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Elle a été annoncée depuis des jours comme la main tendue aux « syndicats réformistes » pour mieux diviser les salarié.e.s. Aujourd'hui, les éditocrates nous la présentent comme la manœuvre ultime du gouvernement pour faire craquer le « front syndical ». C'est un peu vite oublier que s'il y a bien un front syndical majoritaire contre la réforme, c'est celui qui en conteste la logique fondamentale : celle du régime à points taillé pour faire baisser les pensions drastiquement, obliger les travailleurs à cotiser plus longtemps, renoncer à faire reconnaître les pénibilités par des départs anticipés.
L'âge pivot brandi depuis des mois lors des concertations puis depuis l'annonce du plan Delevoye, puis sa confirmation il y a un mois par Edouard Philippe et enfin sa suspension et la menace de son retour par voie d'ordonnances, sont un piège grossier. L'âge d'équilibre ou l'âge pivot, c'est le panneau dans lequel Macron et sa team veulent nous faire tomber pour mieux masquer et faire passer l'essentiel de la réforme. Sa suspension sous conditions est une nouvelle chausse-trappe. Le gouvernement nous refait le coup de la négociation sous contrainte comme pour la réforme de l'assurance chômage. Il invite syndicats et patronat à débattre des mesures d'équilibre à 2027 en mettant deux conditions : pas de baisse des pensions et pas d'augmentation du coût du travail. Pour ce qui est de faire baisser les pensions, pas de souci... les syndicats opposés à cette réforme ne proposeront jamais rien de tel. Et pour ce qui est de faire baisser les pensions, la réforme systémique s'en chargera.
En revanche, fermer la porte à l'utilisation de nouvelles ressources n'a rien d'anodin. C'est la condition posée par le Medef pour accepter de participer à des négociations pipées d'avance. Clairement, le compromis est impossible sur cet âge pivot, mais bien plus, pendant qu'on occupera les syndicats à discuter vainement des mesures paramétriques, le gouvernement pourra se targuer de jouer l'ouverture aux yeux de l'opinion. Et à la fin, faute d'accord, le gouvernement imposera à la veille de l'été à la fois la réforme systémique et les mesures paramétriques de financement. Résultat : tout le monde sera concerné par la réforme. Celles et ceux né.e.s avant 1975 qui se verront imposer un recul de l’âge de départ en retraite, les plus jeunes qui subiront en plus la réforme à points.
Reste que ce recul anticipé depuis des semaines est à mettre au crédit de la mobilisation. Sans cette grève et ces mobilisations inédites par leur pugnacité, la messe serait dite depuis un mois. Or Macron et Philippe n'en n’ont pas fini avec cette crise sociale. Cette semaine, les 14, 15 et 16 janvier seront encore des temps de mobilisation intersyndicale pour obtenir le retrait de la réforme des retraites. Le 14 sera une « journée de grèves et de convergence interprofessionnelles », et d'autres initiatives doivent avoir lieu mercredi 15 et jeudi 16 janvier.
Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT