
Agrandissement : Illustration 1

Accrochées en grand à la toile de fond, quelques grappes de coton en suspension. Et jusqu’à perte de vue, l’horizon, téméraire et aventureux, qui se fond et puis qui se confond dans les myriades de reflets d’argent. Là bas, drapé dans la nébulosité du lointain inconnu, érigé en totem phallique du roi soleil, Cordouan, Versailles des mers, érige sa silhouette de nouvelle vedette du patrimoine de l’Unesco. De quoi pavoiser sous bonnes augures, au gré du ressac des flots et de la frénésie des tourbillons maritimes. Direction le grand large, dans ce royaume des silences où reposent tant de promesses échues. Panorama à 360°.
A la pointe du jour, les premiers rayons ardents transpercent le mystère de l’aube. Emmitouflé dans le chatoiement des lueurs naissantes, le monde, encore endormi, s’éveille en baillant, émergeant de sa profonde léthargie. Aux premières heures, l’infinie solitude de la grève face à l’immensité de l’océan. Juste le bruissement de cette ondulation sauvage, mimant à la perfection le bruit des lames, caresse des âmes. Rythmes exotiques que seules de curieuses oreilles peuvent apprécier en toute sérénité.
Lieu d’exception, détaché de l’étendue des circonstances, enclin à la rêverie, à l’évasion, aux échappées belles, à cette dimension plus charnelle, plus sensuelle. Par ici, bien plus qu’ailleurs, on peut encore ralentir l’amplitude du temps, voir même le tuer ! Luxe et privilège de naguère. Il est de bon aloi d’en user et même d’en abuser jusqu’à cette ivresse tapie en cette enclave du monde, dans les profondeurs de nos âmes. Prise au piège, goutte à goutte, la clepsydre se fige dans la mélancolie d’un état de grâce. Sans chercher à être irrévérencieux, nul n’y voit que du bleu ! Dans le plissement des cieux et dans la poésie des mots, frêles esquifs tanguant dans le frisson des marées humaines.
S’aventurer au gré des aléas du hasard, quitte à y côtoyer Dieu, qui parfois déambule incognito. Se perdre en terre inconnue. Se laisser happer par la griserie des instants. Apprivoiser ce destin, affronter cette destinée. S’abandonner à ce qui est. Lâcher prise, en phase avec les éléments. Symbiose des instants. Pour l’air que l’on respire, l’eau que l’on transpire, le feu qui nous attise et cette Terre qui nous supporte. Nous, nos excès, nos folies, nos outrances. Invitation au dépaysement, au dénuement, à l’abandon. Territoire d’évasion, royaume d‘abstraction.

Presque inaperçue, à l’abri de regards à la curiosité mal placée, incongrue et anonyme, une boite à l’être. Invitation à y déposer soucis, tracas, et ennuis. Ici le tempo ralentit le cours des humeurs. Juste quelques clichés d’instantanés, en ligne de mire et en toile de fond. Vent arrière. Fanions des nations secoués tels de vulgaires fétus de paille. Sous la pression océanique, les embruns cinglent les visages avec cette jubilation de douce retrouvaille. En coup de vent, le temps de claquer quelques portes.

Agrandissement : Illustration 3

Drapeau jaune, marée montante. Plage des olives. Quotidiennement rafraichi, le panneau d’affichage annonce la tendance du jour. Température de l’air, température de l’eau. Coefficients et heures des marées. Par ici, l’océan reste un tantinet capricieux, à sans cesse s’amuser à cache-cache. Il est passé par ici, il repassera par là ! Tout devient sempiternel.

Agrandissement : Illustration 4

Quelques petites mains besogneuses habillent avec ferveur la colonie de squelettes métalliques plantés dans le sable. Parés de leurs atouts de toiles imprimées de rayures blanches et bleues, où plus tard, des cohortes entières de tribus de tout âge viendront y tenir le siège, dans une bonne humeur un tant soit peu débonnaire. Échanges, rires, partages, lectures, jeux, siestes, farniente. La plage autrement. Carré de bleu avec vue sur mer.

Agrandissement : Illustration 5

Échoué sur le bord du rivage, un cétacé de métal rouillé, œuvre emblématique, régurgite ses détritus de plastique à la barbe des touristes amusés, qui, le temps d’un selfie circonstanciel, marquent la pause exigée. Souvenir de vacances à partager. Clin d’œil assuré.
Perchés tout en haut de leur promontoire, les hommes en jaune scrutent l’horizon en quête de baigneurs en crise de panique. Zone de baignade surveillée. Jeux de ballon et de raquettes. Châteaux et pâtés de sable. Sensations fortes et frissons le long du littoral. A chacun son challenge. A chacun sa plage.

Agrandissement : Illustration 6

Le monde a changé. Trois petits points. Douceur et bienfait à mille lieux des clameurs lointaines. Tout semble plus lumineux, plus harmonieux, presque étourdissant. Illusion, sensation, impression. Paradis de poètes. Privilège de rêveurs. Virtuosité d’âmes sœurs. Déconnecté. En apesanteur. Plus rien de concret. Détaché de tout ce qui dissimule l’ordinaire de la vie de chaque jour. Pieds nus sur les petits fragments de silice blonds. Nudité et granulosité. Éphémère empreinte d’un instant de passage. Se laisser porter par l’inconnu. Se débarrasser du flou, du superflu, de l’inutile, de l’encombrement. Faire l'économie du frivole, de l'illusoire. L’esprit à l’air libre. « Marcher sur l'eau, Éviter les péages, Jamais souffrir, Juste faire hennir, Les chevaux du plaisir. »