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Je ne suis qu'un rêveur...

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Billet de blog 2 avril 2024

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FLÂNERIE AU RIVAGE DES SONGES

« La vie est un songe, merci de l’avoir rêvée » Philippe Sollers

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
© Vent d'Autan

Depuis quelques jours déjà l’alternance pluie- grisaille embouteillait les grands lignes d’horizon, l’une et l’autre se pourchassant mutuellement dans cette folle ritournelle jusqu’à l’apogée du prochain rendez-vous des Saints de glace. Mi chiffonné, mi contrasté, le temps s’étirait en infinies longueurs sans que rien ne se passe au sein de la lumière déclinante et de ses infinis lambeaux de brumes.

Quelque peu désabusé par les giboulées tardives, le printemps tout guilleret regrettait sa soudaine précocité. Allant de pair, orages et éclaircies composaient la toile de fond sans plus rien voir des alentours. Plombé à fond de cale entre de gros nimbus infiniment suspects, le fragment d'un bleu de ciel, solennelle promesse affranchie de barbelés hérissés en coins d'ombre. Trouée d'azur nimbée d'une brûlante auréole accrochée aux foucades de doux rêveurs.

Illustration 2
© Vent d'Autan

Sur la vitre embuée, entre deux averses en peau de chagrin, les gouttes de pluie taillaient la route des ondées, lignes d'épure au fil de l'eau. L’atmosphère pluvieuse révélait les petits plaisirs de la vie sous un jour circonspect. À contre courant, le mauvais temps s’exposait en clair-obscur entre celui qui barbouille les étendues et celui qui file entre les mailles. Culbutant à la renverse toutes les prévisions, la météo n’en faisait qu’à sa tête, appliquant à la lettre les vieux dictons de croyance populaire. En Avril ne te découvre pas d’un fil. En mai fée ce qu’il te plait !

Point d’accalmie en ligne de mire, furibondes précipitations et ciel de traine, encore une journée à la peine, perdue dans l’indifférence du monde, à guetter les prochains frétillements de la maussaderie des saisons. À quand le vent du Sud qui d’un souffle vif chassera les nuages ? Attendre, à l’affût de ces petits riens qui peuplent l’infime et façonnent l'intime. Patience, longueur de temps.

Illustration 3
© Vent d'Autan

Calfeutré en son cocon douillet, il se languissait de ces délicieuses sensations cueillies au cours de promenades ordinaires, sentiments de plénitude sur le point d’éclore. Tout à coup il réalisait combien il passait à côté de l’intarissable beauté de ce qui nous entoure d’égards et d’affection. Entre langueur et mélancolie, le mot cinglait d’un coup vif, comme pour personnifier l’anicroche de ce désagrément passager : l'ennui.

L'ennui, incurable lassitude recluse entre le va et vient des vagues au bout du monde. L’ennui, ligne de crête des passagers éphémères, nomades en quête d’accomplissement, éparpillés au gré des grands espaces, pérégrinals. L'ennui, sans doute le plus féroce des défis face à la précipitation du monde. L’ennui, cette parenthèse enchantée, refuge de ceux qui voyagent en solitaire, comme s’il fallait se poser pour oser, tenter de se frotter aux épaisseurs de l’existence.

Pourchassant sans relâche les mots bleus consignés dans le secret des livres, qu’en était-il de ce mot clé salvateur qui peut-être bien allait bousculer les portes de son imaginaire en proie à la flétrissure. Sésame de la caverne aux trésors, point d’orgue de cette grande et folle aventure, périple de navigateur solitaire, entre pleins et déliés pétaradant d'enjolivures et d'arabesques. Fil prodigue épelant les enchantements nécessaires à la vitalité des voyageurs errant sur les routes hasardeuses.

Illustration 4
© Vent d'Autan

À grands coups de semonce les idées filaient à tue-tête, d’infimes péripéties en multiples rebondissements, sans qu’aucune ne daigne se poser sur les pages vierges du cahier à spirale, sans doute de peur de s’y trouver figée pour l’éternité, fleur séchée vidée de sa sève. Partir au loin, prendre le large, tailler la route, s’enfuir, s'éclipser, s'esquiver. Loin d'ici, dix vagues à l'âme. Irrépressible envie d'ailleurs, toujours en embuscade l'aventure attend quelque part, là où personne ne sait. Ça commence à cogner, à frétiller, des fourmis dans les pattes, vite bouger, s’en aller. 

Le jour s'en vient à grand peine sur les braséros de l'aube naissante, semblant accroché jusque dans les instants qui filent entre les mailles, les souvenirs qui défilent sous le soleil rasant et la vie qui se faufile entre les pages de ce roman dont le dénouement reste lumière dans les nuits obscures. Comme toujours le monde en équilibre qui dans un coin d’éternité, compose la toile des heures fugitives. Parfum de mystère. Cahiers de vacances ou carnets de voyage, le monde à portée de main, savoureux à découvrir, vertueux à parcourir. Destination inconnue, périple au pays des jardins d'ivresse.

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