Tristan, commercial dans l’entreprise de Benoît, est parvenu à refourguer le boulot de réponse à appel d’offres à Arnaud. Ce dernier s’y est donc attelé. Il a proposé une première version du document à Tristan, dont ils ont discuté ensemble. Au cours de la discussion, ils se sont mis d’accord sur un des points cruciaux : le prix.
Pour cela, ils sont bien sûr partis du tarif tel que défini dans le catalogue de l'entreprise, qu’ils ont adapté à la spécificité du client et de son appel d’offres. Il s’agit en effet d’un gros client, sur lequel les concurrents sont susceptibles de casser les prix. En accord avec la direction commerciale, ils ont décidé d’une remise.
En plus des éléments techniques et tarifaires, Tristan a récupéré les informations comptables et juridiques auprès des services concernés. Une fois les documents rassemblés, il a envoyé au client le dossier complet.
Quelques semaines passent. Un beau matin, la réponse tombe : Rhône Immobilier a décidé de se passer des services de l’entreprise de Tristan, et a sélectionné le concurrent !
Tristan appelle Viriginie, son interlocutrice chez le client, pour comprendre ce qui a fait pencher la balance en faveur du concurrent. Réponse : c’est le prix. Aïe… finalement, Tristan n’est peut-être pas l’as de la négociation qu’il croyait être. Son réflexe reptilien d’auto-préservation prend aussitôt le relais : ça ne peut pas être lui le problème ; il y a forcément quelqu’un d’autre qui a merdé dans l’histoire.
Eh oui, c’est Arnaud bien sûr ! C’est lui qui a proposé cette remise bien trop faible à l’origine ! Et d’ailleurs, ne travaille-t-il pas au marketing ? Ne devrait-il pas connaître le marché sur le bout des doigts ? Comment Tristan pouvait-il deviner ce qui allait arriver ? Allez c’est parfait, Tristan part en croisade.
Il ne va pas s’en prendre directement à Arnaud - ce serait grossier - mais à la politique tarifaire de l’entreprise. En effet, quand le tarif catalogue est trop élevé, comment décider de la bonne remise ? Si c’est -5, -10, -15 %, c’est encore gérable, mais s’il faut descendre en-dessous, les repères sont brouillés !
Tristan sait qu’il s’agit là d’un combat fédérateur : dans toutes les entreprises du monde, les mauvais commerciaux passent leur temps à dire que, si seulement le produit était moins cher, ils en vendraient tellement plus ! Manière habile de rejeter sur autrui la responsabilité de leurs ventes. Dans cette bataille, ils ont un allié infaillible : les clients, qui ne manquent jamais de leur fournir les arguments nécessaires pour justifier la baisse des prix.