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Moi, Félicien, parfois d'ici et bien souvent d'ailleurs, d'un peu partout mais aussi de nulle part, tout ça à la fois, dûment arrimé entre deux points d'ancrage, à la croisée des chemins, piliers de mes ligneuses racines quelque peu tombées dans l’oubli.
Moi, Félicien, chétif rejeton de la ligne bleue des Vosges, intrépide funambule des contreforts de la Montagne Noire, je me suis construit à travers les souvenirs de ces grands espaces ouverts sur l’infini. À la jonction de ces territoires d’infortune, conforté d’un certain regard lucide sur la fragilité de la vie et de ses encombres.
Moi, Félicien, l'enfant riche de quatre prénoms, loyal héritage de mes aïeux éparpillés ça et là aux quatre vents. Au fil des millénaires, je poursuis ma route où se prolonge la douceur des étés lumineux, là où passent les saisons en infinies candeurs sans cesse renouvelées.
Moi, Félicien, hâtif de lever le voile du jour, à l'aube du siècle dernier j'ai poussé mon tout premier éclat de voix, bien trop précoce pour confirmer tous les augures à propos de mon avènement. Par les caprices du hasard, de sa main mystérieuse la vie m’a confié son sourire amusé et la primauté de son insouciance.
Moi, Félicien, j’ai vu poindre le jour aux prémisses de l’aube du siècle dernier. Un de ces derniers témoins d’une autre époque quasi révolue, quelque peu surannée. Ainsi je déambule sans but précis, guidé par cette folle envie de laisser une trace quelconque. Le temps de la raison viendra me cueillir au seuil de mes nuits blanches et ardentes. Rien de plus, rien de moins, juste de passage.