...procure-moi des extases, qu’importe qu’elles soient éphémères, elles me donnent envie de vivre, elles me rendent heureux mais la soif succède à la soif,
c’est une soif que rien ne parvient à tarir, on comble le vide avec du vide, à vrai dire cette soif devient plus ample au fil du temps et qu’est-ce cette lutte sinon une lutte contre le temps,
le temps qu’on veut vaincre en s'éternisant dans le désir de l’autre, ainsi lors de la fulgurance du désir on est mais on n'échappe pas au temps, il est maître de notre corps, il le dégrade, il le précarise, il le ramène à ce qu’il est, tout triomphe est de courte durée mais cela n'empêche pas le corps de le désirer, ainsi ce corps tend à ce qui ne peut être, il est en quête de l’inexistant mais il ne peut y échapper car les mécaniques de l'image l’y incitent,
on lui assène le corps glorifié, le corps est un dieu, le nouveau dieu, il faut le modeler non selon la logique de ce qu’il est mais selon la logique du corps fantasmé, lisse, épuré, presque transparent, corps qui fusionnent avec nos neurones, corps sur tous les écrans,
corps qui colonisent nos imaginaires, qui s’y enracinent, on ne peut s’en défaire qu’un prix d’un effort surhumain et plus on s’investit dans ce corps du désir qui cherche le désir de l’autre puis on s’en éloigne et moins il nous appartient, il devient une coque vide, le corps qui vit ainsi par et pour le désir est un corps aliéné,
il est un corps mensonger pas tant à l'égard des autres mais à l'égard de soi-même, le plus triste des mensonges, à l’image du corps mensonger du monde.
Umar Timol.