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Hervé Fogeron a choisi ce poème de Mahmoud Darwich issu du recueil "La terre nous et étroite". 50 Palestiniens sont tués dans une oliveraie. Mahmoud Darwich a donné la parole aumort n° 18
Hervé Fogeron par son travail inspiré de ce poème, donne lui un visage, des visages à la mort, un visage à ces morts. Dans une série de petits tableaux à la fois semblables et différents comme le sont les visages des morts.
Le poème a été écrit en 1967,
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Le poème de Mahmoud Darwich
LE MORT N° 18
L’oliveraie était verte, autrefois.
Était… Et le ciel,
Une forêt bleue… Était, mon amour.
Qu’est-ce qui l’a ainsi changée ce soir ?
…
Ils ont stoppé le camion des ouvriers à un tournant.
Calmes,
Ils nous ont placé face à l’est… Calmes.
…
Mon cœur était un oiseau bleu, autrefois… Ô nid de mon amour.
Et tes mouchoirs étaient chez moi, blancs. Étaient, mon amour.
Qu’est-ce qui les a souillés ce soir ?
Je ne sais, mon amour !
Ils ont stoppé le camion des ouvriers au milieu du chemin.
Calmes,
Ils nous ont placés face à l’est… Calmes.
…
Je te donnerai tout.
L’ombre et la lumière,
L’anneau des noces et tout ce que tu désires,
Un jardin d’oliviers et de figuiers,
Et la nuit, je te rendrai visite, comme à l’accoutumée.
J’entrerai, en rêve, par la fenêtre… et je te lancerai une fleur de sambac.
Et ne m’en veux pas si j’ai quelque retard.
C’est qu’ils m’auront arrêté.
L’oliveraie était toujours verte.
Était, mon amour.
Cinquante victimes
L’ont changée en bassin rouge au couchant… Cinquante victimes,
Mon amour… Ne m’en veux pas…
Ils m’ont tué… Tué
Et tué…
(Mahmoud Darwich)
Recueil: La terre nous est étroite
Traduction: Elias Sanbar
Editions: Gallimard
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En 1960, à dix-neuf ans, Mahmoud Darwich publie son premier recueil de poèmes dont le titre, Les oiseaux sans ailes, exprime déjà clairement la vive conscience que le poète a alors de la condition palestinienne.
2Il faut dire que par la force des choses, plus exactement la violence des faits, cette conscience lui est venue très tôt. Il a à peine sept ans lorsque sa famille, comme toute la population de son village natal Al-Birwah, près de St Jean d’Acre, est chassée sous les obus par les Israéliens. Quelques mois plus tard – fin 1948 – le village est rasé. C’est la Naqba, la catastrophe, à la suite de quoi, au fil des années, cinq cent soixante sept villages palestiniens seront rasés – et rayés de la carte – en comptant les derniers, ceux de 1967 dont le village d’Emmaüs, devenu Canada.