Agrandissement : Illustration 1
L’œuvre de Robert Liebknecht parcourt toute sa vie.
Très tôt, il manifeste cette vocation qui sera encouragée de sa prison par son père Karl Liebknecht, ce député révolutionnaire allemand qui refusa le renouvellement des crédits de guerre en 1914. De prison, où il se trouve depuis la manifestation du 1er mai 1916, organisée en pleine guerre, en plein Berlin, Karl Liebknecht écrit à son fils :
Luckau, le 2 mai 1918, Mon petit Bob
... Tête haute, petit ! Je sais bien que c’est un mauvais moment à passer pour vous. Il y a longtemps que je le sais. Mais de votre côté, vous avez la jeunesse. Aussi, soyez vrais et demeurez fiers devant toutes les misères de l’époque, auxquels, j’aurais, je vous jure, préféré vous voir participer moins jeunes. Tête haute, vous dis-je ; et sans vous éreinter, travaillez pour l’école en vous appliquant. Faites toujours bien votre travail. Quel dommage que je n’aie pas vu tes dessins cette fois-ci ! Je ne suis pas content de toi. Tu sais pourtant combien cela m’intéresse. Te donne-t-on des leçons cette fois-ci ? J’ai complètement oublié de te le demander. Je t’embrasse. Tout ira bien, va. Ton papa, qui vous écrira à tous en juin.
Agrandissement : Illustration 2
Voir, lettres du front et de la geôle https://comprendre-avec-rosa-luxemburg.over-blog.com/2025/01/karl-liebknecht-je-lui-explique-que-je-ne-tirerai-pas-meme-si-on-on-me-le-commande-on-peut-me-fusiller-si-on-veut.html
Il est aussi encouragé par la grande artiste Käthe Kollwitz.
https://www.editionslateliercontemporain.net/IMG/pdf/extraits_journal_kollwitz.pdf
L’œuvre de Robert Liebknecht
ESQUISSE DE PRESENTATION
L’œuvre de Robert Liebknecht parcourt toute sa vie, ponctuée comme celle-ci par les drames de l'histoire.
Robert Liebknecht est l'un des premiers à s'enfuir en 1933 avec son épouse Herta en France lors de l'arrivée au pouvoir d'Hitler. Il laisse derrière lui, en Allemagne, une œuvre déjà achevée mais qui sera en grande partie détruite lors des bombardements de Berlin en 1944. Il reste cependant de cette époque des toiles sensibles et engagées tel le tableau "Chômeur".
En France, Robert Liebknecht exilé, reconstruit pas à pas une œuvre, qui peu à peu trouve une reconnaissance artistique et officielle.
Agrandissement : Illustration 4
Montrouge 1933
(Où habitèrent Herta et Robert à leur arrivée en France)
Agrandissement : Illustration 5
Retour du travail 1937
Mais l'histoire de nouveau l'interrompt, c'est la guerre, le régime de Vichy. Dans les conditions extrêmes, il dessine sans relâche. Silhouettes statiques ou en mouvement, au Camp des Milles.
Ou portraits de "Travailleurs étrangers" comme lui que l'on appelait "prestataires", au Camp de Langlade et à Calvisson, près de Nîmes entre 1940 et 1943. Ne pouvant être soldats, les ressortissants des pays du Reich sont intégrés dans la lutte économique.Mais, contrairement à eux, ils ne seront pas démobilisés et resteront prisonniers, pris au piège de Vichy. De cette époque datent des portraits qui donnent un visage à celles et ceux qui nombreux mourront en déportation, mais aussi des paysages de la Vaunage, région où il était retenu, paysages solaires pris en instantanés, couleurs pastels ou barrés de stries énervées. Ces œuvres sont réalisées avec les moyens dont il dispose alors, feuilles de papier improbables, crayon, plume et parfois pastels.
Agrandissement : Illustration 7
Agrandissement : Illustration 8
En 1943, Robert Liebknecht doit de nouveau s'enfuir avec son épouse et sa fille Marianne née en 1941 lorsque les troupes hitlériennes passent la ligne de démarcation - ce sera en Suisse-. Il reprend alors la peinture comme le montrent de nombreuses lettres conservées, puis revient en 1945 à Paris où il vivait avant la guerre.
De la période parisienne, datent d'innombrables scènes de rue, happées dans le métro, peintes ou dessinées, d'innombrables esquisses que l'être humain traverse mais qui est pour ce court instant identifiable. "Passants qui passent" à la fois présents et furtifs ou portraits posés.
https://blogs.mediapart.fr/villaeys-poirre/blog/030223/robert-liebknecht-paris-visages-rencontres
Dans toutes ses œuvres, faites dans des conditions si diverses, ce qui transparaît en toute continuité, c'est bien le sens de l'humain, des regards intenses que l'on n'oublie pas ou le mouvement rapide qui indique la fragilité de la vie.
Cette esquisse de présentation (à suivre) est rédigée pour alerter sur l'invisibilité en France de l’œuvre.
Car de Robert Liebknecht, bien qu'il ait vécu jusqu'en 1994 en France, il n'y a pas d’œuvres exposées. Seules trois ont été acquises par l'Etat.
Des rencontres autour du travail de ce grand dessinateur et peintre que fut Robert Liebknecht sont organisées, initiatives qui ont pour but de faire sortir l’œuvre de l'ensevelissement de l'oubli, d'initier des expositions et de s'employer auprès de l'Etat, des musées pour que soient acquis enfin des toiles et dessins.
De celui qui choisit de vivre en France et de prendre la nationalité malgré les torts subis qui auraient pu lui coûter la vie ainsi qu'à sa famille.
Agrandissement : Illustration 9
Dans ce travail pour faire connaître l’œuvre de Robert Liebknecht, je suis aidée par de nombreuses personnes , mais je tiens à citer ici Elian Cellier, Gardois passionné, président de l'association" Les amis du peintre Albert André", avec lequel j'ai eu le plaisir d'aller voir Marianne Liebknecht et de découvrir alors l'immensité du travail de son père.
Une exposition-rencontre autour de l’œuvre de Robert Liebknecht aura lieu ce 21 juin à 16 h 30 aux Trois Granges à Saint-Clément (89).