
Alors bien sûr, personne n'est vraiment surpris quand le Premier ministre évoque finalement « un petit coefficient » comme on dit par chez lui. Pas très original et surtout empreint d'une bonne dose de mépris et d'aveuglement. Car ce que ne disent pas les commentaires oiseux sur les simples chiffres, c'est que ces manifestations marquent un tournant dans la contestation sociale d'ordinaire circonscrite à des mouvements catégoriels : cheminots, fonctionnaires ou encore travailleurs des maisons médicalisées (Ehpad) et retraités. Des mobilisations spécifiques qui ont en commun d'être toutes dirigées contre une politique cohérente.
Après n'avoir vu dans ces « Marées populaires » qu'un attelage entre la CGT et France Insoumise, il s'agit d'en minimiser la portée. Pourtant, les faits sont têtus : plus de 60 organisations, petites et grandes, ont dans le respect de chacune rassemblé leurs forces. Elles mènent des combats féministes, écologiques. Certaines se battent pour les minorités discriminées, pour les jeunes, les chômeurs, chômeuses et précaires, pour les partisans de la justice sociale, pour celles et ceux qui défendent des services publics de qualité, les libertés démocratiques, les droits des travailleurs et des travailleuses. Mais elles ont toutes en commun de s'affronter aux mêmes forces de l'argent au pouvoir, à la politique notamment sociale, économique, fiscale d'Emmanuel Macron. S'il y a bien un « en même temps » un an après son élection c'est celui qui marque la volonté de converger ces mobilisations pour être plus forts.
Mais la palme des commentaires sur ces manifestations est revenue à Gérard Collomb.
En affirmant samedi 26 mai, à l'issue de la « Marée populaire », que les manifestants étaient complices des casseurs par leur « passivité » et que cette inaction pourrait avoir des répercussions sur le droit de grève, le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb s'est encore distingué. Il s'est étonné « que des Black Blocs puissent intervenir au milieu d’une foule qui finalement ne réagit pas, a-t-il relevé face aux caméras de BFM. Si on veut garder demain le droit de manifester […], il faut que les personnes qui veulent exprimer leur opinion puissent s’opposer aux casseurs et ne pas, par leur passivité, être d’un certain point de vue complices de ce qui se passe.»
Après le déni, les menaces. Cynique et dangereux, Gérard Collomb menace en nous faisant porter la responsabilité de son échec dans la défense de la liberté fondamentale de manifester en sécurité. C'est grave pour nos libertés...
Par FD, journaliste engagé et militant Ugict-CGT