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Je ne suis qu'un rêveur...

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Billet de blog 22 avril 2024

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À CHACUN SON ÉCLIPSE

" Il sentait le poids de la forêt d'autour, l'inertie hostile de cette vaste pénombre recélant dans ses assises un grouillement nuiteux et sournois." Marcel Aymé

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1
© Vent d'Autan

Ce matin là il s'était éveillé aux aurores, avant que ne pointe l'aube. Pas trop dans ses habitudes. L'atmosphère si particulière de la nuit bousculait son entendement. Cette obscurité palpable qui enveloppe les ombres dans les délices de la mélancolie, celle qui depuis la nuit des temps accompagne la quête quasi mystique des noctambules en mal d'inspiration. Artistes reclus, poètes maudits, musiciens éphémères, esthètes orageux, chassé croisé de personnages clés campés sur la scène crépusculaire. Tant et tant de volutes de spleen sous les oripeaux.

Complice d’éternité la conspiration du silence engonçait la sorgue de tonalités assourdies. À peine la palpitation  singulière du balancier de la vieille horloge accompagnée de la routine cyclique du frigidaire. L'orchestration de ces murmures étouffés à l'orée du jour. En cet écrin diffus les mots restaient sans voix, écho de profonds soupirs. À hue et à dia, au carrefour céleste les songes, terrain de jeux des poètes, palpitaient en paillettes d’or.

Illustration 2
© Vent d'Autan

Depuis quelques temps déjà certains signes avant-coureurs auraient pu l'interpeller, cette sommité de petits riens qui en fin de compte accomplissent un grand tout. Sans trop s'en inquiéter il avait balayé tout ça d'un simple revers comme pour se débarrasser de moustique trop audacieux. Nonobstant les obstacles il se refusait à regarder la réalité en face, par peur,  par dépit ou par amertume. Parfois les grandes inquiétudes restent muettes, cristallisées en postures de fuite et d'évitement. 

Face à ces ballotements l'évidence avançait masquée, dans le doute elle prenait le visage d'une illusion à peine déguisée. Dans les replis obscurs qui lui faisaient défaut l'illusion se glissait au creux de l’ordinaire, habile en subterfuges. Suspendus à de fiévreuses arabesques de silence, les mots filaient à travers les étoiles, muses somnambules. La nuit porte conseil, surtout celles de pleine lune gibbeuse. 

Illustration 3
© Vent d'Autan

Ses pensées tournaient en rond sans qu'il puisse n’en attraper aucune. Son imaginaire, terreau fertile de l'écriture lui jouait de biens vilains tours. En proie à la désaffection des rimes, l'alphabet des chimères s'éloignait du feu filandreux de la poésie. Ainsi se détricotait la partition des mots, concassés dans la fièvre du recueillement.

Et d'une page à l'autre, en ces vierges territoires de l'intime, la mendicité des écrits n'avait plus grâce d'exister sous l’ardeur de la plume. Tandis que son esprit tentait de colmater les brèches béantes, sa main inquiète, presque hésitante tremblait d’épouvante. À tâtons il cherchait le mot juste, juste les mots à l’encre des sentiments. Au petit matin un éclat de soleil perçait entre les guirlandes de glycine. Des pétales de poésie jonchaient à terre.

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