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Contraint par la mobilisation sociale de l’hiver 2019-2020 et la séquence de la pandémie d'ajourner sa mise en place, il n'a jamais fait mystère de son projet d'en faire un sujet de la campagne. Pas tant pour rouvrir le débat très conflictuel que pour obtenir une sorte de blanc-seing.
La manœuvre est assez grossière. Emmanuel Macron veut à nouveau profiter du vote par défaut des Français qui le reconduiraient à l'Élysée pour échapper à Le Pen ou Zemmour afin de se présenter comme légitime à imposer un recul de l'âge de la retraite à 65 ans. Il se croit autorisé à « enjamber » cette élection pour imposer demain la poursuite de ses réformes néolibérales.
On aura remarqué qu'il ne parle plus aujourd'hui de réformer le système, mais que comme ses prédécesseurs, il compte repousser l'âge de départ afin, selon ses lieutenants, de dégager assez de ressources pour financer aussi de « nouveaux progrès sociaux » dans d'autres secteurs, comme la dépendance, l'éducation, la santé, la formation ou le travail. Il ne faudrait surtout pas se gêner ! C'est un véritable hold-up qu'on nous prépare en affectant les cotisations retraite à tout autre chose.
Exit donc la réforme systémique, revoici le tripatouillage habituel sur les paramètres. Gabriel Attal et Richard Ferrand ont annoncé les priorités de cette réforme d'un second mandat. À commencer par le report de l'âge légal, étalé sur neuf années à raison de quatre mois par an, qui serait achevé pour la génération née en 1969.
C'est une absurdité sociale et économique de repousser l'âge de la retraite alors que les seniors sont poussés vers la sortie par les employeurs. Seuls 38 % des personnes de plus de 60 ans sont en emploi. Cela revient à faire exploser le chômage des seniors et faire chuter le montant des pensions. C'est un non-sens social de maintenir les seniors au boulot alors que l'espérance de vie en bonne santé est de 64 ans. C'est une réforme injuste pour les jeunes et notamment les plus diplômés qui entrent tard sur le « marché du travail ». Ainsi, ceux qui sont nés après 1973 doivent déjà cotiser 43 annuités alors que l'accès au premier emploi stable est encore à 26 ans.
Les raisons de s'opposer à cette nouvelle mouture de contre-réforme des retraites n'ont finalement pas changé. Ce qui a évolué en revanche, c'est qu'Emmanuel Macron risque d'avoir à affronter un front syndical plus large que lors de la mobilisation stoppée nette dans son élan par le premier confinement. C'est que cette fois Laurent Berger pour la CFDT estime cette nouvelle mouture de la réforme « injuste" et "brutale » et prévient qu'il la « combattra ». D'autant plus que « les retraites ne sont pas dans une situation financière difficile ». Même son de cloche à la CGC dont le président, François Hommeril, estime également qu’« il n'y a pas de raison économique à faire une réforme des retraites ». Quant à l'Unsa, elle fustige ce recul de l'âge de la retraite qui frappera plus durement « les plus précaires, c'est-à-dire les femmes, les carrières hachées, les temps partiels ». Du côté de FO, on dénonce « une grande arnaque » et on assure que le syndicat sera « sur la route du gouvernement ».
Il est « nécessaire que tous les syndicats français agissent ensemble et affirment haut et fort qu'ils sont contre cette proposition », a estimé le secrétaire général de la CGT vendredi 11 mars promettant « une opposition ferme et résolue (...) encore plus qu'il y a deux ans ».
Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT
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