’antisémitisme, quelques jours avant cet événement.
Nous vous demandons donc de lutter contre l’antisémitisme et contre toutes les formes de racisme, mais sans aider le gouvernement israélien dans son programme d’occupation et d’annexion.
Cette proposition de résolution n’est pas un moyen crédible et efficace d’y parvenir. L’antisémitisme doit être combattu sur des bases universelles, au même titre que d’autres formes de racisme et de xénophobie, pour lutter contre la haine. L’abandon de cette approche universaliste conduira[it] à une polarisation accrue en France, ce qui nuirait également à la lutte contre l’antisémitisme.
Dans ce contexte, nous notons que la proposition de résolution est également en contradiction avec la position de la CNCDH, la Commission nationale consultative des droits de l’homme. Dans son rapport de 2018 sur la lutte contre le racisme, la CNCDH a averti que la définition de l’IHRA risque d’affaiblir l’approche universelle française de la lutte contre le racisme et a insisté « sur la vigilance pour ne pas confondre racisme et critique légitime d’un État et de sa politique ». [...]"
Malgré cette lettre et malgré les critiques formulées à l'encontre de la définition de l'IHRA, la résolution controversée a été adoptée le 03 décembre 2019 par l'Assemblée Nationale.Le détail des débats et le résultat du vote peuvent être consultés au point 4 ("Lutte contre l'antisémitisme"), ici : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/comptes-rendus/seance/session-ordinaire-de-2019-2020/premiere-seance-du-mardi-03-decembre-2019 . La violence de certains députés était révélatrice de l'enjeu.
Il semble que Marine Le Pen s'était émue à l'époque du risque de ne plus pouvoir critiquer Israël.
Le CRIF était enchanté de voir "L'antisionisme intégré à la définition de l'antisémitisme" et le ministre israélien des Affaires Etrangères (Israel Katz) s'est réjoui de ce vote.
La définition de l'IHRA a donné lieu à une réponse sous la forme de la « Déclaration de Jérusalem sur l'antisémitisme (JDA) », élaborée en 2020 par un groupe de spécialistes de l’histoire de l’Holocauste, des études juives et des études sur le Moyen-Orient, issus du milieu universitaire et du monde de la recherche. La JDA propose une autre définition de l'antisémitisme et précise par des exemples ce qui, a priori, ne relève pas de l'antisémitisme. Le texte, initialement signé par 210 universitaires, compte aujourd'hui plus de 370 signataires. Le PDF en français peut être téléchargé ici : https://www.jerusalemdeclaration.org/wp-content/uploads/JDA-French.pdf . On trouve également sur le site de la JDA des questions-réponses en anglais et deux videos explicatives (sous-titres en français disponibles).
En 2021, une résolution identique à celle votée par l'Assemblée Nationale en 2019 a été portée devant le Sénat par le groupe UMP/LR. Cette résolution a été adoptée par le Sénat le 05 octobre 2021, malgré les critiques et malgré l'existence de la Déclaration de Jérusalem sur l'Antisémitisme (JDA) de 2020, plus claire et moins sujette à polémique.